Akirill.com

L’homme Qui Rit de Victor Hugo Bilingual Book English/French Page 5

Ce n’est pas une traduction mots a mots mais les livres dans les deux languages mis côte a côte. Vous pouvez le lire en Français, en anglais ou parallèlement.

This is not a word-by-word translation but the books in the two languages put side by side. You can read it in French, in English or both.

L’homme qui rit, par Victor Hugo

Help us, buy us a cup of coffee
Aidez-nous en nous offrant une tasse de café

BOOK THE SECOND.
THE HOOKER AT SEA.
LIVRE DEUXIÈME
L’OURQUE EN MER
BOOK THE THIRD.
THE CHILD IN THE SHADOW.
LIVRE TROISIÈME
L’ENFANT DANS L’OMBRE
CHAPTER I. CHESIL.I _ LE CHESS-HILL
The storm was no less severe on land than on sea. La tempête n’était pas moins intense sur terre que sur mer.
The same wild enfranchisement of the elements had taken place around the abandoned child. The weak and innocent become their sport in the expenditure of the unreasoning rage of their blind forces. Shadows discern not, and things inanimate have not the clemency they are supposed to possess.Le même déchaînement farouche s’était fait autour de l’enfant abandonné. Le faible et l’innocent deviennent ce qu’ils peuvent dans la dépense de colère inconsciente que font les forces aveugles; l’ombre ne discerne pas; et les choses n’ont point les clémences qu’on leur suppose.
On the land there was but little wind. There was an inexplicable dumbness in the cold. There was no hail. The thickness of the falling snow was fearful.Il y avait sur terre très peu de vent; le froid avait on ne sait quoi d’immobile. Aucun grêlon. L’épaisseur de la neige tombante était épouvantable.
Hailstones strike, harass, bruise, stun, crush. Snowflakes do worse: soft and inexorable, the snowflake does its work in silence; touch it, and it melts. It is pure, even as the hypocrite is candid. It is by white particles slowly heaped upon each other that the flake becomes an avalanche and the knave a criminal.Les grêlons frappent, harcèlent, meurtrissent, assourdissent, écrasent; les flocons sont pires. Le flocon inexorable et doux fait son œuvre en silence. Si on le louche, il fond. Il est pur comme l’hypocrite est candide. C’est par des blancheurs lentement superposées que le flocon arrive à l’avalanche et le fourbe au crime.
The child continued to advance into the mist. The fog presents but a soft obstacle; hence its danger. It yields, and yet persists. Mist, like snow, is full of treachery. The child, strange wrestler at war with all these risks, had succeeded in reaching the bottom of the descent, and had gained Chesil. Without knowing it he was on an isthmus, with the ocean on each side; so that he could not lose his way in the fog, in the snow, or in the darkness, without falling into the deep waters of the gulf on the right hand, or into the raging billows of the high sea on the left. He was travelling on, in ignorance, between these two abysses.L’enfant avait continué d’avancer dans le brouillard. Le brouillard est un obstacle mou; de là des périls; il cède et persiste; le brouillard, comme la neige, est plein de trahison. L’enfant, étrange lutteur au milieu de tous ces risques, avait réussi à atteindre le bas de la descente, et s’était engagé dans le Chess-Hill. Il était, sans le savoir, sur un isthme, ayant des deux côtés l’océan, et ne pouvant faire fausse route, dans cette brume, dans cette neige et dans cette nuit, sans tomber, à droite dans l’eau profonde du golfe, à gauche dans la vague violente de la haute mer. Il marchait, ignorant, entre deux abîmes.
The Isthmus of Portland was at this period singularly sharp and rugged. Nothing remains at this date of its past configuration. Since the idea of manufacturing Portland stone into Roman cement was first seized, the whole rock has been subjected to an alteration which has completely changed its original appearance. Calcareous lias, slate, and trap are still to be found there, rising from layers of conglomerate, like teeth from a gum; but the pickaxe has broken up and levelled those bristling, rugged peaks which were once the fearful perches of the ossifrage. The summits exist no longer where the labbes and the skua gulls used to flock together, soaring, like the envious, to sully high places. In vain might you seek the tall monolith called Godolphin, an old British word, signifying “white eagle.”In summer you may still gather on those surfaces, pierced and perforated like a sponge, rosemary, pennyroyal, wild hyssop, and sea-fennel which when infused makes a good cordial, and that herb full of knots, which grows in the sand and from which they make matting; but you no longer find gray amber, or black tin, or that triple species of slate—one sort green, one blue, and the third the colour of sage-leaves. The foxes, the badgers, the otters, and the martens have taken themselves off; on the cliffs of Portland, as well as at the extremity of Cornwall, where there were at one time chamois, none remain. They still fish in some inlets for plaice and pilchards; but the scared salmon no longer ascend the Wey, between Michaelmas and Christmas, to spawn. No more are seen there, as during the reign of Elizabeth,those old unknown birds as large as hawks, who could cut an apple in two, but ate only the pips. You never meet those crows with yellow beaks, called Cornish choughs in English,
pyrrocoraxin Latin, who, in their mischief, would drop burning twigs on thatched roofs. Nor that magic bird, the fulmar, a wanderer from the Scottish archipelago, dropping from his bill an oil which the islanders used to burn in their lamps. Nor do you ever find in the evening, in the plash of the ebbing tide, that ancient, legendary neitse, with the feet of a hog and the bleat of a calf. The tide no longer throws up the whiskered seal, with its curled ears and sharp jaws, dragging itself along on its nailless paws. On that Portland—nowadays so changed as scarcely to be recognized—the absence of forests precluded nightingales; but now the falcon, the swan, and the wild goose have fled. The sheep of Portland, nowadays, are fat and have fine wool; the few scattered ewes, which nibbled the salt grass there two centuries ago,were small and tough and coarse in the fleece, as became Celtic flocks brought there by garlic-eating shepherds, who lived to a hundred, and who, at the distance of half a mile, could pierce a cuirass with their yard-long arrows. Uncultivated land makes coarse wool. The Chesil of to-day resembles in no particular the Chesil of the past, so much has it been disturbed by man and by those furious winds which gnaw the very stones.
L’isthme de Portland était à cette époque singulièrement âpre et rude. Il n’a plus rien aujourd’hui de sa configuration d’alors. Depuis qu’on a eu l’idée d’exploiter la pierre de Portland en ciment romain, toute la roche a subi un remaniement qui a supprimé l’aspect primitif. On y trouve encore le calcaire lias, le schiste, et le trapp sortant des bancs de conglomérat comme la dent de la gencive; mais la pioche a tronqué et nivelé tous ces pilons hérissés et scabreux où venaient se percher hideusement les ossifrages. Il n’y a plus de cimes où puissent se donner rendez-vous les labbes et les stercoraires qui, comme les envieux, aiment à souiller les sommets. On chercherait en vain le haut monolithe nommé Godolphin, vieux mot gallois qui signifie aigle blanche. On cueille encore, l’été, dans ces terrains forés et troués comme l’éponge, du romarin, du pouliot, de l’hysope sauvage, du fenouil de mer qui, infusé, donne un bon cordial, et cette herbe pleine de nœuds qui sort du sable et dont on fait de la natte; mais on n’y ramasse plus ni ambre gris, ni étain noir, ni cette triple espèce d’ardoise, l’une verte, l’autre bleue, l’autre couleur de feuilles de sauge. Les renards, les blaireaux, les loutres, les martres, s’en sont allés; il y avait dans ces escarpements de Portland, comme à la pointe de Cornouailles, des chamois; il n’y en a plus. On pêche encore, dans de certains creux, des plies et des pilchards, mais les saumons, effarouchés, ne remontent plus la Wey entre la Saint-Michel et la Noël pour y pondre leurs œufs. On ne voit plus là, comme au temps d’Elisabeth, de ces vieux oiseaux inconnus, gros comme des éperviers, qui coupaient une pomme en deux et n’en mangeaient que le pépin. On n’y voit plus de ces corneilles à bec jaune, cornish chough en anglais, pyrrocarax en latin, qui avaient la malice de jeter sur les toits de chaume des sarments allumés. On n’y voit plus l’oiseau sorcier fulmar, émigré de l’archipel d’Ecosse, et jetant par le bec une huile que les insulaires brûlaient dans leurs lampes. On n’y rencontre plus le soir, dans les ruissellements du jusant, l’antique neitse légendaire aux pieds de porc et au cri de veau. La marée n’échoue plus sur ces sables l’otarie moustachue, aux oreilles enroulées, aux mâchelières pointues, se traînant sur ses pattes sans ongles. Dans ce Portland aujourd’hui méconnaissable, il n’y a jamais eu de rossignols, à cause du manque de forêts, mais les faucons, les cygnes et les oies de mer se sont envolés. Les moutons de Portland d’à présent ont la chair grasse et la laine fine; les rares brebis qui paissaient il y a deux siècles cette herbe salée étaient petites et coriaces et avaient la toison bourrue, comme il sied à des troupeaux celtes menés jadis par des bergers mangeurs d’ail qui vivaient cent ans et qui, à un demi-mille de distance, perçaient des cuirasses avec leur flèche d’une aune de long. Terre inculte fait laine rude. Le Chess-Hill d’aujourd’hui ne ressemble en rien au Chess-Hill d’autrefois, tant il a été bouleversé par l’homme, et par ces furieux vents des Sorlingues qui rongent jusqu’aux pierres.
At present this tongue of land bears a railway, terminating in a pretty square of houses, called Chesilton, and there is a Portland station. Railway carriages roll where seals used to crawl.Aujourd’hui cette langue de terre porte un railway qui aboutit à un joli échiquier de maisons neuves, Chesilton, et il y a une «Portland-Station». Les wagons roulent où rampaient les phoques.
The Isthmus of Portland two hundred years ago was a back of sand, with a vertebral spine of rock.L’isthme de Portland, il y a deux cents ans, était un dos d’âne de sable avec une épine vertébrale de rocher.
The child’s danger changed its form. What he had had to fear in the descent was falling to the bottom of the precipice; in the isthmus, it was falling into the holes. After dealing with the precipice, he must deal with the pitfalls. Everything on the sea-shore is a trap—the rock is slippery, the strand is quicksand. Resting-places are but snares. It is walking on ice which may suddenly crack and yawn with a fissure, through which you disappear. The ocean has false stages below, like a well-arranged theatre.Le danger, pour l’enfant, changea de forme. Ce que l’enfant avait à craindre dans la descente, c’était de rouler au bas de l’escarpement; dans l’isthme, ce fut de tomber dans des trous. Après avoir eu affaire au précipice, il eut affaire à la fondrière. Tout est chausse-trape au bord de la mer. La roche est glissante, la grève est mouvante. Les points d’appui sont des embûches. On est comme quelqu’un qui met le pied sur des vitres. Tout peut brusquement se fêler sous vous. Fêlure par où l’on disparaît. L’océan a des troisièmes dessous comme un théâtre bien machiné.
The long backbone of granite, from which fall away both slopes of the isthmus, is awkward of access. It is difficult to find there what, in scene-shifters’ language, are termed 
practicables. Man has no hospitality to hope for from the ocean; from the rock no more than from the wave. The sea is provident for the bird and the fish alone. Isthmuses are especially naked and rugged; the wave, which wears and mines them on either side, reduces them to the simplest form. Everywhere there were sharp relief ridges, cuttings, frightful fragments of torn stone, yawning with many points, like the jaws of a shark; breaknecks of wet moss, rapid slopes of rock ending in the sea. Whosoever undertakes to pass over an isthmus meets at every step misshapen blocks, as large as houses, in the forms of shin-bones, shoulder-blades, and thigh-bones, the hideous anatomy of dismembered rocks. It is not without reason that these 
striæ of the sea-shore are called 
côtes.
Les longues arêtes de granit auxquelles s’adosse le double versant d’un isthme sont d’un abord malaisé. On y trouve difficilement ce qu’on appelle en langage de mise en scène des praticables. L’homme n’a aucune hospitalité à attendre de l’océan, pas plus du rocher que de la vague; l’oiseau et le poisson seuls sont prévus par la mer. Les isthmes particulièrement sont dénudés et hérissés. Le flot qui les use et les mine des deux côtés les réduit à leur plus simple expression. Partout des reliefs coupants, des crêtes, des scies, d’affreux haillons de pierre déchirée, des entre-bâillements dentelés comme la mâchoire multicuspide d’un requin, des casse-cous de mousse mouillée, de rapides coulées de roches aboutissant à l’écume. Qui entreprend de franchir un isthme rencontre à chaque pas des blocs difformes, gros comme des maisons, figurant des tibias, des omoplates, des fémurs, anatomie hideuse des rocs écorchés. Ce n’est pas pour rien que ces stries des bords de la mer se nomment côtes. Le piéton se tire comme il peut de ce pêle-mêle de débris.
The wayfarer must get out as he best can from the confusion of these ruins. It is like journeying over the bones of an enormous skeleton.Cheminer à travers l’ossature d’une énorme carcasse, tel est à peu près ce labeur.
Put a child to this labour of Hercules.Mettez un enfant dans ce travail d’Hercule.
Broad daylight might have aided him. It was night. A guide was necessary. He was alone. Le grand jour eût été utile, il faisait nuit; un guide eût été nécessaire, il était seul.
All the vigour of manhood would not have been too much. He had but the feeble strength of a child. In default of a guide, a footpath might have aided him; there was none.Toute la vigueur d’un homme n’eût pas été de trop, il n’avait que la faible force d’un enfant. A défaut de guide, un sentier l’eût aidé. Il n’y avait point de sentier.
By instinct he avoided the sharp ridge of the rocks, and kept to the strand as much as possible. It was there that he met with the pitfalls. They were multiplied before him under three forms: the pitfall of water, the pitfall of snow, and the pitfall of sand. This last is the most dangerous of all, because the most illusory.D’instinct, il évitait le chaîneau aigu des rochers et suivait la plage le plus qu’il pouvait. C’est là qu’il rencontrait les fondrières. Les fondrières se multipliaient devant lui sous trois formes, la fondrière d’eau, la fondrière de neige, la fondrière de sable. La dernière est la plus redoutable. C’est l’enlisement.
To know the peril we face is alarming; to be ignorant of it is terrible. The child was fighting against unknown dangers. He was groping his way through something which might, perhaps, be the grave.Savoir ce que l’on affronte est alarmant, mais l’ignorer est terrible. L’enfant combattait le danger inconnu. Il était à tâtons dans quelque chose qui était peut-être la tombe.
He did not hesitate. He went round the rocks, avoided the crevices, guessed at the pitfalls, obeyed the twistings and turnings caused by such obstacles, yet he went on. Though unable to advance in a straight line, he walked with a firm step. Nulle hésitation. Il tournait les rochers, évitait les crevasses, devinait les pièges, subissait les méandres de l’obstacle, mais avançait. Ne pouvant aller droit, il marchait ferme.
When necessary, he drew back with energy. He knew how to tear himself in time from the horrid bird-lime of the quicksands. He shook the snow from about him. He entered the water more than once up to the knees. Directly that he left it, his wet knees were frozen by the intense cold of the night. He walked rapidly in his stiffened garments; yet he took care to keep his sailor’s coat dry and warm on his chest. He was still tormented by hunger.Il reculait au besoin avec énergie. Il savait s’arracher à temps de la glu hideuse des sables mouvants. Il secouait la neige de dessus lui. Il entra plus d’une fois dans l’eau jusqu’aux genoux. Dès qu’il sortait de l’eau, ses guenilles mouillées étaient tout de suite gelées par le froid profond de la nuit. Il marchait rapide dans ses vêlements roidis. Pourtant il avait eu l’industrie de conserver sèche et chaude sur sa poitrine sa vareuse de matelot. Il avait toujours bien faim.
The chances of the abyss are illimitable. Everything is possible in it, even salvation. The issue may be found, though it be invisible. How the child, wrapped in a smothering winding-sheet of snow, lost on a narrow elevation between two jaws of an abyss, managed to cross the isthmus is what he could not himself have explained. He had slipped, climbed, rolled, searched, walked, persevered, that is all. Such is the secret of all triumphs. At the end of somewhat less than half an hour he felt that the ground was rising. He had reached the other shore. Leaving Chesil, he had gained terra firma.Les aventures de l’abîme ne sont limitées en aucun sens; tout y est possible, même le salut. L’issue est invisible, mais trouvable. Comment l’enfant, enveloppé d’une étouffante spirale de neige, perdu sur cette levée étroite entre les deux gueules du gouffre, n’y voyant pas, parvint-il à traverser l’isthme, c’est ce que lui-même n’aurait pu dire. Il avait glissé, grimpé, roulé, cherché, marché, persévéré, voilà tout. Secret de tous les triomphes. Au bout d’un peu moins d’une heure, il sentit que le sol remontait, il arrivait à l’autre bord, il sortait du Chess-Hill, il était sur la terre ferme.
