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Twenty Thousand Leagues Under The Sea by Jules Vernes Bilingual Book French/English Page 4

Ce n’est pas une traduction mots a mots mais les livres dans les deux languages mis côte a côte. Vous pouvez le lire en Français, en anglais ou parallèlement.

This is not a word-by-word translation but the books in the two languages put side by side. You can read it in French, in English or both.

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Twenty Thousand Leagues Under The Sea by Jules Vernes

Twenty Thousand Leagues Under The Sea by Jules VernesVingt Mille Lieues
Sous Les Mers de Jules Vernes
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PART IPART I
CHAPTER XICHAPITRE XII
—Et ces sondes d’une nouvelle espèce?
—Ce sont des sondes thermométriques qui rapportent la température des diverses couches d’eau.
“And these other instruments, the use of which I cannot guess?”—Et ces autres instruments dont je ne devine pas l’emploi?
“Here, Professor, I ought to give you some explanations. Will you be kind enough to listen to me?”—Ici, monsieur le professeur, je dois vous donner quelques explications, dit le capitaine Nemo. Veuillez donc m’écouter.»
He was silent for a few moments, then he said:
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Il garda le silence pendant quelques instants, puis il dit:
“There is a powerful agent, obedient, rapid, easy, which conforms to every use, and reigns supreme on board my vessel. Everything is done by means of it. It lights, warms it, and is the soul of my mechanical apparatus. This agent is electricity.”«Il est un agent puissant, obéissant, rapide, facile, qui se plie à tous les usages et qui règne en maître à mon bord. Tout se fait par lui. Il m’éclaire, il m’échauffe, il est l’âme de mes appareils mécaniques. Cet agent, c’est l’électricité.
“Electricity?” I cried in surprise.—L’électricité! m’écriai-je assez surpris.
“Yes, sir.”—Oui, monsieur.
“Nevertheless, Captain, you possess an extreme rapidity of movement, which does not agree well with the power of electricity. Until now, its dynamic force has remained under restraint, and has only been able to produce a small amount of power.”—Cependant, capitaine, vous possédez une extrême rapidité de mouvements qui s’accorde mal avec le pouvoir de l’électricité. Jusqu’ici, sa puissance dynamique est restée très-restreinte et n’a pu produire que de petites forces!
“Professor,” said Captain Nemo, “my electricity is not everybody’s. You know what sea-water is composed of. In a thousand grammes are found 96 1/2 per cent. of water, and about 2 2/3 per cent. of chloride of sodium; then, in a smaller quantity, chlorides of magnesium and of potassium, bromide of magnesium, sulphate of magnesia, sulphate and carbonate of lime. You see, then, that chloride of sodium forms a large part of it. So it is this sodium that I extract from the sea-water, and of which I compose my ingredients. I owe all to the ocean; it produces electricity, and electricity gives heat, light, motion, and, in a word, life to the