The bridge which now unites Sandford Castle with Smallmouth Sands did not then exist. It is probable that in his intelligent groping he had reascended as far as Wyke Regis, where there was then a tongue of sand, a natural road crossing East Fleet.Le pont qui relie aujourd’hui Sandford-Cas à Smallmouth-Sand n’existait pas à cette époque. Il est probable que, dans son tâtonnement intelligent, il avait remonté jusque vis-à-vis Wyke Regis, où il y avait alors une langue de sable, vraie chaussée naturelle, traversant l’East Fleet.
He was saved from the isthmus; but he found himself again face to face with the tempest, with the cold, with the night.Il était sauvé de l’isthme, mais il se retrouvait face à face avec la tempête, avec l’hiver, avec la nuit.
Before him once more lay the plain, shapeless in the density of impenetrable shadow.Devant lui se développait de nouveau la sombre perte de vue des plaines.
He examined the ground, seeking a footpath.Il regarda à terre, cherchant un sentier.
Suddenly he bent down.Tout à coup il se baissa.
He had discovered, in the snow, something which seemed to him a track.Il venait d’apercevoir dans la neige quelque chose qui lui semblait une trace.
It was indeed a track—the print of a foot. The print was cut out clearly in the whiteness of the snow, which rendered it distinctly visible. He examined it. It was a naked foot; too small for that of a man, too large for that of a child.C’était une trace en effet, la marque d’un pied. La blancheur de la neige découpait nettement l’empreinte et la faisait très visible. Il la considéra. C’était un pied nu, plus petit qu’un pied d’homme, plus grand qu’un pied d’enfant.
It was probably the foot of a woman. Probablement le pied d’une femme.
Beyond that mark was another, then another, then another. The footprints followed each other at the distance of a step, and struck across the plain to the right. They were still fresh, and slightly covered with little snow. A woman had just passed that way.Au delà de cette empreinte, il y en avait une autre, puis une autre; les empreintes se succédaient, à la distance d’un pas, et s’enfonçaient dans la plaine vers la droite. Elles étaient encore fraîches et couvertes de peu de neige. Une femme venait de passer là.
This woman was walking in the direction in which the child had seen the smoke. Celle femme avait marché et s’en était allée dans la direction même où l’enfant avait vu des fumées.
With his eyes fixed on the footprints, he set himself to follow them.L’enfant, l’œil fixé sur les empreintes, se mit à suivre ce pas.
CHAPTER II. THE EFFECT OF SNOW.II EFFET DE NEIGE
He journeyed some time along this course. Unfortunately the footprints were becoming less and less distinct. Dense and fearful was the falling of the snow. It was the time when the hooker was so distressed by the snow-storm at sea.Il chemina un certain temps sur cette piste. Par malheur les traces étaient de moins en moins nettes. La neige tombait dense et affreuse. C’était le moment où l’ourque agonisait sous cette même neige dans la haute mer.
The child, in distress like the vessel, but after another fashion, had, in the inextricable intersection of shadows which rose up before him, no resource but the footsteps in the snow, and he held to it as the thread of a labyrinth.L’enfant, en détresse comme le navire, mais autrement, n’ayant, dans l’ínextricable entre-croisement d’obscurités qui se dressaient devant lui, d’autre ressource que ce pied marqué dans la neige, s’attachait à ce pas comme au fil du dédale.
Suddenly, whether the snow had filled them up or for some other reason, the footsteps ceased. All became even, level, smooth, without a stain, without a detail. There was now nothing but a white cloth drawn over the earth and a black one over the sky.Subitement, soit que la neige eût fini par les niveler, soit pour toute autre cause, les empreintes s’effacèrent. Tout redevint plan, uni, ras, sans une tache, sans un détail. Il n’y eut plus qu’un drap blanc sur la terre et un drap noir sur le ciel.
It seemed as if the foot-passenger had flown away. C’était comme si la passante s’était envolée.
The child, in despair, bent down and searched; but in vain.L’enfant aux abois se pencha et chercha. En vain.
As he arose he had a sensation of hearing some indistinct sound, but he could not be sure of it. It resembled a voice, a breath, a shadow. It was more human than animal; more sepulchral than living. It was a sound, but the sound of a dream.Comme il se relevait, il eut la sensation de quelque chose d’indistinct qu’il entendait, mais qu’il n’était pas sûr d’entendre. Cela ressemblait à une voix, à une haleine, à de l’ombre. C’était plutôt humain que bestial, et plutôt sépulcral que vivant. C’était du bruit, mais du rêve.
He looked, but saw nothing.Il regarda et ne vit rien.
Solitude, wide, naked and livid, was before him. La large solitude nue et livide était devant lui.
He listened. That which he had thought he heard had faded away. Perhaps it had been but fancy. He still listened. All was silent.Il écouta. Ce qu’il avait cru entendre s’était dissipé. Peut-être n’avail-il rien entendu. Il écouta encore. Tout faisait silence.
There was illusion in the mist.Il y avait de l’illusion dans toute cette brume. Il se remit en marche.
He went on his way again. He walked forward at random, with nothing henceforth to guide him.En marche au hasard, n’ayant plus désormais ce pas pour le guider.
As he moved away the noise began again. This time he could doubt it no longer. It was a groan, almost a sob.Il s’éloignait à peine que le bruit recommença. Cette fois il ne pouvait douter. C’était un gémissement, presque un sanglot.
He turned. He searched the darkness of space with his eyes. He saw nothing. Il se retourna. il promena ses yeux dans l’espace nocturne. Il ne vit rien.
The sound arose once more.Le bruit s’éleva de nouveau.
If limbo could cry out, it would cry in such a tone.Si les limbes peuvent crier, c’est ainsi qu’elles crient.
Nothing so penetrating, so piercing, so feeble as the voice—for it was a voice. It arose from a soul.. There was palpitation in the murmur. Nevertheless, it seemed uttered almost unconsciously. It was an appeal of suffering, not knowing that it suffered or that it appealed. The cry—perhaps a first breath, perhaps a last sigh—was equally distant from the rattle which closes life and the wail with which it commences. It breathed, it was stifled, it wept, a gloomy supplication from the depths of night.Rien de pénétrant, de poignant et de faible comme cette voix. Car c’était une voix. Cela venait d’une âme. Il y avait de la palpitation dans ce murmure. Pourtant cela semblait presque inconscient. C’était quelque chose comme une souffrance qui appelle, mais sans savoir qu’elle est une souffrance et qu’elle fait un appel. Ce cri, premier souffle peut-être, peut-être dernier soupir, était à égale distance du râle qui clôt la vie et du vagissement qui l’ouvre. Cela respirait, cela étouffait, cela pleurait. Sombre supplication dans l’invisible.
The child fixed his attention everywhere, far, near, on high, below. There was no one. There was nothing. L’enfant fixa son attention partout, loin, près, au fond, en haut, en bas. Il n’y avait personne. Il n’y avait rien.
He listened. The voice arose again. He perceived it distinctly. The sound somewhat resembled the bleating of a lamb.Il prêta l’oreille. La voix se fit entendre encore. Il la perçût distinctement. Cette voix avait un peu du bêlement d’un agneau.
Then he was frightened, and thought of flight.Alors il eut peur et songea à fuir.
The groan again. This was the fourth time. It was strangely miserable and plaintive. One felt that after that last effort, more mechanical than voluntary, the cry would probably be extinguished. It was an expiring exclamation, instinctively appealing to the amount of aid held in suspense in space. It was some muttering of agony, addressed to a possible Providence. The child approached in the direction from whence the sound came.Le gémissement reprit. C’était la quatrième fois. Il était étrangement misérable et plaintif. On sentait qu’après ce suprême effort, plutôt machinal que voulu, ce cri allait probablement s’éteindre. C’était une réclamation expirante, instinctivement faite à la quantité de secours qui est en suspens dans l’étendue; c’était on ne sait quel bégaiement d’agonie adressé à une providence possible. L’enfant s’avança du côté d’où venait la voix.
Still he saw nothing.Il ne voyait toujours rien.
He advanced again, watchfully.Il avança encore, épiant.
The complaint continued. Inarticulate and confused as it was, it had become clear—almost vibrating. The child was near the voice; but where was it?La plainte continuait. D’inarticulée et confuse qu’elle était, elle était devenue claire et presque vibrante. L’enfant était tout près de la voix. Mais où était-elle?
He was close to a complaint. The trembling of a cry passed by his side into space. A human moan floated away into the darkness. This was what he had met. Such at least was his impression, dim as the dense mist in which he was lost.Il était près d’une plainte. Le tremblement d’une plainte dans l’espace passait à coté de lui. Un gémissement humain flottant dans l’invisible, voilà ce qu’il venait de rencontrer. Telle était du moins son impression, trouble comme le profond brouillard où il était perdu.
Whilst he hesitated between an instinct which urged him to fly and an instinct which commanded him to remain, he perceived in the snow at his feet, a few steps before him, a sort of undulation of the dimensions of a human body—a little eminence, low, long, and narrow, like the mould over a grave—a sepulchre in a white churchyard.Comme il hésitait entre un instinct qui le poussait à fuir et un instinct qui lui disait de rester, il aperçut dans la neige, à ses pieds, à quelques pas devant lui, une sorte d’ondulation de la dimension d’un corps humain, une petite éminence basse, longue et étroite, pareille au renflement d’une fosse, une ressemblance de sépulture dans un cimetière qui serait blanc.
At the same time the voice cried out. En même temps, la voix cria.
It was from beneath the undulation that it proceeded.C’est de là-dessous qu’elle sortait.
The child bent down, crouching before the undulation, and with both his hands began to clear it away.L’enfant se baissa, s’accroupit devant l’ondulation, et de ses deux mains en commença le déblaiement.
Beneath the snow which he removed a form grew under his hands; and suddenly in the hollow he had made there appeared a pale face.Il vit se modeler, sous la neige qu’il écartait, une forme, et tout à coup, sous ses mains, dans le creux qu’il avait fait, apparut une face pâle.
The cry had not proceeded from that face. Its eyes were shut, and the mouth open but full of snow.Ce n’était point cette face qui criait. Elle avait les yeux fermés et la bouche ouverte, mais pleine de neige.
It remained motionless; it stirred not under the hands of the child. The child, whose fingers were numbed with frost, shuddered when he touched its coldness. It was that of a woman. Her dishevelled hair was mingled with the snow. The woman was dead.Elle était immobile. Elle ne bougea pas sous la main de l’enfant. L’enfant, qui avait l’onglée aux doigts, tressaillit en touchant le froid de ce visage. C’était la tëte d’une femme. Les cheveux épars étaient, mêlés à la neige. Cette femme était morte.
Again the child set himself to sweep away the snow. The neck of the dead woman appeared; then her shoulders, clothed in rags. L’enfant, se remit à écarter la neige. Le cou de la morte se dégagea, puis le haut, du torse, dont on voyait la chair sous des haillons.
Suddenly he felt something move feebly under his touch. It was something small that was buried, and which stirred. The child swiftly cleared away the snow, discovering a wretched little body—thin, wan with cold, still alive, lying naked on the dead woman’s naked breast.Soudainement il sentit sous son tâtonnement un mouvement faible. C’était quelque chose de petit qui était enseveli, et qui remuait. L’enfant ôta vivement la neige, et découvrit un misérable corps d’avorton, chétif, blême de froid, encore vivant, nu sur le sein nu de la morte.
It was a little girl.C’était une petite fille.
It had been swaddled up, but in rags so scanty that in its struggles it had freed itself from its tatters. Under it its attenuated limbs, and above it its breath, had somewhat melted the snow. A nurse would have said that it was five or six months old, but perhaps it might be a year, for growth, in poverty, suffers heart-breaking reductions which sometimes even produce rachitis. When its face was exposed to the air it gave a cry, the continuation of its sobs of distress. For the mother not to have heard that sob, proved her irrevocably dead.Elle était emmaillottée, mais de pas assez de guenilles, et, en se débattant, elle était sortie de ses loques. Sous elle ses pauvres membres maigres, et son haleine au-dessus d’elle, avaient un peu fait fondre la neige. Une nourrice lui eût donné cinq ou six mois, mais elle avait un an peut-être, car la croissance dans la misère subit de navrantes réductions qui vont parfois jusqu’au rachitisme. Quand son visage fut à l’air, elle poussa un cri, continuation de son sanglot de détresse. Pour que la mère n’eût pas entendu ce sanglot, il fallait qu’elle fût bien profondément morte.
The child took the infant in his arms. L’enfant prit la petite dans ses bras.
The stiffened body of the mother was a fearful sight; a spectral light proceeded from her face. The mouth, apart and without breath, seemed to form in the indistinct language of shadows her answer to the questions put to the dead by the invisible. The ghastly reflection of the icy plains was on that countenance. There was the youthful forehead under the brown hair, the almost indignant knitting of the eyebrows, the pinched nostrils, the closed eyelids, the lashes glued together by the rime, and from the corners of the eyes to the corners of the mouth a deep channel of tears. The snow lighted up the corpse. Winter and the tomb are not adverse. The corpse is the icicle of man. The nakedness of her breasts was pathetic. They had fulfilled their purpose.On them was a sublime blight of the life infused into one being by another from whom life has fled, and maternal majesty was there instead of virginal purity. At the point of one of the nipples was a white pearl. It was a drop of milk frozen.La mère roidie était sinistre. Une irradiation spectrale sortait de cette figure. La bouche béante et sans souffle semblait commencer dans la langue indistincte de l’ombre la réponse aux questions faites aux morts dans l’invisible. La réverbération blafarde des plaines glacées était sur ce visage. On voyait le front, jeune sous les cheveux bruns, le froncement presque indigné des sourcils, les narines serrées, les paupières closes, les cils collés par le givre, et, du coin des yeux au coin des lèvres, le pli profond des pleurs. La neige éclairait la morte. L’hiver et le tombeau ne se nuisent pas. Le cadavre est le glaçon de l’homme. La nudité des seins était pathétique. Ils avaient servi; ils avaient la sublime flétrissure de la vie donnée par l’être à qui la vie manque, et la majesté maternelle y remplaçait la pureté virginale. A la pointe d’une des mamelles il y avait une perle blanche. C’était une goutte de lait, gelée.
Let us explain at once. On the plains over which the deserted boy was passing in his turn a beggar woman, nursing her infant and searching for a refuge, had lost her way a few hours before. Benumbed with cold she had sunk under the tempest, and could not rise again. The falling snow had covered her. So long as she was able she had clasped her little girl to her bosom, and thus died.Disons-le tout de suite, dans ces plaines où le garçon perdu passait à son tour, une mendiante allaitant son nourrisson, et cherchant elle aussi un gîte, s’était, il y avait peu d’heures, égarée. Transie, elle était tombée sous la tempête, et n’avait pu se relever. L’avalanche l’avait couverte. Elle avait, le plus qu’elle avait pu, serré sa fille contre elle, et elle avait expiré.
The infant had tried to suck the marble breast. La petite fille avait essayé de téter ce marbre.
Blind trust, inspired by nature, for it seems that it is possible for a woman to suckle her child even after her last sigh.Sombre confiance voulue par la nature, car il semble que le dernier allaitement soit possible à une mère, même après le dernier soupir.
But the lips of the infant had been unable to find the breast, where the drop of milk, stolen by death, had frozen, whilst under the snow the child, more accustomed to the cradle than the tomb, had wailed.Mais la bouche de l’enfant n’avait pu trouver le sein, où la goutte de lait, volée par la mort, s’était glacée, et, sous la neige, le nourrisson, plus accoutumé au berceau qu’à la tombe, avait crié.
The deserted child had heard the cry of the dying child.Le petit abandonné avait entendu la petite agonisante.
He disinterred it.Il l’avait déterrée.
He took it in his arms.Il l’avait prise dans ses bras.
When she felt herself in his arms she ceased crying. The faces of the two children touched each other, and the purple lips of the infant sought the cheek of the boy, as it had been a breast. Quand la petite se sentit dans des bras, elle cessa de crier. Les deux visages des deux enfants se touchèrent, et les lèvres violettes du nourrisson se rapprochèrent de la joue du garçon comme d’une mamelle.
The little girl had nearly reached the moment when the congealed blood stops the action of the heart. Her mother had touched her with the chill of her own death—a corpse communicates death; its numbness is infectious. Her feet, hands, arms, knees, seemed paralyzed by cold. The boy felt the terrible chill. La petite fille était presque au moment où le sang coagulé va arrêter le cœur. Sa mère lui avait déjà donné quelque chose de sa mort; le cadavre se communique, c’est un refroidissement qui se gagne. La petite avait les pieds, les mains, les bras, les genoux, comme paralysés par la glace. Le garçon sentit ce froid terrible.
He had on him a garment dry and warm—his pilot jacket. He placed the infant on the breast of the corpse, took off his jacket, wrapped the infant in it, took it up again in his arms, and now, almost naked, under the blast of the north wind which covered him with eddies of snow-flakes, carrying the infant, he pursued his journey.Il avait sur lui un vêtement sec et chaud, sa vareuse. Il posa le nourrisson sur la poitrine de la morte, ôta sa vareuse, en enveloppa la petite fille, ressaisit l’enfant, et, presque nu maintenant sous les bouffées de neige que soufflait la bise, emportant la petite dans ses bras, il se remit en route.
The little one having succeeded in finding the boy’s cheek, again applied her lips to it, and, soothed by the warmth, she slept. First kiss of those two souls in the darkness.La petite ayant réussi à retrouver la joue du garçon, y appuya sa bouche, et, réchauffée, s’endormit. Premicr baiser de ces deux âmes dans les ténèbres.
The mother lay there, her back to the snow, her face to the night; but perhaps at the moment when the little boy stripped himself to clothe the little girl, the mother saw him from the depths of infinity.La mère demeura gisante, le dos sur la neige, la face vers la nuit. Mais au moment où le petit garçon se dépouilla pour vêtir la petite fille, peut-être, du fond de l’infini où elle était, la mère le vit-elle.
CHAPTER III. A BURDEN MAKES A ROUGH ROAD ROUGHER.III TOUTE VOIE DOULOUREUSE SE COMPLIQUE D’UN FARDEAU
It was little more than four hours since the hooker had sailed from the creek of Portland, leaving the boy on the shore. During the long hours since he had been deserted, and had been journeying onwards, he had met but three persons of that human society into which he was, perchance, about to enter—a man, the man on the hill; a woman, the woman in the snow; and the little girl whom he was carrying in his arms.Il y avait un peu plus de quatre heures que l’ourque s’était éloignée de la crique de Portland, laissant sur le rivage ce garçon. Depuis ces longues heures qu’il était abandonné, et qu’il marchait devant lui, il n’avait encore fait, dans celle société humaine où peut-être il allait entrer, que trois rencontres, un homme, une femme et un enfant. Un homme, cet homme sur la colline; une femme, cette femme dans la neige; un enfant, cette petite fille qu’il avait dans les bras.
He was exhausted by fatigue and hunger, yet advanced more resolutely than ever, with less strength and an added burden.Il était exténué de fatigue et de faim. Il avançait plus résolument que jamais, avec de la force de moins et un fardeau de plus.
He was now almost naked. The few rags which remained to him, hardened by the frost, were sharp as glass, and cut his skin. He became colder, but the infant was warmer. That which he lost was not thrown away, but was gained by her. He found out that the poor infant enjoyed the comfort which was to her the renewal of life. He continued to advance.Il était maintenant à peu près sans vêtements. Le peu de haillons qui lui restaient, durcis par le givre, étaient coupants comme du verre et lui écorchaient la peau. Il se refroidissait, mais l’autre enfant se réchauffait. Ce qu’il perdait n’était pas perdu, elle le regagnait. Il constatait cette chaleur qui était pour la pauvre petite une reprise de vie. Il continuait d’avancer.
From time to time, still holding her securely, he bent down, and taking a handful of snow he rubbed his feet with it, to prevent their being frost-bitten. De temps en temps, tout en la soutenant bien, il se baissait et d’une main prenait de la neige à poignée, et en frottait ses pieds, pour les empêcher de geler.
At other times, his throat feeling as if it were on fire, he put a little snow in his mouth and sucked it; this for a moment assuaged his thirst, but changed it into fever—a relief which was an aggravation.Dans d’autres moments, ayant la gorge en feu, il se mettait dans la bouche un peu de cette neige et la suçait, ce qui trompait une minute sa soif, mais la changeait en fièvre. Soulagement qui était une aggravation.
The storm had become shapeless from its violence. Deluges of snow are possible. This was one. The paroxysm scourged the shore at the same time that it uptore the depths of ocean. This was, perhaps, the moment when the distracted hooker was going to pieces in the battle of the breakers.La tourmente était devenue informe à force de violence; les déluges de neige sont possibles; c’en était un. Ce paroxysme maltraitait le littoral en même temps qu’il bouleversait l’océan. C’était probablement l’instant où l’ourque éperdue se disloquait dans la bataille des écueils.
He travelled under this north wind, still towards the east, over wide surfaces of snow. He knew not how the hours had passed. For a long time he had ceased to see the smoke. Such indications are soon effaced in the night; besides, it was past the hour when fires are put out. Or he had, perhaps, made a mistake, and it was possible that neither town nor village existed in the direction in which he was travelling. Il traversa sous cette bise, marchant toujours vers l’est, de larges surfaces de neige. Il ne savait quelle heure il était. Depuis longtemps il ne voyait plus de fumées. Ces indications dans la nuit sont vite effacées; d’ailleurs, il était plus que l’heure où les feux sont éteints; enfin peut-être s’était-il trompé, et il était possible qu’il n’y eût point de ville ni de village du côté où il allait.
Doubting, he yet persevered.Dans le doute, il persévérait.
Two or three times the little infant cried. Then he adopted in his gait a rocking movement, and the child was soothed and silenced. She ended by falling into a sound sleep. Shivering himself, he felt her warm. Deux ou trois fois la petite cria. Alors il imprimait à son allure un mouvement de bercement; elle s’apaisait et se taisait. Elle finit par se bien endormir, et d’un bon sommeil. Il la sentait chaude, tout en grelottant.
He frequently tightened the folds of the jacket round the babe’s neck, so that the frost should not get in through any opening, and that no melted snow should drop between the garment and the child.Il resserrait fréquemment les plis de la vareuse autour du cou de la petite, afin que le givre ne s’introduisît pas par quelque ouverture et qu’il n’y eût aucune fuite de neige fondue entre le vêtement et l’enfant.
The plain was unequal. In the declivities into which it sloped the snow, driven by the wind into the dips of the ground, was so deep, in comparison with a child so small, that it almost engulfed him, and he had to struggle through it half buried. He walked on, working away the snow with his knees.La plaine avait des ondulations. Aux déclivités où elle s’abaissait, la neige, amassée par le vent dans les plis de terrain, était si haute pour lui petit qu’il y enfonçait presque tout entier, et il fallait marcher à demi enterré. Il marchait, poussant la neige des genoux.
Having cleared the ravine, he reached the high lands swept by the winds, where the snow lay thin. Then he found the surface a sheet of ice. Le ravin franchi, il parvenait à des plateaux balayés par la bise où la neige était mince. Là il trouvait le verglas.
The little girl’s lukewarm breath, playing on his face, warmed it for a moment, then lingered, and froze in his hair, stiffening it into icicles.L’haleine tiède de la petite fille effleurait sa joue, le réchauffait un moment, et s’arrêtait et se gelait dans ses cheveux, où elle faisait un glaçon.
He felt the approach of another danger. He could not afford to fall. He knew that if he did so he should never rise again. He was overcome by fatigue, and the weight of the darkness would, as with the dead woman, have held him to the ground, and the ice glued him alive to the earth. He had tripped upon the slopes of precipices, and had recovered himself; he had stumbled into holes, and had got out again. Thenceforward the slightest fall would be death; a false step opened for him a tomb. He must not slip. He had not strength to rise even to his knees. Il se rendait compte d’une complication redoutable, il ne pouvait plus tomber. Il sentait qu’il ne se relèverait pas. Il était brisé de fatigue, et le plomb de l’ombre l’eût, comme la femme expirée, appliqué sur le sol, et la glace l’eût soudé vivant à la terre. Il avait dévalé sur des pentes de précipices, et s’en était tiré; il avait trébuché dans des trous, et en était sorti; désormais une simple chute, c’était la mort. Un faux pas ouvrait la tombe. Il ne fallait pas glisser. Il n’aurait plus la force méme de se remettre sur ses genoux.
Now everything was slippery; everywhere there was rime and frozen snow.Or le glissement était partout autour de lui; tout était givre et neige durcie.
The little creature whom he carried made his progress fearfully difficult. She was not only a burden, which his weariness and exhaustion made excessive, but was also an embarrassment. She occupied both his arms, and to him who walks over ice both arms are a natural and necessary balancing power.La petite qu’il portait lui faisait la marche affreusement difficile; non seulement c’était un poids, excessif pour sa lassitude et son épuisement, mais c’était un embarras. Elle lui occupait les deux bras, et, à qui chemine sur le verglas, les deux bras sont un balancier naturel et nécessaire.
He was obliged to do without this balance.Il fallait se passer de ce balancier.
He did without it and advanced, bending under his burden, not knowing what would become of him.Il s’en passait, et marchait, ne sachant que devenir sous son fardeau.
This little infant was the drop causing the cup of distress to overflow.Cette petite était la goutte qui faisait déborder le vase de détresse.
He advanced, reeling at every step, as if on a spring board, and accomplishing, without spectators, miracles of equilibrium. Let us repeat that he was, perhaps, followed on this path of pain by eyes unsleeping in the distances of the shadows—the eyes of the mother and the eyes of God. Il avançait, oscillant à chaque pas, comme sur un tremplin, et accomplissant, pour aucun regard, des miracles d’équilibre. Peut-être pourtant, redisons-le, était-il suivi en cette voie douloureuse par des yeux ouverts dans les lointains de l’ombre, l’œil de la mère et l’œil de Dieu.
He staggered, slipped, recovered himself, took care of the infant, and, gathering the jacket about her, he covered up her head; staggered again, advanced, slipped, then drew himself up. The cowardly wind drove against him. Il chancelait, chavirait, se raffermissait, avait soin de l’enfant, lui remettait du vêtement sur elle, lui couvrait la tête, chavirait encore, avançait toujours, glissait, puis se redressait. Le vent avait la lâcheté de le pousser.
Apparently, he made much more way than was necessary. He was, to all appearance, on the plains where Bincleaves Farm was afterwards established, between what are now called Spring Gardens and the Parsonage House. Homesteads and cottages occupy the place of waste lands. Sometimes less than a century separates a steppe from a city.Il faisait vraisemblablement beaucoup plus de chemin qu’il ne fallait. Il était selon toute apparence dans ces plaines où s’est établie plus tard la Bincleaves Farm, entre ce qu’on nomme maintenant Spring Gardens et Personage House. Métairies et cottages à présent, friches alors. Souvent moins d’un siècle sépare un steppe d’une ville.
Suddenly, a lull having occurred in the icy blast which was blinding him, he perceived, at a short distance in front of him, a cluster of gables and of chimneys shown in relief by the snow. The reverse of a silhouette—a city painted in white on a black horizon, something like what we call nowadays a negative proof. Subitement, une interruption s’étant faite dans la bourrasque glaciale qui l’aveuglait, il aperçut à peu de distance devant lui un groupe de pignons et de cheminées mis en relief par la neige, le contraire d’une silhouette, une ville dessinée en blanc sur l’horizon noir, quelque chose comme ce qu’on appellerait aujourd’hui une épreuve négative.
Roofs—dwellings—shelter! He had arrived somewhere at last. He felt the ineffable encouragement of hope. The watch of a ship which has wandered from her course feels some such emotion when he cries, “Land ho!”
He hurried his steps.
Des toits, des demeures, un gîte! Il était donc quelque part! Il sentit l’ineffable encouragement de l’espérance. La vigie d’un navire égaré criant terre! a de ces émotions. Il pressa le pas.
At length, then, he was near mankind. He would soon be amidst living creatures. There was no longer anything to fear. There glowed within him that sudden warmth—security; that out of which he was emerging was over; thenceforward there would no longer be night, nor winter, nor tempest. It seemed to him that he had left all evil chances behind him. The infant was no longer a burden. He almost ran.Il touchait donc enfin à des hommes. Il allait donc arriver à des vivants. Plus rien à craindre. Il avait en lui cette chaleur subite, la sécurité. Ce dont il sortait était fini. Il n’y aurait plus de nuit désormais, ni d’hiver, ni de tempête. Il lui semblait que tout ce qu’il y a de possible dans le mal était maintenant derrière lui. La petite n’était plus un poids. Il courait presque.
His eyes were fixed on the roofs. There was life there. He never took his eyes off them. A dead man might gaze thus on what might appear through the half-opened lid of his sepulchre. There were the chimneys of which he had seen the smoke. No smoke arose from them now.Son œil était fixé sur ces toits. La vie était là. Il ne les quittait pas du regard. Un mort regarderait ainsi ce qui lui apparaîtrait par l’entre-bâillement d’un couvercle de tombe. C’étaient les cheminées dont il avait vu les fumées. Aucune fumée n’en sortait.
He was not long before he reached the houses. He came to the outskirts of a town—an open street. At that period bars to streets were falling into disuse.Il eut vite fait d’atteindre les habitations. Il parvint à un faubourg de ville qui était une rue ouverte. A celle époque le barrage des rues la nuit tombait en désuétude.
The street began by two houses. In those two houses neither candle nor lamp was to be seen; nor in the whole street; nor in the whole town, so far as eye could reach. La rue commençait par deux maisons. Dans ces deux maisons on n’apercevait aucune chandelle ni aucune lampe, non plus que dans toute la rue, ni dans toute la ville, aussi loin que la vue pouvait s’étendre.
The house to the right was a roof rather than a house; nothing could be more mean. The walls were of mud, the roof was of straw, and there was more thatch than wall. A large nettle, springing from the bottom of the wall, reached the roof. The hovel had but one door, which was like that of a dog-kennel; and a window, which was but a hole. All was shut up. At the side an inhabited pig-sty told that the house was also inhabited.La maison de droite étaie plutôt un toit qu’une maison; rien de plus chétif; la muraille était de torchis et le toit de paille; il y avait plus de chaume que de mur. Une grande ortie née au pied du mur touchait au bord du toit. Cette masure n’avait qu’une porte qui semblait une chatière et qu’une fenêtre qui était une lucarne. Le tout fermé. A côté une soue à porcs habitée indiquait que la chaumière était habitée aussi.
The house on the left was large, high, built entirely of stone, with a slated roof. It was also closed. It was the rich man’s home, opposite to that of the pauper.La maison de gauche était large, haute, toute en pierre, avec toit d’ardoises. Fermée aussi. C’était Chez le Riche vis-à-vis de Chez le Pauvre.
The boy did not hesitate.Le garçon n’hésita pas.
He approached the great mansion.Il alla à la grande maison.
The double folding-door of massive oak, studded with large nails, was of the kind that leads one to expect that behind it there is a stout armoury of bolts and locks. An iron knocker was attached to it. La porte à deux battants, massif damier de chêne à gros clous, était de celles derrière lesquelles on devine une robuste armature de barres et de serrures; un marteau de fer y pendait.
He raised the knocker with some difficulty, for his benumbed hands were stumps rather than hands. He knocked once.Il souleva le marteau, avec quelque peine, car ses mains engourdies étaient plutôt des moignons que des mains. il frappa un coup.
No answer.On ne répondit pas.
He struck again, and two knocks.Il frappa une seconde fois, et deux coups.
No movement was heard in the house.Aucun mouvement ne se fit dans la maison.
He knocked a third time.Il frappa une troisième fois. Rien.
There was no sound. He saw that they were all asleep, and did not care to get up.Il comprit qu’on dormait, ou qu’on ne se souciait pas de se lever.
Then he turned to the hovel. He picked up a pebble from the snow, and knocked against the low door.Alors il se tourna vers la maison pauvre. Il prit à terre, dans la neige, un galet et heurta à la porte basse.
There was no answer.On ne répondit pas.
He raised himself on tiptoe, and knocked with his pebble against the pane too softly to break the glass, but loud enough to be heard.Il se haussa sur la pointe des pieds, et cogna de son caillou à la lucarne, assez doucement pour ne point casser la vitre, assez fort pour être entendu.
No voice was heard; no step moved; no candle was lighted.Aucune voix ne s’éleva, aucun pas ne remua, aucune chandelle ne s’alluma.

He saw that there, as well, they did not care to awake.
Il pensa que là aussi on ne voulait point se réveiller.
The house of stone and the thatched hovel were equally deaf to the wretched.Il y avait dans l’hôtel de pierre et dans le logis de chaume la même surdité aux misérables.
The boy decided on pushing on further, and penetrating the strait of houses which stretched away in front of him, so dark that it seemed more like a gulf between two cliffs than the entrance to a town.Le garçon se décida à pousser plus loin, et pénétra dans le détroit de maisons qui se prolongeait devant lui, si obscur qu’on eût plutôt dit l’écart de deux falaises que l’entrée d’une ville.
CHAPTER IV. ANOTHER FORM OF DESERT.IV AUTRE FORME DU DÉSERT
It was Weymouth which he had just entered. C’est dans le Weymouth qu’il venait d’entrer.
Weymouth then was not the respectable and fine Weymouth of to-day. Ancient Weymouth did not present, like the present one, an irreproachable rectangular quay, with an inn and a statue in honour of George III. This resulted from the fact that George III. had not yet been born. For the same reason they had not yet designed on the slope of the green hill towards the east, fashioned flat on the soil by cutting away the turf and leaving the bare chalk to the view, the white horse, an acre long, bearing the king upon his back, and always turning, in honour of George III., his tail to the city. These honours, however, were deserved. George III., having lost in his old age the intellect he had never possessed in his youth, was not responsible for the calamities of his reign. He was an innocent. Why not erect statues to him?Le Weymouth d’alors n’était pas l’honorable et superbe Weymouth d’aujourd’hui. Cet ancien Weymouth n’avait pas, comme le Weymouth actuel, un irréprochable quai rectiligne avec une statue et une auberge en l’honneur de Georges III. Cela tenait à ce que Georges III n’était pas né. Par la même raison, on n’avait point encore, au penchant de la verte colline de l’est, dessiné, à plat sur le sol, au moyen du gazon scalpé et de la craie mise à nu, ce cheval blanc, d’un arpent de long, le White Horse, portant un roi sur son dos, et tournant, toujours en l’honneur de Georges III, sa queue vers la ville. Ces honneurs, du reste, sont mérités; Georges III, ayant perdu dans sa vieillesse l’esprit qu’il n’avait jamais eu dans sa jeunesse, n’est point responsable des calamités de son règne. C’était un innocent. Pourquoi pas des statues?
Weymouth, a hundred and eighty years ago, was about as symmetrical as a game of spillikins in confusion. In legends it is said that Astaroth travelled over the world, carrying on her back a wallet which contained everything, even good women in their houses. A pell-mell of sheds thrown from her devil’s bag would give an idea of that irregular Weymouth—the good women in the sheds included. The Music Hall remains as a specimen of those buildings. A confusion of wooden dens, carved and eaten by worms (which carve in another fashion)—shapeless, overhanging buildings, some with pillars, leaning one against the other for support against the sea wind, and leaving between them awkward spaces of narrow and winding channels, lanes, and passages, often flooded by the equinoctial tides; a heap of old grandmother houses, crowded round a grandfather church—such was Weymouth; a sort of old Norman village thrown up on the coast of England.Le Weymouth d’il y a cent quatrevingts ans était à peu près aussi symétrique qu’un jeu d’onchets brouillé. L’Astaroth des légendes se promenait quelquefois sur la terre portant derrière son dos une besace dans laquelle il y avait de tout, même des bonnes femmes dans leurs maisons. Un pêle-mêle de baraques tombé de ce sac du diable donnerait l’idée de ce Weymouth incorrect. Plus, dans les baraques, les bonnes femmes. Il reste comme spécimen de ces logis la maison des Musiciens. Une confusion de tanières de bois sculptées, et vermoulues, ce qui est une autre sculpture, d’informes bâtisses branlantes à surplombs, quelques-unes à piliers, s’appuyant les unes sur les autres pour ne pas tomber au vent de mer, et laissant entre elles les espacements exigus d’une voirie tortue et maladroite, ruelles et carrefours souvent inondés par les marées d’équinoxe, un amoncellement de vieilles maisons grand-mères groupées autour d’une église aïeule, c’était là Weymouth. Weymouth était une sorte d’antique village normand échoué sur la côte d’Angleterre.
The traveller who entered the tavern, now replaced by the hotel, instead of paying royally his twenty-five francs for a fried sole and a bottle of wine, had to suffer the humiliation of eating a pennyworth of soup made of fish—which soup, by-the-bye, was very good. Wretched fare!Le voyageur, s’il entrait à la taverne remplacée aujourd’hui par l’hôtel, au lieu de payer royalement une sole frite et une bouteille de vin vingt-cinq francs, avait l’humiliation de manger pour deux sous une soupe au poisson, fort bonne d’ailleurs. C’était misérable.
The deserted child, carrying the foundling, passed through the first street, then the second, then the third. He raised his eyes, seeking in the higher stories and in the roofs a lighted window-pane; but all were closed and dark. At intervals he knocked at the doors. No one answered. Nothing makes the heart so like a stone as being warm between sheets. The noise and the shaking had at length awakened the infant. He knew this because he felt her suck his cheek. She did not cry, believing him her mother.L’enfant perdu portant l’enfant trouvé suivit la première rue, puis la seconde, puis une troisième. Il levait les yeux cherchant aux étages et sur les toits une vitre éclairée, mais tout était clos et éteint. Par intervalles, il cognait aux portes. Personne ne répondait. Rien ne fait le cœur de pierre comme d’être chaudement entre deux draps. Ce bruit et ces secousses avaient fini par réveiller la petite. Il s’en apercevait parce qu’il se sentait téter la joue. Elle ne criait pas, croyant à une mère.
He was about to turn and wander long, perhaps, in the intersections of the Scrambridge lanes, where there were then more cultivated plots than dwellings, more thorn hedges than houses; but fortunately he struck into a passage which exists to this day near Trinity schools. This passage led him to a water-brink, where there was a roughly built quay with a parapet, and to the right he made out a bridge.Il risquait de tourner et de rôder longtemps peut-être dans les intersections des ruelles de Scrambridge où il y avait alors plus de sculptures que de maisons, et plus de haies d’épines que de logis, mais il s’engagea à propos dans un couloir qui existe encore aujourd’hui près de Trinity Schools. Ce couloir le mena sur une plage qui était un rudiment de quai avec parapet, et à sa droite il distingua un pont.
It was the bridge over the Wey, connecting Weymouth with Melcombe Regis, and under the arches of which the Backwater joins the harbour.Ce pont était le pont de la Wey qui relie Weymouth à Melcomb-Regis, et sous les arches duquel le Harbour communique avec la Back Water.
Weymouth, a hamlet, was then the suburb of Melcombe Regis, a city and port. Now Melcombe Regis is a parish of Weymouth. The village has absorbed the city. It was the bridge which did the work. Bridges are strange vehicles of suction, which inhale the population, and sometimes swell one river-bank at the expense of its opposite neighbour.Weymouth, hameau, était alors le faubourg de Melcomb-Regis, cité et port; aujourd’hui Melcomb-Regis est une paroisse de Weymouth. Le village a absorbé la ville. C’est par ce pont que s’est fait ce travail. Les ponts sont de singuliers appareils de succion qui aspirent la population et font quelquefois grossir un quartier riverain aux dépens de son vis-à-vis.
The boy went to the bridge, which at that period was a covered timber structure. He crossed it.Le garçon alla à ce pont, qui à cette époque était une passerelle de charpente couverte. Il traversa cette passerelle.
Thanks to its roofing, there was no snow on the planks. His bare feet had a moment’s comfort as they crossed them. Grâce au toit du pont, il n’y avait pas de neige sur le tablier. Ses pieds nus eurent un moment de bien-être en marchant sur ces planches sèches
Having passed over the bridge, he was in Melcombe Regis.Le pont franchi, il se trouva dans Melcomb-Regis.
There were fewer wooden houses than stone ones there. He was no longer in the village; he was in the city. The bridge opened on a rather fine street called St. Thomas’s Street. He entered it. Here and there were high carved gables and shop-fronts. He set to knocking at the doors again: he had no strength left to call or shout.Il y avait là moins de maisons de bois que de maisons de pierre. Ce n’était plus le bourg, c’était la cité. Le pont débouchait sur une assez belle rue qui était Saint-Thomas street. Il y entra. La rue offrait de hauts pignons taillés, et ça et là des devantures de boutiques. Il se remit à frapper aux portes. Il ne lui restait pas assez de force pour appeler et crier.
At Melcombe Regis, as at Weymouth, no one was stirring. The doors were all carefully double-locked, The windows were covered by their shutters, as the eyes by their lids. Every precaution had been taken to avoid being roused by disagreeable surprises.A Melcomb-Regis comme à Weymouth, personne ne bougeait. Un bon double tour avait été donné aux serrures. Les fenêtres étaient recouvertes de leurs volets comme les yeux de leurs paupières. Toutes les précautions étaient prises contre le réveil, soubresaut désagréable.
The little wanderer was suffering the indefinable depression made by a sleeping town. Its silence, as of a paralyzed ants’ nest, makes the head swim. All its lethargies mingle their nightmares, its slumbers are a crowd, and from its human bodies lying prone there arises a vapour of dreams. Sleep has gloomy associates beyond this life: the decomposed thoughts of the sleepers float above them in a mist which is both of death and of life, and combine with the possible, which has also, perhaps, the power of thought, as it floats in space. Hence arise entanglements. Dreams, those clouds, interpose their folds and their transparencies over that star, the mind. Above those closed eyelids, where vision has taken the place of sight, a sepulchral disintegration of outlines and appearances dilates itself into impalpability. Mysterious, diffused existences amalgamate themselves with life on that border of death, which sleep is. Those larvæ and souls mingle in the air. Even he who sleeps not feels a medium press upon him full of sinister life. The surrounding chimera, in which he suspects a reality, impedes him. The waking man, wending his way amidst the sleep phantoms of others, unconsciously pushes back passing shadows, has, or imagines that he has, a vague fear of adverse contact with the invisible, and feels at every moment the obscure pressure of a hostile encounter which immediately dissolves. There is something of the effect of a forest in the nocturnal diffusion of dreams.Le petit errant subissait la pression indéfinissable de la ville endormie. Ces silences de fourmilière paralysée dégagent du vertige. Toutes ces léthargies mêlent leurs cauchemars, ces sommeils sont une foule, et il sort de ces corps humains gisants une fumée de songes. Le sommeil a de sombres voisinages hors de la vie; la pensée décomposée des endormis flotte au-dessus d’eux, vapeur vivante et morte, et se combine avec le possible qui pense probablement aussi dans l’espace. De là des enchevêtrements. Le rêve, ce nuage, superpose ses épaisseurs et ses transparences à cette étoile, l’esprit. Au-dessus de ces paupières fermées où la vision a remplacé la vue, une désagrégation sépulcrale de silhouettes et d’aspects se dilate dans l’impalpable. Une dispersion d’existences mystérieuses s’amalgame à notre vie par ce bord de la mort qui est le sommeil. Ces entrelacements de larves et d’âmes sont dans l’air. Celui même qui ne dort pas sent peser sur lui ce milieu plein d’une vie sinistre. La chimère ambiante, réalité devinée, le gêne. L’homme éveillé qui chemine à travers les fantômes du sommeil des autres refoule confusément des formes passantes, a, ou croit avoir, la vague horreur des contacts hostiles de l’invisible, et sent à chaque instant la poussée obscure d’une rencontre inexprimable qui s’évanouit. Il y a des effets de forêt dans cette marche au milieu de la diffusion nocturne des songes.
This is what is called being afraid without reason.C’est ce qu’on appelle avoir peur sans savoir pourquoi.
What a man feels a child feels still more.Ce qu’un homme éprouve, un enfant l’éprouve plus encore.
The uneasiness of nocturnal fear, increased by the spectral houses, increased the weight of the sad burden under which he was struggling.Ce malaise de l’effroi nocturne, amplifié par ces maisons spectres, s’ajoutait à tout cet ensemble lugubre sous lequel il luttait.
He entered Conycar Lane, and perceived at the end of that passage the Backwater, which he took for the ocean. He no longer knew in what direction the sea lay. He retraced his steps, struck to the left by Maiden Street, and returned as far as St. Alban’s Row.Il entra dans Conyear Lane, et aperçut au bout de cette ruelle la Bach Water qu’il prit pour l’Océan; il ne savait plus de quel coté était la mer; il revint sur ses pas, tourna à gauche par Maiden street, et rétrograda jusqu’à Saint-Albans row.
There, by chance and without selection, he knocked violently at any house that he happened to pass. His blows, on which he was expending his last energies, were jerky and without aim; now ceasing altogether for a time, now renewed as if in irritation. It was the violence of his fever striking against the doors.Là, au hasard, et sans choisir, et aux premières maisons venues, il heurta violemment. Ces coups, où il épuisait sa dernière énergie, étaient désordonnés et saccadés, avec des intermittences et des reprises presque irritées. C’était le battement de sa fièvre frappant aux portes.
One voice answered.Une voix répondit.
That of Time.Celle de l’heure.
Three o’clock tolled slowly behind him from the old belfry of St. Nicholas.Trois heures du matin sonnèrent lentement derrière lui au vieux clocher de Saint-Nicolas.
Then all sank into silence again.Puis tout retomha dans le silence.
That no inhabitant should have opened a lattice may appear surprising. Nevertheless that silence is in a great measure to be explained. We must remember that in January 1790 they were just over a somewhat severe outbreak of the plague in London, and that the fear of receiving sick vagabonds caused a diminution of hospitality everywhere. People would not even open their windows for fear of inhaling the poison.Que pas un habitant n’eût même entr’ouvert une lucarne, cela peut sembler surprenant. Pourtant dans une certaine mesure ce silence s’explique. Il faut dire qu’en janvier 1690 on était au lendemain d’une assez forte peste qu’il y avait eu à Londres, et que la crainte de recevoir des vagabonds malades produisait partout une certaine diminution d’hospitalité. On n’entre-baillait pas même sa fenêtre de peur de respirer leur miasme.
The child felt the coldness of men more terribly than the coldness of night. The coldness of men is intentional. He felt a tightening on his sinking heart which he had not known on the open plains. Now he had entered into the midst of life, and remained alone. This was the summit of misery. The pitiless desert he had understood; the unrelenting town was too much to bear.L’enfant sentit le froid des hommes plus terrible que le froid de la nuit. C’est un froid qui veut. Il eut ce serrement du cœur découragé qu’il n’avait pas eu dans les solitudes. Maintenant il était rentré dans la vie de tous, et il restait seul. Comble d’angoisse. Le désert impitoyable, il l’avait compris; mais la ville inexorable, c’était trop.
The hour, the strokes of which he had just counted, had been another blow. Nothing is so freezing in certain situations as the voice of the hour. It is a declaration of indifference. It is Eternity saying, “What does it matter to me?”L’heure, dont il venait de compter les coups, avait été un accablement de plus. Rien de glaçant en de certains cas comme l’heure qui sonne. C’est une déclaration d’indifférence. C’est l’éternité disant: que m’importe!
He stopped, and it is not certain that, in that miserable minute, he did not ask himself whether it would not be easier to lie down there and die. However, the little infant leaned her head against his shoulder, and fell asleep again.Il s’arrêta. Et il n’est pas certain qu’en celle minute lamentable, il ne se soit pas demandé s’il ne serait pas plus simple de se coucher là et de mourir. Cependant la petite fille posa la tête sur son épaule, et se rendormit. Cette confiance obscure le remit en marche.
This blind confidence set him onwards again. He whom all supports were failing felt that he was himself a basis of support. Irresistible summons of duty!Lui qui n’avait autour de lui que de l’écroulement, il sentit qu’il était point d’appui. Profonde sommation du devoir.
Neither such ideas nor such a situation belonged to his age. It is probable that he did not understand them. It was a matter of instinct. He did what he chanced to do.Ni ces idées ni cette situation n’étaient de son âge. Il est probable qu’il ne les comprenait pas. Il agissait d’instinct. Il faisait ce qu’il faisait.
He set out again in the direction of Johnstone Row.Il marcha dans la direction de Johnstone row.
But now he no longer walked; he dragged himself along. Mais il ne marchait plus, il se traînait.
He left St. Mary’s Street to the left, made zigzags through lanes, and at the end of a winding passage found himself in a rather wide open space. It was a piece of waste land not built upon—probably the spot where Chesterfield Place now stands. The houses ended there. He perceived the sea to the right, and scarcely anything more of the town to his left.Il laissa à sa gauche Sainte-Mary street, fit des zigzags dans les ruelles, et, au débouché d’un boyau sinueux entre deux masures, se trouva dans un assez large espace libre. C’était un terrain vague, point bâti, probablement l’endroit où est aujourd’hui Chesterfield place. Les maisons finissaient là. Il apercevait à sa droite la mer, et presque plus rien de la ville à sa gauche.
What was to become of him? Here was the country again. To the east great inclined planes of snow marked out the wide slopes of Radipole. Should he continue this journey? Should he advance and re-enter the solitudes? Should he return and re-enter the streets? What was he to do between those two silences—the mute plain and the deaf city? Which of the two refusals should he choose?Que devenir? La campagne recommençait. A l’est, de grands plans inclinés de neige marquaient les larges versants de Radipole. Allait-il continuer ce voyage? allait-il avancer et rentrer dans les solitudes? allait-il reculer et rentrer dans les rues? que faire entre ces deux silences, la plaine muette et la ville sourde? lequel choisir de ces refus?
There is the anchor of mercy. There is also the look of piteousness. It was that look which the poor little despairing wanderer threw around him.Il y a l’ancre de miséricorde, il y a aussi le regard de miséricorde. C’est ce regard que le pauvre petit désespéré jeta autour de lui.
All at once he heard a menace.Tout à coup il entendit une menace.
CHAPTER V. MISANTHROPY PLAYS ITS PRANKS.V LA MISANTHROPIE FAIT DES SIENNES
A strange and alarming grinding of teeth reached him through the darkness.On ne sait quel grincement étrange et alarmant vint dans cette ombre jusqu’à lui.
It was enough to drive one back: he advanced.C’était de quoi reculer. Il avança.
To those to whom silence has become dreadful a howl is comforting.A ceux que le silence consterne, un rugissement plaît.
That fierce growl reassured him; that threat was a promise. There was there a being alive and awake, though it might be a wild beast. He advanced in the direction whence came the snarl.Ce rictus féroce le rassura. Cette menace était une promesse. Il y avait là un être vivant et éveillé, fût-ce une bête fauve. Il marcha du côté d’où venait le grincement.
He turned the corner of a wall, and, behind in the vast sepulchral light made by the reflection of snow and sea, he saw a thing placed as if for shelter. It was a cart, unless it was a hovel. It had wheels—it was a carriage. It had a roof—it was a dwelling. From the roof arose a funnel, and out of the funnel smoke. This smoke was red, and seemed to imply a good fire in the interior. Behind, projecting hinges indicated a door, and in the centre of this door a square opening showed a light inside the caravan. He approached.Il tourna un angle de mur, et, derrière, à la réverbération de la neige et de la mer, sorte de vaste éclairage sépulcral, il vit une chose qui était là comme abritée. C’était une charrette, à moins que ce ne fût une cabane. Il y avait des roues, c’était une voiture; et il y avait un toit, c’était une demeure. Du toit sortait un tuyau, et du tuyau une fumée. Cette fumée était vermeille, ce qui semblait annoncer un assez bon feu a l’intérieur. A l’arrière, des gonds en saillie indiquaient une porte, et au centre de cette porte une ouverture carrée laissait voir de la lueur dans la cahute. Il approcha.
Whatever had growled perceived his approach, and became furious. It was no longer a growl which he had to meet; it was a roar. He heard a sharp sound, as of a chain violently pulled to its full length, and suddenly, under the door, between the hind wheels, two rows of sharp white teeth appeared.Ce qui avait grincé le sentit venir. Quand il fut près de la cahute, la menace devint furieuse. Ce n’était plus à un grondement qu’il avait affaire, mais à un hurlement. Il entendit un bruit sec, comme d’une chaîne violemment tendue, et brusquement, au-dessous de la porle, dans l’écartement des roues de derrière, deux rangées de dents aiguës et blanches apparurent.
At the same time as the mouth between the wheels a head was put through the window.En même temps qu’une gueule entre les roues, une tête passa par la lucarne.
“Peace there!” said the head.—Paix là! dit la tête.
The mouth was silent.La gueule se tut.
The head began again,—La tête reprit:
“Is any one there?”—Est-ce qu’il y a quelqu’un?
The child answered,—L’enfant répondit:
“Yes.”—Oui.
“Who?”—Qui?
“I.”—Moi.
“You? Who are you? whence do you come?”—Toi? qui çà, d’où viens-tu?
“I am weary,” said the child.—Je suis las, dit l’enfant.
“What o’clock is it?”—Quelle heure est-il?
“I am cold.”—J’ai froid.
“What are you doing there?”—Que fais-tu là?
“I am hungry.”—J’ai faim.
The head replied,—La tête répliqua:
“Every one cannot be as happy as a lord. Go away.”—Tout le monde ne peut pas être heureux comme un lord. Va-t-en.
The head was withdrawn and the window closed.La tête rentra, et le vasistas se ferma.
The child bowed his forehead, drew the sleeping infant closer in his arms, and collected his strength to resume his journey. He had taken a few steps, and was hurrying away.L’enfant courha le front, resserra entre ses bras la petite endormie et rassembla sa force pour se remettre en route. Il fit quelques pas et commença à s’éloigner.
However, at the same time that the window closed the door had opened; a step had been let down; the voice which had spoken to the child cried out angrily from the inside of the van,—Cependant, en même temps que la lucarne s’était fermée, la porte s’était ouverte. Un marche-pied s’était abaissé. La voix qui venait de parler à l’enfant cria du fond de la cahute avec colère:
“Well! why do you not enter?”—Eh bien, pourquoi n’entres-tu pas?
The child turned back.L’enfant se retourna.
“Come in,” resumed the voice. “Who has sent me a fellow like this, who is hungry and cold, and who does not come in?”—Entre donc, reprit la voix. Qui est-ce qui m’a donné un garnement comme cela, qui a faim et qui a froid, et qui n’entre pas?
The child, at once repulsed and invited, remained motionless.L’enfant, à la fois repoussé et attiré, demeurait immobile.
The voice continued,—La voix repartit:
“You are told to come in, you young rascal.”—On te dit d’entrer, drôle!
He made up his mind, and placed one foot on the lowest step.Il se décida, et mit un pied sur le premier échelon de l’escalier.
There was a great growl under the van. .Mais on gronda sous la voilure.
He drew back. The gaping jaws appearedIl recula. La gueule ouverte reparut.
“Peace!” cried the voice of the man.—Paix! cria la voix de l’homme.
The jaws retreated, the growling ceased.La gueule rentra. Le grondement cessa.
“Come up!” continued the man.—Monte, reprit l’homme.
The child with difficulty climbed up the three steps. He was impeded by the infant, so benumbed, rolled up and enveloped in the jacket that nothing could be distinguished of her, and she was but a little shapeless mass.L’enfant gravit péniblement les trois marches. Il était gêné par l’autre enfant, tellement engourdie, enveloppée et roulée dans le suroît qu’on ne distinguait rien d’elle, et que ce n’était qu’une petite masse informe.
He passed over the three steps; and having reached the threshold, stopped.Il franchit les trois marches, et, parvenu au seuil, s’arrêta.
No candle was burning in the caravan, probably from the economy of want. The hut was lighted only by a red tinge, arising from the opening at the top of the stove, in which sparkled a peat fire. On the stove were smoking a porringer and a saucepan, containing to all appearance something to eat. The savoury odour was perceptible. The hut was furnished with a chest, a stool, and an unlighted lantern which hung from the ceiling. Besides, to the partition were attached some boards on brackets and some hooks, from which hung a variety of things. On the boards and nails were rows of glasses, coppers, an alembic, a vessel rather like those used for graining wax, which are called granulators, and a confusion of strange objects of which the child understood nothing, and which were utensils for cooking and chemistry. The caravan was oblong in shape, the stove being in front. It was not even a little room; it was scarcely a big box. There was more light outside from the snow than inside from the stove. Everything in the caravan was indistinct and misty. Nevertheless, a reflection of the fire on the ceiling enabled the spectator to read in large letters,— URSUS, PHILOSOPHER.Aucune chandelle ne brûlait dans la cahute, par économie de misère probablement. La baraque n’était éclairée que d’une rougeur faite par le soupirail d’un poêle de fonte où pétillait un feu de tourbe. Sur le poêle fumaient une écuelle et un pot contenant selon toute apparence quelque chose à manger. On en sentait la bonne odeur. Cette habitation était meublée d’un coffre, d’un escabeau, et d’une lanterne, point allumée, accrochée au plafond. Plus, aux cloisons, quelques planches sur tasseaux, et un décroche-moi-çà, où pendaient des choses mêlées. Sur les planches et aux clous s’étageaint des verreries, des cuivres, un alambic, un récipient assez semblable à ces vases à grener la cire qu’on appelle grelous, et une confusion d’objets bizarres auxquels l’enfant n’eût pu rien comprendre, et qui était une batterie de cuisine de chimiste. La cahute avait une forme oblongue, le poêle à l’aval. Ce n’était pas même une petite chambre, c’était à peine une grande boîte. Le dehors était plus éclairé par la neige que cet intérieur par le poêle. Tout dans la baraque était indistinct et trouble. Pourtant un reflet du feu sur le plafond permettait d’y lire cette inscription en gros caractères: URSUS, PHILOSOPHE.
The child, in fact, was entering the house of Homo and Ursus. The one he had just heard growling, the other speaking.L’enfant, en effet, faisait son entrée chez Homo et chez Ursus. On vient d’entendre gronder l’un et parler l’antre.
The child having reached the threshold, perceived near the stove a man, tall, smooth, thin and old, dressed in gray, whose head, as he stood, reached the roof. The man could not have raised himself on tiptoe. The caravan was just his size.L’enfant, arrivé au seuil, aperçut près du poêle un homme long, glabre, maigre et vieux, vêtu en grisaille, qui était debout et dont le crâne chauve touchait le toit. Cet homme n’eût pu se hausser sur les pieds. La cahute était juste.
“Come in!” said the man, who was Ursus.—Entre, dit l’homme, qui était Ursus.
The child entered.L’enfant entra.
“Put down your bundle.”—Pose-là ton paquet.
The child placed his burden carefully on the top of the chest, for fear of awakening and terrifying it.L’enfant posa sur le coffre son fardeau, avec précaution, de crainte de l’effrayer et de le réveiller.
The man continued,—L’homme reprit:
“How gently you put it down! You could not be more careful were it a case of relics. Is it that you are afraid of tearing a hole in your rags? Worthless vagabond! in the streets at this hour! Who are you? Answer! But no. I forbid you to answer. There! You are cold. Warm yourself as quick as you can,” —Comme tu mets ça là doucement! Ce ne serait pas pire quand ce serait une châsse. Est-ce que tu as peur de faire une fêlure à tes guenilles? Ah! l’abominable vaurien! dans les rues à cette heure-ci! Qui es-tu? Réponds. Mais non, je te défends de répondre. Allons au plus pressé; tu as froid, chauffe-toi.
and he shoved him by the shoulders in front of the fire.Et il le poussa par les deux épaules devant le poêle.
“How wet you are! You’re frozen through! A nice state to come into a house! Come, take off those rags, you villain!”—Es-tu assez mouillé! Es-tu assez glacé! S’il est permis d’entrer ainsi dans les maisons! Allons, ôte-moi toutes ces pourritures, malfaiteur!
and as with one hand, and with feverish haste, he dragged off the boy’s rags which tore into shreds, with the other he took down from a nail a man’s shirt, and one of those knitted jackets which are up to this day called kiss-me-quicks.Et, d’une main, avec une brusquerie fébrile, il lui arracha ses haillons qui se déchirèrent en charpie, tandis que, de l’autre main, il décrochait d’un clou une chemise d’homme et une de ces jaquettes de tricot qu’on appelle encore aujourd’hui kiss-my-quick.
“Here are clothes.”—Tiens, voilà des nippes.
He chose out of a heap a woollen rag, and chafed before the fire the limbs of the exhausted and bewildered child, who at that moment, warm and naked, felt as if he were seeing and touching heaven. The limbs having been rubbed, he next wiped the boy’s feet.Il choisit dans le tas un chiffon de laine et en frotta devant le feu les membres de l’enfant ébloui et défaillant, et qui, en cette minute de nudité chaude, crut voir et toucher le ciel. Les membres frottés, l’homme essuya les pieds.
“Come, you limb; you have nothing frost-bitten! I was a fool to fancy you had something frozen, hind legs or fore paws. You will not lose the use of them this time. Dress yourself!”—Allons, carcasse, tu n’as rien de gelé. J’étais assez hôte pour avoir peur qu’il n’eût quelque chose de gelé, les pattes de derrière ou de devant! Il ne sera pas perclus pour cette fois. Rhabille-toi.
The child put on the shirt, and the man slipped the knitted jacket over it.L’enfant endossa la chemise, et l’homme lui passa, pardessus, la jaquette de tricot.
“Now….”—A présent…
The man kicked the stool forward and made the little boy sit down, again shoving him by the shoulders; then he pointed with his finger to the porringer which was smoking upon the stove. What the child saw in the porringer was again heaven to him—namely, a potato and a bit of bacon.L’homme avança du pied l’escabeau, y fit asseoir, toujours par une poussée aux épaules, le petit garçon, et lui montra de l’index l’écuelle qui fumait sur le poêle. Ce que l’enfant entrevoyait dans cette écuette, c’était encore le ciel, c’est-à-dire une pomme de terre et du lard.
“You are hungry; eat!”—Tu as faim, mange.
The man took from the shelf a crust of hard bread and an iron fork, and handed them to the child.The boy hesitated.L’homme prit sur une planche une croûte de pain dur et une fourchette de fer, et les présenta à l’enfant. L’enfant hésita.
“Perhaps you expect me to lay the cloth,” said the man, —Faut-il que je mette le couvert? dit l’homme.
and he placed the porringer on the child’s lap.Et il posa l’écuelle sur les genoux de l’enfant.
“Gobble that up.”—Mords dans tout ça!
Hunger overcame astonishment. The child began to eat. The poor boy devoured rather than ate. The glad sound of the crunching of bread filed the hut. The man grumbled,—La faim l’emporta sur l’ahurissement. L’enfant se mit à manger. Le pauvre être dévorait plutôt qu’il ne mangeait. Le bruit joyeux du pain croqué remplissait la cahute. L’homme bougonnait.
“Not so quick, you horrid glutton! Isn’t he a greedy scoundrel? When such scum are hungry, they eat in a revolting fashion. You should see a lord sup. In my time I have seen dukes eat. They don’t eat; that’s noble. They drink, however. Come, you pig, stuff yourself!”—Pas si vite, horrible goinfre! Est-il gourmand, ce gredin-là! Ces canailles qui ont faim mangent d’une façon révoltante. On n’a qu’à voir souper un lord. J’ai vu dans ma vie des ducs manger. Ils ne mangent pas; c’est ça qui est noble. Ils boivent, par exemple. Allons, marcassin, empiffre-toi!
The absence of ears, which is the concomitant of a hungry stomach, caused the child to take little heed of these violent epithets, tempered as they were by charity of action involving a contradiction resulting in his benefit. For the moment he was absorbed by two exigencies and by two ecstasies—food and warmth.L’absence d’oreilles qui caractérise le ventre affamé faisait l’enfant peu sensible à cette violence d’épithètes, tempérée d’ailleurs par la charité des actions, contresens à son profit. Pour l’instant, il était absorbé par ces deux urgences, et par ces deux extases, se réchauffer, manger.
Ursus continued his imprecations, muttering to himself,—Ursus poursuivait entre cuir et chair son imprécation en sourdine:
“I have seen King James supping in propriâ personâ in the Banqueting House, where are to be admired the paintings of the famous Rubens. His Majesty touched nothing. This beggar here browses: browses, a word derived from brute. What put it into my head to come to this Weymouth seven times devoted to the infernal deities? I have sold nothing since morning I have harangued the snow. I have played the flute to the hurricane. I have not pocketed a farthing; and now, to-night, beggars drop in. Horrid place! There is battle, struggle, competition between the fools in the street and myself. They try to give me nothing but farthings. I try to give them nothing but drugs. Well, to-day I’ve made nothing. Not an idiot on the highway, not a penny in the till. Eat away, hell-born boy! Tear and crunch! We have fallen on times when nothing can equal the cynicism of spongers. Fatten at my expense, parasite! This wretched boy is more than hungry; he is mad. It is not appetite, it is ferocity. He is carried away by a rabid virus. Perhaps he has the plague. Have you the plague, you thief? Suppose he were to give it to Homo! No, never! Let the populace die, but not my wolf. But by-the-bye I am hungry myself. I declare that this is all very disagreeable. I have worked far into the night. There are seasons in a man’s life when he is hard pressed. I was to-night, by hunger. I was alone. I made a fire. I had but one potato, one crust of bread, a mouthful of bacon, and a drop of milk, and I put it to warm. I said to myself, ‘Good.’ I think I am going to eat, and bang! this crocodile falls upon me at the very moment. He installs himself clean between my food and myself. Behold, how my larder is devastated! Eat, pike, eat! You shark! how many teeth have you in your jaws? Guzzle, wolf-cub; no, I withdraw that word. I respect wolves. Swallow up my food, boa. I have worked all day, and far into the night, on an empty stomach; my throat is sore, my pancreas in distress, my entrails torn; and my reward is to see another eat. ‘Tis all one, though! We will divide. He shall have the bread, the potato, and the bacon; but I will have the milk.”—J’ai vu le roi Jacques souper en personne dans le Banqueting House où l’on admire des peintures du fameux Rubens; sa majesté ne touchait à rien. Ce gueux-ci broute! Brouter, mot qui dérive de brute. Quelle idée ai-je eue de venir dans ce Weymouth, sept fois voué aux dieux infernaux! Je n’ai depuis ce matin rien vendu, j’ai parlé à la neige, j’ai joué de la flûte à l’ouragan, je n’ai pas empoché un farthing, et le soir il m’arrive des pauvres! Hideuse contrée! Il y a bataille, lutte et concours entre les passants imbéciles et moi. Ils tâchent de ne me donner que des liards, je tâche de ne leur donner que des drogues. Eh bien, aujourd’hui, rien! pas un idiot dans le carrefour, pas un penny dans la caisse! Mange, boy de l’enfer! tords et croque! nous sommes dans un temps où rien n’égale le cynisme des pique-assiettes. Engraisse a mes dépens, parasite. Il est mieux qu’affamé, il est enragé, cet être-là. Ce n’est pas de l’appétit, c’est de la férocité. Il est surmené par un virus rabique. Qui sait? il a peut-être la peste. As-tu la peste, brigand? S’il allait la donner à Homo! Ah mais, non! crevez, populace, mais je ne veux pas que mon loup meure. Ah ça, j’ai faim moi aussi. Je déclare que ceci est un incident désagréable. J’ai travaillé aujourd’hui très avant dans la nuit. Il y a des fois dans la vie qu’on est pressé. Je l’étais ce soir de manger. Je suis tout seul, je fais du feu, je n’ai qu’une pomme de terre, une croûte de pain, une bouchée de lard et une goutte de lait, je mets ça à chauffer, je me dis: bon! je m’imagine que je vais me repaître. Patatras! il faut que ce crocodile me tombe dans ce moment-là. Il s’installe carrément entre ma nourriture et moi. Voilà mon réfectoire dévasté. Mange, brochet, mange, requin, combien as-tu de rangs de dents dans la gargamelle? bâfre, louveteau. Non, je retire le mol, respect aux loups. Engloutis ma pâture, boa! J’ai travaillé aujourd’hui, l’estomac vide, le gosier plaintif, le pancréas en détresse, les entrailles délabrées, très avant dans la nuit; ma récompense est de voir manger un autre. C’est égal, part à deux. Il aura le pain, la pomme de terre et le lard, mais j’aurai le lait.
Just then a wail, touching and prolonged, arose in the hut. The man listened.En ce moment un cri lamentable et prolongé s’éleva dans la cahute. L’homme dressa l’oreille.
“You cry, sycophant! Why do you cry?”—Tu cries maintenant, sycophante! Pourquoi cries-tu?
The boy turned towards him. It was evident that it was not he who cried. He had his mouth full.Le garçon se retourna. Il était évident qu’il ne criait pas. Il avait la bouche pleine.
The cry continued.Le cri ne s’interrompait pas.
The man went to the chest.L’homme alla au coffre.
“So it is your bundle that wails! Vale of Jehoshaphat! Behold a vociferating parcel! What the devil has your bundle got to croak about?”—C’est donc le paquet qui gueule! Vallée de Josaphat! Voilà le paquet qui vocifère! Qu’est-ce qu’il a à croasser, ton paquet?
He unrolled the jacket. An infant’s head appeared, the mouth open and crying.Il déroula le suroit. Une têe d’enfant en sortit, la bouche ouverte et criant.
“Well, who goes there?” said the man. “Here is another of them. When is this to end? Who is there? To arms! Corporal, call out the guard! Another bang! What have you brought me, thief! Don’t you see it is thirsty? Come! the little one must have a drink. So now I shall not have even the milk!”—Eh bien, qui va là? dit l’homme. Qu’est-ce que c’est? Il y en a un autre. Ça ne va donc pas finir? Qui vive? aux armes! Caporal, hors la garde! Deuxième patatras! Qu’est-ce que tu m’apportes là, bandit? Tu vois bien qu’elle a soif. Allons, il faut qu’elle boive, celle-ci. Bon! je n’aurai pas même le lait à présent.
He took down from the things lying in disorder on the shelf a bandage of linen, a sponge and a phial, muttering savagely, Il prit dans un fouillis sur une planche un rouleau de linge à bandage, une éponge et une fiole, en murmurant avec frénésie:
“What an infernal place!”—Damné pays!
Then he looked at the little infant.Puis il considéra la petite.
“‘Tis a girl! one can tell that by her scream, and she is drenched as well.” —C’est une fille. Ça se reconnaît au glapissement. Elle est trempée, elle aussi.
He dragged away, as he had done from the boy, the tatters in which she was knotted up rather than dressed, and swathed her in a rag, which, though of coarse linen, was clean and dry. This rough and sudden dressing made the infant angry.Il arracha, comme il avait fait pour le garçon, les haillons dont elle était plutôt nouée que vêtue, et il l’entortilla d’un lambeau indigent, mais propre et sec, de grosse toile. Ce rhabillement rapide et brusque exaspéra la petite fille.
“She mews relentlessly,” said he.—Elle miaule inexorablement, dit-il.
He bit off a long piece of sponge, tore from the roll a square piece of linen, drew from it a bit of thread, took the saucepan containing the milk from the stove, filled the phial with milk, drove down the sponge halfway into its neck, covered the sponge with linen, tied this cork in with the thread, applied his cheeks to the phial to be sure that it was not too hot, and seized under his left arm the bewildered bundle which was still crying.Il coupa avec ses dents un morceau allongé de l’éponge, déchira du rouleau un carré de linge, en étira un brin de fil, prit sur le poêle le pot où il y avait du lait, remplit de ce lait la fiole, introduisit à demi l’éponge dans le goulot, couvrit l’éponge avec le linge, ficela ce bouchon avec le fil, appliqua contre sa joue la fiole, pour s’assurer qu’elle n’était pas trop chaude, et saisit sous son bras gauche le maillot éperdu qui continuait de crier.
“Come! take your supper, creature! Let me suckle you,” —Allons, soupe, créature! prends-moi le téton.
and he put the neck of the bottle to its mouth.Et il lui mit dans la bouche le goulot de la fiole.
The little infant drank greedily.La petite but avidement.
He held the phial at the necessary incline, grumbling, Il soutint la fiole à l’inclinaison voulut en grommelant:
“They are all the same, the cowards! When they have all they want they are silent.”—Ils sont tous les mêmes, les lâches! Quand ils ont ce qu’ils veulent, ils se taisent.
The child had drunk so ravenously, and had seized so eagerly this breast offered by a cross-grained providence, that she was taken with a fit of coughing.La petite avait bu si énergiquement et avait saisi avec tant d’emportement ce bout de sein offert par cette providence bourrue, qu’elle fut prise d’une quinte de toux.
“You are going to choke!” growled Ursus. “A fine gobbler this one, too!”—Tu vas t’étrangler, gronda Ursus. Une fière goulue aussi que celle-là!
He drew away the sponge which she was sucking, allowed the cough to subside, and then replaced the phial to her lips, saying, Il lui retira l’éponge qu’elle suçait, laissa la quinte s’apaiser, et lui replaça la fiole entre les lèvres, en disant:
“Suck, you little wretch!”—Tette, coureuse!
In the meantime the boy had laid down his fork. Seeing the infant drink had made him forget to eat. The moment before, while he ate, the expression in his face was satisfaction; now it was gratitude. He watched the infant’s renewal of life; the completion of the resurrection begun by himself filled his eyes with an ineffable brilliancy. Ursus went on muttering angry words between his teeth. The little boy now and then lifted towards Ursus his eyes moist with the unspeakable emotion which the poor little being felt, but was unable to express.Cependant le garçon avait posé sa fourchette. Voir la petite boire lui faisait oublier de manger. Le moment d’auparavant, quand il mangeait, ce qu’il avait dans le regard, c’était de la satisfaction, maintenant c’était de la reconnaissance. Il regardait la petite revivre. Cet achèvement de la résurrection commencée par lui emplissait sa prunelle d’une réverbération ineffable. Ursus continuait entre ses gencives son mâchonnement de paroles courroucées. Le petit garçon par instant levait sur Ursus ses yeux humides de l’émotion indéfinissable qu’éprouvait, sans pouvoir l’exprimer, le pauvre être rudoyé et attendri.
Ursus addressed him furiously.Ursus l’apostropha furieusement.
“Well, will you eat?”—Eh bien, mange donc!
“And you?” said the child, trembling all over, and with tears in his eyes. “You will have nothing!”—Et vous? dit l’enfant tout tremblant, et une larme dans la prunelle. Vous n’aurez rien?
“Will you be kind enough to eat it all up, you cub? There is not too much for you, since there was not enough for me.” The child took up his fork, but did not eat.—Veux-tu bien manger tout, engeance! Il n’y en a pas trop pour toi puisqu’il n’y en avait pas assez pour moi. L’enfant reprit sa fourchette, mais ne mangea point.
“Eat,” shouted Ursus. “What has it got to do with me? Who speaks of me? Wretched little barefooted clerk of Penniless Parish, I tell you, eat it all up! You are here to eat, drink, and sleep—eat, or I will kick you out, both of you.”—Mange, vociféra Ursus. Est-ce qu’il s’agit de moi? Qui est-ce qui te parle de moi? Mauvais petit clerc pieds nus de la paroisse de Sans-le-Sou, je te dis de manger tout. Tu es ici pour manger, boire et dormir. Mange, sinon je te jette à la porte, toi et ta drôlesse.
The boy, under this menace, began to eat again. He had not much trouble in finishing what was left in the porringer. Le garçon, sur cette menace, se remit à manger. Il n’avait pas grand’chose à faire pour expédier ce qui restait dans l’écuelle.
Ursus muttered,Ursus murmura:
“This building is badly joined. The cold comes in by the window pane.”—Ça joint mal, cet édifice, il vient du froid par les vitres.
” A pane had indeed been broken in front, either by a jolt of the caravan or by a stone thrown by some mischievous boy. Ursus had placed a star of paper over the fracture, which had become unpasted. The blast entered there.Une vitre en effet avait été cassée à l’avant, par quelque cahot de la carriole, ou par quelque pierre de polisson. Ursus avait appliqué sur cette avarie une étoile de papier qui s’était décollée. La bise entrait par là.
He was half seated on the chest. The infant in his arms, and at the same time on his lap, was sucking rapturously at the bottle, in the happy somnolency of cherubim before their Creator, and infants at their mothers’ breast.Il s’était à demi assis sur le coffre. La petite, à la fois dans ses bras et sur ses genoux, suçait voluptueusement la bouteille avec cette somnolence béate des chérubins devant Dieu et des enfants devant la mamelle.
“She is drunk,” said Ursus;—Elle est soule, dit Ursus.
and he continued, Et il reprit:
“After this, preach sermons on temperance!”—Faites donc des sermons sur la tempérance!
The wind tore from the pane the plaster of paper, which flew across the hut; but this was nothing to the children, who were entering life anew.Le vent arracha de la vitre l’emplâtre de papier qui vola à travers la cahute; mais ce n’était pas de quoi troubler les deux enfants occupés à renaître.
Whilst the little girl drank, and the little boy ate, Ursus grumbled,—Pendant que la petite buvait et que le petit mangeait, Ursus maugréait.
“Drunkenness begins in the infant in swaddling clothes. What useful trouble Bishop Tillotson gives himself, thundering against excessive drinking. What an odious draught of wind! And then my stove is old. It allows puffs of smoke to escape enough to give you trichiasis. One has the inconvenience of cold, and the inconvenience of fire. One cannot see clearly. That being over there abuses my hospitality. Well, I have not been able to distinguish the animal’s face yet. Comfort is wanting here. By Jove! I am a great admirer of exquisite banquets in well closed rooms. I have missed my vocation. I was born to be a sensualist. The greatest of stoics was Philoxenus, who wished to possess the neck of a crane, so as to be longer in tasting the pleasures of the table. Receipts to-day, naught. Nothing sold all day. Inhabitants, servants, and tradesmen, here is the doctor, here are the drugs. You are losing your time, old friend. Pack up your physic. Every one is well down here. It’s a cursed town, where every one is well! The skies alone have diarrhoea—what snow! Anaxagoras taught that the snow was black; and he was right, cold being blackness. Ice is night. What a hurricane! I can fancy the delight of those at sea. The hurricane is the passage of demons. It is the row of the tempest fiends galloping and rolling head over heels above our bone-boxes. In the cloud this one has a tail, that one has horns, another a flame for a tongue, another claws to its wings, another a lord chancellor’s paunch, another an academician’s pate. You may observe a form in every sound. To every fresh wind a fresh demon. The ear hears, the eye sees, the crash is a face. Zounds! There are folks at sea—that is certain. My friends, get through the storm as best you can. I have enough to do to get through life. Come now, do I keep an inn, or do I not? Why should I trade with these travellers? The universal distress sends its spatterings even as far as my poverty. Into my cabin fall hideous drops of the far-spreading mud of mankind. I am given up to the voracity of travellers. I am a prey—the prey of those dying of hunger. Winter, night, a pasteboard hut, an unfortunate friend below and without, the storm, a potato, a fire as big as my fist, parasites, the wind penetrating through every cranny, not a halfpenny, and bundles which set to howling. I open them and find beggars inside. Is this fair? Besides, the laws are violated. Ah! vagabond with your vagabond child! Mischievous pick-pocket, evil-minded abortion, so you walk the streets after curfew? If our good king only knew it, would he not have you thrown into the bottom of a ditch, just to teach you better? My gentleman walks out at night with my lady, and with the glass at fifteen degrees of frost, bare-headed and bare-footed. Understand that such things are forbidden. There are rules and regulations, you lawless wretches. Vagabonds are punished, honest folks who have houses are guarded and protected. Kings are the fathers of their people. I have my own house. You would have been whipped in the public street had you chanced to have been met, and quite right, too. There must be order in an established city. For my own part, I did wrong not to denounce you to the constable. But I am such a fool! I understand what is right and do what is wrong. O the ruffian! to come here in such a state! I did not see the snow upon them when they came in; it had melted, and here’s my whole house swamped. I have an inundation in my home. I shall have to burn an incredible amount of coals to dry up this lake—coals at twelve farthings the miners’ standard! How am I going to manage to fit three into this caravan? Now it is over; I enter the nursery; I am going to have in my house the weaning of the future beggardom of England. I shall have for employment, office, and function, to fashion the miscarried fortunes of that colossal prostitute, Misery, to bring to perfection future gallows’ birds, and to give young thieves the forms of philosophy. The tongue of the wolf is the warning of God. And to think that if I had not been eaten up by creatures of this kind for the last thirty years, I should be rich; Homo would be fat; I should have a medicine-chest full of rarities; as many surgical instruments as Doctor Linacre, surgeon to King Henry VIII.; divers animals of all kinds; Egyptian mummies, and similar curiosities; I should be a member of the College of Physicians, and have the right of using the library, built in 1652 by the celebrated Hervey, and of studying in the lantern of that dome, whence you can see the whole of London. I could continue my observations of solar obfuscation, and prove that a caligenous vapour arises from the planet. Such was the opinion of John Kepler, who was born the year before the Massacre of St. Bartholomew, and who was mathematician to the emperor. The sun is a chimney which sometimes smokes; so does my stove. My stove is no better than the sun. Yes, I should have made my fortune; my part would have been a different one—I should not be the insignificant fellow I am. I should not degrade science in the highways, for the crowd is not worthy of the doctrine, the crowd being nothing better than a confused mixture of all sorts of ages, sexes, humours, and conditions, that wise men of all periods have not hesitated to despise, and whose extravagance and passion the most moderate men in their justice detest. Oh, I am weary of existence! After all, one does not live long! The human life is soon done with. But no—it is long. At intervals, that we should not become too discouraged, that we may have the stupidity to consent to bear our being, and not profit by the magnificent opportunities to hang ourselves which cords and nails afford, nature puts on an air of taking a little care of man—not to-night, though. The rogue causes the wheat to spring up, ripens the grape, gives her song to the nightingale. From time to time a ray of morning or a glass of gin, and that is what we call happiness! It is a narrow border of good round a huge winding-sheet of evil. We have a destiny of which the devil has woven the stuff and God has sewn the hem. In the meantime, you have eaten my supper, you thief!”—L’ivrognerie commence au maillot. Donnez-vous donc la peine d’être l’évêque Tillotson et de tonner contre les excès de la boisson. Odieux vent coulis! Avec cela que mon poêle est vieux. Il laisse échapper des bouffées de fumée à vous donner la trichiasis. On a l’inconvénient du froid et l’inconvénient du feu. On ne voit pas clair. L’être que voici abuse de mon hospitalité. Eh bien, je n’ai pas encore pu distinguer le visage de ce mufle. Le confortable fait défaut céans. Par Jupiter, j’estime fortement les festins exquis dans les chambres bien closes. J’ai manqué ma vocation, j’étais né pour être sensuel. Le plus grand des sages est Philoxénès qui souhaita d’avoir un cou de grue pour goûter plus longuement les plaisirs de la table. Zéro de recette aujourd’hui! Rien vendu de la journée! Calamité. Habitants, laquais, et bourgeois, voilà le médecin, voilà la médecine. Tu perds ta peine, mon vieux. Remballe ta pharmacie. Tout le monde se porte bien ici. En voilà une ville maudite où personne n’est malade! Le ciel seul a la diarrhée. Quelle neige! Anaxagoras enseignait que la neige est noire. Il avait raison, froideur étant noirceur. La glace, c’est la nuit. Quelle bourrasque! Je me représente l’agrément de ceux qui sont en mer. L’ouragan, c’est le passage des satans, c’est le hourvari des brucolaques galopant et roulant, tête bêche, au-dessus de nos boîtes osseuses. Dans la nuée, celui-ci a une queue, celui-là a des cornes, celui-là a une flamme pour langue, cet autre a des griffes aux ailes, cet autre a une bedaine de lord-chancelier, cet autre a une caboche d’académicien, on distingue une forme dans chaque bruit. A vent nouveau, démon différent; l’oreille écoule, l’œil voit, le fracas est une figure. Parbleu, il y a des gens en mer, c’est évident. Mes amis, tirez-vous de la tempête, j’ai assez à faire de me tirer de la vie. Ah ça, est-ce que je tiens auberge, moi? Pourquoi est-ce que j’ai des arrivages de voyageurs? La détresse universelle a des éclaboussures jusque dans ma pauvreté. Il me tombe dans ma cabane des gouttes hideuses de la grande boue humaine. Je suis livré à la voracité des passants. Je suis une proie. La proie des meurt-de-faim. L’hiver, la nuit, une cahute de carton, un malheureux ami dessous, et dehors la tempête, une pomme de terre, du feu gros comme le poing, des parasites, le vent pénétrant par toutes les fentes, pas le sou, et des paquets qui se mettent à aboyer. On les ouvre, on trouve dedans des gueuses. Si c’est là un sort! J’ajoute que les lois sont violées. Ah! vagabond avec ta vagabonde, malicieux pick-pocket, avorton mal intentionné, ah! tu circules dans les rues passé le couvre-feu! Si notre bon roi le savait, c’est lui qui te ferait joliment flanquer dans un cul de basse-fosse pour t’apprendre! Monsieur se promène la nuit avec Mademoiselle! Par quinze degrés de froid, nu-tête, nu-pieds! sache que c’est défendu. Il y a des règlements et ordonnances, factieux! les vagabonds sont punis, les honnêtes gens qui ont des maisons à eux sont gardés et protégés, les rois sont les pères du peuple. Je suis domicilié, moi! Tu aurais été fouetté en place publique, si l’on t’avait rencontré, et c’eût été bien fait. Il faut de l’ordre dans un état policé. Moi j’ai eu tort de ne pas te dénoncer au constable. Mais je suis comme cela, je comprends le bien, et je fais le mal. Ah! le ruffian! m’arriver dans cet état-là! Je ne me suis pas aperçu de leur neige en entrant, ça a fondu. Et voilà toute ma maison mouillée. J’ai l’inondation chez moi. Il faudra brûler un charbon impossible pour sécher ce lac. Du charbon à douze farthings le dénerel! Comment allons-nous faire pour tenir trois dans cette baraque? Maintenant c’est fini, j’entre dans la nursery, je vais avoir chez moi en sevrage l’avenir de la gueuserie d’Angleterre. J’aurai pour emploi, office et fonction de dégrossir les foetus mal accouchés de la grande coquine Misère, de perfectionner la laideur des gibiers de potence en bas âge, et de donner aux jeunes filous des formes de philosophe! La langue de l’ours est l’ébauchoir de Dieu. Et dire que, si je n’avais pas été depuis trente ans grugé par des espèces de cette sorte, je serais riche, Homo serait gras, j’aurais un cabinet de médecine plein de raretés, des instruments de chirurgie autant que le docteur Linacre, chirurgien du roi Henri VIII, divers animaux de tous genres, des momies d’Egypte, et autres choses semblables! Je serais du collège des Docteurs, et j’aurais le droit d’user de la bibliothèque bâtie en 1652 par le célèbre Harvey, et d’aller travailler dans la lanterne du dôme d’où l’on découvre toute la ville de Londres! Je pourrais continuer mes calculs sur l’offuscation solaire, et prouver qu’une vapeur caligineuse sort de l’astre. C’est l’opinion de Jean Kepler, qui naquit un an avant la Saint-Barthélemy, et qui fut mathématicien de l’empereur. Le soleil est une cheminée qui fume quelquefois. Mon poêle aussi. Mon poêle ne vaut pas mieux que le soleil. Oui, j’eusse fait fortune, mon personnage serait autre, je ne serais pas trivial, je n’avilirais point la science dans les carrefours. Car le peuple n’est pas digne de la doctrine, le peuple n’étant qu’une multitude d’insensés, qu’un mélange confus de toutes sortes d’âges, de sexes, d’humeurs et de conditions, que les sages de tous les temps n’ont point hésité à mépriser, et dont les plus modérés, dans leur justice, détestent l’extravagance et la fureur. Ah! je suis ennuyé de ce qui existe. Après cela on ne vit pas longtemps. C’est vite fait, la vie humaine. Hé bien non, c’est long. Par intervalles, pour que nous ne nous découragions pas, pour que nous ayons la stupidité de consentir à être, et pour que nous ne profitions pas des magnifiques occasions de nous pendre que nous offrent toutes les cordes et tous les clous, la nature a l’air de prendre un peu soin de l’homme. Pas cette nuit pourtant. Elle fait pousser le blé, elle fail mûrir le raisin, elle fail chanter le rossignol, celle sournoise de nature. De temps en temps un rayon d’aurore, ou un verre de gin, c’est là ce qu’on appelle le bonheur. Une mince bordure de bien autour de l’immense suaire du mal. Nous avons une destinée dont le diable a fait l’étoffe et dont Dieu a fait l’ourlet. En attendant, tu m’as mangé mon souper, voleur!
In the meantime the infant whom he was holding all the time in his arms very tenderly whilst he was vituperating, shut its eyes languidly; a sign of repletion. Ursus examined the phial, and grumbled,—Cependant le nourrisson, qu’il tenait toujours entre ses bras, et très doucement tout en faisant rage, refermait vaguement les yeux, signe de plénitude. Ursus examina la fiole, et grogna:
“She has drunk it all up, the impudent creature!”—Elle a tout bu, l’effrontée!
He arose, and sustaining the infant with his left arm, with his right he raised the lid of the chest and drew from beneath it a bear-skin—the one he called, as will be remembered, his real skin.Il se dressa et, soutenant la petite du bras gauche, de la main droite il souleva le couvercle du coffre, et tira de l’intérieur une peau d’ours, ce qu’il appelait, on s’en souvient, sa «vraie peau».
Whilst he was doing this he heard the other child eating, and looked at him sideways.Tout en exécutant ce travail, il entendait l’autre enfant manger, et il le regardait de travers.
“It will be something to do if, henceforth, I have to feed that growing glutton. It will be a worm gnawing at the vitals of my industry.”—Ce sera une besogne s’il faut désormais que je nourrisse ce glouton en croissance! Ce sera un ver solitaire que j’aurai dans le ventre de mon industrie.
He spread out, still with one arm, the bear-skin on the chest, working his elbow and managing his movements so as not to disturb the sleep into which the infant was just sinking. Then he laid her down on the fur, on the side next the fire. Il étala, toujours d’un seul bras, et de son mieux, la peau d’ours sur le coffre, avec des efforts de coude et des ménagements de mouvements pour ne point secouer le commencement de sommeil de la petite fille. Puis il la déposa sur la fourrure, du côté le plus proche du feu.
Having done so, he placed the phial on the stove, and exclaimed,—Cela fait, il mit la fiole vide sur le poêle, et s’écria:
“I’m thirsty, if you like!”—C’est moi qui ai soif!
He looked into the pot. There were a few good mouthfuls of milk left in it; he raised it to his lips. Just as he was about to drink, his eye fell on the little girl. He replaced the pot on the stove, took the phial, uncorked it, poured into it all the milk that remained, which was just sufficient to fill it, replaced the sponge and the linen rag over it, and tied it round the neck of the bottle.Il regarda dans le pot; il y restait quelques bonnes gorgées de lait; il approcha le pot de ses lèvres. Au moment où il allait boire, son œil tomba sur la petite fille. Il remit le pot sur le poêle, prit la fiole, la déboucha, y vida ce qui restait de lait, juste assez pour l’emplir, replaça l’éponge, et reficela le linge sur l’éponge autour du goulot.
“All the same, I’m hungry and thirsty,” he observed.—J’ai tout de même faim et soif, reprit-il.
And he added,—Et il ajouta:
“When one cannot eat bread, one must drink water.” Behind the stove there was a jug with the spout off. He took it and handed it to the boy.—Quand on ne peut pas manger du pain, on boit de l’eau. On entrevoyait derrière le poêle une cruche égueulée. Il la prit et la présenta au garçon:
“Will you drink?”—Veux-tu boire?
The child drank, and then went on eating.L’enfant but, et se remit à manger.
Ursus seized the pitcher again, and conveyed it to his mouth. The temperature of the water which it contained had been unequally modified by the proximity of the stove. He swallowed some mouthfuls and made a grimace.Ursus ressaisit la cruche et la porta à sa bouche. La température de l’eau qu’elle contenait avait été inégalement modifiée par le voisinage du poêle. Il avala quelques gorgées, et fit une grimace.
“Water! pretending to be pure, thou resemblest false friends. Thou art warm at the top and cold at bottom.”—Eau prétendue pure, tu ressembles aux faux amis. Tu es tiède en dessus et froide en dessous.
In the meantime the boy had finished his supper. The porringer was more than empty; it was cleaned out. He picked up and ate pensively a few crumbs caught in the folds of the knitted jacket on his lap.Cependant le garçon avait fini de souper. L’écuelle était mieux que vidée, elle était nettoyée. Il ramassait et mangeait, pensif, quelques miettes de pain éparses dans les plis du tricot, sur ses genoux.
Ursus turned towards him.Ursus se tourna vers lui.
“That is not all. Now, a word with you. The mouth is not made only for eating; it is made for speaking. Now that you are warmed and stuffed, you beast, take care of yourself. You are going to answer my questions. Whence do you come?”—Ce n’est pas tout ça. Maintenant, à nous deux. La bouche n’est pas faite que pour manger, elle est faite pour parler. A présent que tu es réchauffé et gavé, animal, prends garde à toi, tu vas répondre à mes questions. D’où viens-tu?
The child replied,—L’enfant répondit:
“I do not know.”—Je ne sais pas.
“How do you mean? you don’t know?”—Comment, tu ne sais pas?
“I was abandoned this evening on the sea-shore.”—J’ai été abandonné ce soir au bord de la mer.
“You little scamp! what’s your name? He is so good for nothing that his relations desert him.”—Ah! le chenapan! Comment t’appelles-tu? Il est si mauvais sujet qu’il en vient à être abandonné par ses parents.
“I have no relations.”—Je n’ai pas de parents.
“Give in a little to my tastes, and observe that I do not like those who sing to a tune of fibs. Thou must have relatives since you have a sister.”—Rends-toi un peu compte de mes goûts, el fais attention que je n’aime point qu’on me chante des chansons qui sont des contes. Tu as des parents, puisque tu as ta sœur.
“It is not my sister.”—Ce n’est pas ma sœur.
“It is not your sister?”—Ce n’est pas ta sœur?
“No.”—Non.
“Who is it then?”—Qu’est-cc que c’est alors?
“It is a baby that I found.”—C’est une petite que j’ai trouvée.
“Found?”—Trouvée!
“Yes.”—Oui.
“What! did you pick her up?”—Comment! tu as ramassé ç”Where? If you lie I will exterminate you.”a?
“Yes.”—Oui.
“Where? If you lie I will exterminate you.”—Où? si tu mens, je t’extermine.
“On the breast of a woman who was dead in the snow.”—Sur une femme qui était morte dans la neige.
“When?”—Quand?
“An hour ago.”—Il y a une heure.
“Where?”—Où?
“A league from here.”—A une lieue d’ici.
The arched brow of Ursus knitted and took that pointed shape which characterizes emotion on the brow of a philosopher.Les arcades frontales d’Ursus se plissèrent et prirent cette forme aiguë qui caractérise l’émotion des sourcils d’un philosophe.
“Dead! Lucky for her! We must leave her in the snow. She is well off there. In which direction?”—Morte! en voilà une qui est heureuse! Il faut l’y laisser, dans sa neige. Elle y est bien. De quel côté?
“In the direction of the sea.”—Du côté de la mer.
“Did you cross the bridge?”—As-tu passé le pont?
“Yes.”—Oui.
Ursus opened the window at the back and examined the view. The weather had not improved. The snow was falling thickly and mournfully.Ursus ouvrit la lucarne de l’arrière et examina le dehors. Le temps ne s’était pas amélioré. La neige tombait épaisse et lugubre.
He shut the window.Il referma le vasistas.
He went to the broken glass; he filled the hole with a rag; he heaped the stove with peat; he spread out as far as he could the bear-skin on the chest; took a large book which he had in a corner, placed it under the skin for a pillow, and laid the head of the sleeping infant on it.Il alla à la vitre cassée, il boucha le trou avec un chiffon, il remit de la tourbe dans le poêle, il déploya le plus largement qu’il put la peau d’ours sur le coffre, prit un gros livre qu’il avait dans un coin et le mit sous le chevet pour servir d’oreiller, et plaça sur ce traversin la tête de la petite endormie.
Then he turned to the boy.Il se tourna vers le garçon.
“Lie down there.”—Couche-toi là.
The boy obeyed, and stretched himself at full length by the side of the infant.L’enfant obéit et s’étendit de tout son long avec la petite.
Ursus rolled the bear-skin over the two children, and tucked it under their feet.Ursus roula la peau d’ours autour des deux enfants, et la borda sous leurs pieds.
He took down from a shelf, and tied round his waist, a linen belt with a large pocket containing, no doubt, a case of instruments and bottles of restoratives.Il atteignit sur une planche, et se noua autour du corps une ceinture de toile à grosse poche contenant probablement une trousse de chirurgien et des flacons d’élixirs.
Then he took the lantern from where it hung to the ceiling and lighted it. It was a dark lantern. When lighted it still left the children in shadow.Puis il décrocha du plafond la lanterne, et l’alluma. C’était une lanterne sourde. En s’allumant, elle laissa les enfants dans l’obscurité.
Ursus half opened the door, and said,—Ursus entre-bailla la porte et dit:
“I am going out; do not be afraid. I shall return. Go to sleep.”—Je sors. N’ayez pas peur. Je vais revenir. Dormez.
Then letting down the steps, he called Homo. Et, abaissant le marchepied, il cria:
—Homo!
He was answered by a loving growl. Ursus, holding the lantern in his hand, descended. The steps were replaced, the door was reclosed. The children remained alone. From without, a voice, the voice of Ursus, said,—Un grondement tendre lui répondit. Ursus, la lanterne à la main, descendit, le marchepied remonta, la porte se referma. Les enfants demeurèrent seuls. Du dehors, une voix, qui était la voix d’Ursus, demanda:
“You, boy, who have just eaten up my supper, are you already asleep?”—Boy qui viens de me manger mon souper!—dis donc, tu ne dors pas encore?
“No,” replied the child.—Non, répondit le garçon.
“Well, if she cries, give her the rest of the milk.”—Eh bien! si elle beugle, tu lui donneras le reste du lait.
The clinking of a chain being undone was heard, and the sound of a man’s footsteps, mingled with that of the pads of an animal, died off in the distance. On entendit un cliquetis de chaîne défaite, et le bruit d’un pas d’homme, compliqué d’un pas de bête, qui s’éloignait.
A few minutes after, both children slept profoundly.Quelques instants après, les deux enfants dormaient profondément.
The little boy and girl, lying naked side by side, were joined through the silent hours, in the seraphic promiscuousness of the shadows; such dreams as were possible to their age floated from one to the other; beneath their closed eyelids there shone, perhaps, a starlight; if the word marriage were not inappropriate to the situation, they were husband and wife after the fashion of the angels. Such innocence in such darkness, such purity in such an embrace; such foretastes of heaven are possible only to childhood, and no immensity approaches the greatness of little children. Of all gulfs this is the deepest. The fearful perpetuity of the dead chained beyond life, the mighty animosity of the ocean to a wreck, the whiteness of the snow over buried bodies, do not equal in pathos two children’s mouths meeting divinely in sleep, and the meeting of which is not even a kiss. A betrothal perchance, perchance a catastrophe. The unknown weighs down upon their juxtaposition. It charms, it terrifies; who knows which? It stays the pulse. Innocence is higher than virtue. Innocence is holy ignorance. They slept. They were in peace. They were warm. The nakedness of their bodies, embraced each in each, amalgamated with the virginity of their souls. They were there as in the nest of the abyss.C’était on ne sait quel ineffable mélange d’haleines; plus que la chasteté, l’ignorance; une nuit de noces avant le sexe. Le petit garçon et la petite fille, nus et côte à côte, eurent pendant ces heures silencieuses la promiscuité séraphique de l’ombre; la quantité de songe possible à cet âge flottait de l’un à l’autre; il y avait probablement sous leurs paupières fermées de la lumière d’étoile; si le mot mariage n’est pas ici disproportionné, ils étaient mari et femme de la façon dont on est ange. De telles innocences dans de telles ténèbres, une telle pureté dans un tel embrassement, ces anticipations sur le ciel ne sont possibles qu’à l’enfance, et aucune immensité n’approche de cette grandeur des petits. De tous les gouffres celui-ci est le plus profond. La perpétuité formidable d’un mort enchaîné hors de la vie, l’énorme acharnement de l’océan sur un naufrage, la vaste blancheur de la neige recouvrant des formes ensevelies, n’égalent pas en pathétique deux bouches d’enfants qui se touchent divinement dans le sommeil, et dont la rencontre n’est pas même un baiser. Fiançailles peut-être; peut-être catastrophe. L’ignoré pèse sur cette juxtaposition. Cela est charmant; qui sait si ce n’est pas effrayant? on se sent le cœur serré. L’innocence est plus suprême que la vertu. L’innocence est faite d’obscurité sacrée. Ils dormaient. Ils étaient paisibles. Ils avaient chaud. La nudité des corps entrelacés amalgamait la virginité des âmes. Ils étaient là comme dans le nid de l’abîme.
CHAPTER VI. THE AWAKING.VI LE RÉVEIL
The beginning of day is sinister. A sad pale light penetrated the hut. It was the frozen dawn. That wan light which throws into relief the mournful reality of objects which are blurred into spectral forms by the night, did not awake the children, so soundly were they sleeping. The caravan was warm. Their breathings alternated like two peaceful waves. There was no longer a hurricane without. The light of dawn was slowly taking possession of the horizon. The constellations were being extinguished, like candles blown out one after the other. Only a few large stars resisted. The deep-toned song of the Infinite was coming from the sea.Le jour commence par être sinistre. Une blancheur triste entra dans la cahute. C’était l’aube glaciale. Ce blêmissement, qui ébauche en réalité funèbre le relief des choses frappées d’apparence spectrale par la nuit, n’éveilla pas les enfants, étroitement endormis. La cahute était chaude. On entendait leurs deux respirations alternant comme deux ondes tranquilles. Il n’y avait plus d’ouragan dehors. Le clair du crépuscule prenait lentement possession de l’horizon. Les constellations s’éteignaient comme des chandelles soufflées l’une après l’autre. Il n’y avait plus que la résistance de quelques grosses étoiles. Le profond chant de l’infini sortait de la mer.
The fire in the stove was not quite out. The twilight broke, little by little, into daylight. The boy slept less heavily than the girl. At length, a ray brighter than the others broke through the pane, and he opened his eyes. The sleep of childhood ends in forgetfulness. He lay in a state of semi-stupor, without knowing where he was or what was near him, without making an effort to remember, gazing at the ceiling, and setting himself an aimless task as he gazed dreamily at the letters of the inscription—”Ursus, Philosopher”—which, being unable to read, he examined without the power of decipheringLe poêle n’était pas tout à fait éteint. Le petit jour devenait peu à peu le grand jour. Le garçon dormait moins que la fille. Il y avait en lui du veilleur et du gardien. A un rayon plus vif que les autres qui traversa la vitre, il ouvrit les yeux; le sommeil de l’enfance s’achève en oubli; il demeura dans un demi-assoupissement, sans savoir où il était, ni ce qu’il avait près de lui, sans faire effort pour se souvenir, regardant au plafond, et se composant un vague travail de rêverie avec les lettres de l’inscription Ursus, philosophe, qu’il examinait sans les déchiffrer, car il ne savait pas lire.
The sound of the key turning in the lock caused him to turn his head.Un bruit de serrure fouillée par une clef lui fit dresser le cou.
The door turned on its hinges, the steps were let down. Ursus was returning. He ascended the steps, his extinguished lantern in his hand.La porte tourna, le marchepied bascula. Ursus revenait. Il monta les trois degrés, sa lanterne éteinte à la main.
At the same time the pattering of four paws fell upon the steps. It was Homo, following Ursus, who had also returned to his home.En même temps un piétinement de quatre pattes escalada lestement le marchepied. C’était Homo, suivant Ursus, et, lui aussi, rentrant chez lui.
The boy awoke with somewhat of a start.Le garçon réveillé eut un certain sursaut.
The wolf, having probably an appetite, gave him a morning yawn, showing two rows of very white teeth.Le loup, probablement en appétit, avait un rictus matinal qui montrait toutes ses dents, très blanches.
He stopped when he had got halfway up the steps, and placed both forepaws within the caravan, leaning on the threshold, like a preacher with his elbows on the edge of the pulpit. He sniffed the chest from afar, not being in the habit of finding it occupied as it then was. His wolfine form, framed by the doorway, was designed in black against the light of morning. He made up his mind, and entered. Il s’arrêta à demi-montée et posa ses deux pattes de devant dans la cahute, les deux coudes sur le seuil comme un prêcheur au bord de la chaire. Il flaira à distance le coffre qu’il n’était pas accoutumé à voir habité de cette façon. Son buste de loup, encadré par la porte, se dessinait en noir sur la clarté du matin. Il se décida, et fit son entrée.
The boy, seeing the wolf in the caravan, got out of the bear-skin, and, standing up, placed himself in front of the little infant, who was sleeping more soundly than ever.Le garçon, en voyant le loup dans la cahute, sortit de la peau d’ours, se leva et se plaça debout devant la petite, plus endormie que jamais.
Ursus had just hung the lantern up on a nail in the ceiling. Silently, and with mechanical deliberation, he unbuckled the belt in which was his case, and replaced it on the shelf. He looked at nothing, and seemed to see nothing. His eyes were glassy. Something was moving him deeply in his mind. His thoughts at length found breath, as usual, in a rapid outflow of words. He exclaimed,—Ursus venait de raccrocher la lanterne au clou du plafond. Il déboucla silencieusement et avec une lenteur machinale sa ceinture où était sa trousse, et la remit sur une planche. Il ne regardait rien et semblait ne rien voir. Sa prunelle était vitreuse. Quelque chose de profond remuait dans son esprit. Sa pensée enfin se fit jour, comme d’ordinaire, par une vive sortie de paroles. Il s’écria:
“Happy, doubtless! Dead! stone dead!”
He bent down, and put a shovelful of turf mould into the stove; and as he poked the peat he growled out,—
—Décidément heureuse! Morte, bien morte. Il s’accroupit, et remit une pelletée de scories dans le poêle, et, tout en fourgonnant la tourbe, il grommela:
“I had a deal of trouble to find her. The mischief of the unknown had buried her under two feet of snow. Had it not been for Homo, who sees as clearly with his nose as Christopher Columbus did with his mind, I should be still there, scratching at the avalanche, and playing hide and seek with Death. Diogenes took his lantern and sought for a man; I took my lantern and sought for a woman. He found a sarcasm, and I found mourning. How cold she was! I touched her hand—a stone! What silence in her eyes! How can any one be such a fool as to die and leave a child behind? It will not be convenient to pack three into this box. A pretty family I have now! A boy and a girl!”—J’ai eu de la peine à la trouver. La malice inconnue l’avail fourrée sous deux pieds de neige. Sans Homo, qui voit aussi clair avec son nez que Christophe Colomb avec son esprit, je serais encore là à patauger dans l’avalanche et à jouer à cache-cache avec la mort. Diogène prenait sa lanterne et cherchait un homme, j’ai pris ma lanterne et j’ai cherché une femme; il a trouvé le sarcasme, j’ai trouvé le deuil. Comme elle était froide! J’ai touché la main, une pierre. Quel silence dans les yeux! Comment peut-on être assez bête pour mourir en laissant un enfant derrière soi! Ça ne va pas être commode à présent de tenir trois dans celle boîte-ci. Quelle tuile! Voilà que j’ai de la famille à présent! Fille et garçon.
Whilst Ursus was speaking, Homo sidled up close to the stove. The hand of the sleeping infant was hanging down between the stove and the chest. The wolf set to licking it. Tandis qu’Ursus parlait, Homo s’était glissé près du poêle. La main de la petite endormie pendait entre le poêle et le coffre. Le loup se mit à lécher cette main.
He licked it so softly that he did not awake the little infant.Il la léchait si doucement que la petite ne s’éveilla pas.
Ursus turned round.Ursus se retourna.
“Well done, Homo. I shall be father, and you shall be uncle.”
Then he betook himself again to arranging the fire with philosophical care, without interrupting his aside.
—Bien, Homo. Je serai le père et tu seras l’oncle. Puis il reprit sa besogne de philosophe d’arranger le feu, sans interrompre son aparte.
“Adoption! It is settled; Homo is willing.”—Adoption. C’est dit. D’ailleurs Homo veut bien.
He drew himself up.Il se redressa.
“I should like to know who is responsible for that woman’s death? Is it man? or….”—Je voudrais savoir qui est responsable de cette morte. Sont-ce les hommes? ou…
He raised his eyes, but looked beyond the ceiling, and his lips murmured,—Son œil regarda en l’air, mais au delà du plafond, et sa bouche murmura:
“Is it Thou?”—Est-ce toi?
Then his brow dropped, as if under a burden, and he continued,—Puis son front s’abaissa comme sous un poids, et il reprit:
“The night took the trouble to kill the woman.”—La nuit a pris la peine de tuer cette femme.
Raising his eyes, they met those of the boy, just awakened, who was listening. Ursus addressed him abruptly,—Son regard, en se relevant, rencontra le visage du garçon réveillé qui l’écoutait, Ursus l’interpella brusquement:
“What are you laughing about?”—Qu’as-tu à rire?
The boy answered,—Le garçon répondit:
“I am not laughing.”—Je ne ris pas.
Ursus felt a kind of shock, looked at him fixedly for a few minutes, and said,—Ursus eut une sorte de secousse, l’examina fixement et en silence pendant quelques instants, et dit:
“Then you are frightful.”—Alors tu es terrible.
The interior of the caravan, on the previous night, had been so dark that Ursus had not yet seen the boy’s face. The broad daylight revealed it.L’intérieur de la cahute dans la nuit était si peu éclairé qu’Ursus n’avait pas encore vu la face du garçon. Le grand jour la lui montrait.
He placed the palms of his hands on the two shoulders of the boy, and, examining his countenance more and more piercingly, exclaimed,—Il posa les deux paumes de ses mains sur les deux épaules de l’enfant, considéra encore avec une attention de plus en plus poignante son visage, et lui cria:
“Do not laugh any more!”—Ne ris donc plus!
“I am not laughing,” said the child.—Je ne ris pas, dit l’enfant.
Ursus was seized with a shudder from head to foot.Ursus eut un tremblement de la tête aux pieds.
“You do laugh, I tell you.”—Tu ris, te dis-je.
Then seizing the child with a grasp which would have been one of fury had it not been one of pity, he asked him: roughly,—Puis secouant l’enfant avec une étreinte qui était de la fureur si elle n’était de la pitié, il lui demanda violemment:
“Who did that to you?”—Qui est-ce qui t’a fait cela?
The child replied,—L’enfant répondit:
“I don’t know what you mean.”—Je ne sais ce que vous voulez dire.
Ursus reprit:
“How long have you had that laugh?”—Depuis quand as-tu ce rire?
“I have always been thus,” said the child.—J’ai toujours été ainsi, dit l’enfant.
Ursus turned towards the chest, saying in a low voice,—Ursus se tourna vers le coffre en disant à demi-voix:
“I thought that work was out of date.”—Je croyais que ce travail-là ne se faisait plus.
He took from the top of it, very softly, so as not to awaken the infant, the book which he had placed there for a pillow.Il prit au chevet, très doucement pour ne pas la réveiller, le livre qu’il avait mis comme oreiller sous la tète de la petite.
“Let us see Conquest,” he murmured.—Voyons Conquest, murmura-t-il.
It was a bundle of paper in folio, bound in soft parchment. He turned the pages with his thumb, stopped at a certain one, opened the book wide on the stove, and read,—C’était une liasse in-folio, reliée en parchemin mou. Il la feuilleta du pouce, s’arrêta à une page, ouvrit le livre tout grand sur le poêle, et lut:
“‘De Denasatis,’ it is here.”—… De Denasatis.—C’est ici.
And he continued,—Et il continua:
Bucca fissa usque ad aures, genezivis denudatis, nasoque murdridato, masca eris, et ridebis semper.”Bucca fissa usque ad aures, genzivis denudatis, nasoque murdridato, masca eris, et ridebis semper.
“There it is for certain.”—C’est bien cela.
Then he replaced the book on one of the shelves, growling.Et il replaça le livre sur une des planches en grommelant:
“It might not be wholesome to inquire too deeply into a case of the kind. We will remain on the surface. Laugh away, my boy!”—Aventure dont l’approfondissement serait malsain. Restons à la surface. Ris, mon garçon.
Just then the little girl awoke. Her good-day was a cry.La petite fille se réveilla. Son bonjour fut un cri.
“Come, nurse, give her the breast,” said Ursus.—Allons, nourrice, donne le sein, dit Ursus.
The infant sat up. Ursus taking the phial from the stove gave it to her to suck.La petite s’était dressée sur son séant. Ursus prit sur le poêle la fiole, et la lui donna à sucer.
Then the sun arose. He was level with the horizon. His red rays gleamed through the glass, and struck against the face of the infant, which was turned towards him. Her eyeballs, fixed on the sun, reflected his purple orbit like two mirrors. The eyeballs were immovable, the eyelids also.En ce moment le soleil se levait. Il était à fleur de l’horizon. Son rayon rouge entrait par la vitre et frappait de face le visage de la petite fille tourné vers lui. Les prunelles de l’enfant fixées sur le soleil réfléchissaient comme deux miroirs cette rondeur pourpre. Les prunelles restaient immobiles, les paupières aussi.
“See!” said Ursus. “She is blind.”—Tiens, dit Ursus, elle est aveugle.
PART II.
 
BOOK THE FIRST.
DEUXIEME PARTIE

PAR ORDRE DU ROI

Texte bilingue établi par Akirill.com, déposé sur le site Akirill.com le 26 mars 2022. Chacun des livres (anglais ou français) peut être repris séparément et réutilisé a des fins personnelles et non commerciales. Ils sont libres de droits d’auteur.
Toute utilisation des deux livres côte a côte doit mentionner leur origine https://www.Akirill.com
Bilingual text prepared by Akirill.com , deposited on the site Akirill.com on March 26, 2022. Each of the books (English or French) can be taken back separately and reused for personal and non-commercial purposes. They are free of copyright.
Any use of the two books side by side must mention their origin https://www.Akirill.com
If you liked this page, don’t forget to like and share.
Si vous avez aimé cette page, n’oublier pas d’aimer et de partager.
Subscribe to not miss anything
Abonnez-vous pour ne rien manquer

Check out our latest posts
Découvrez nos derniers articles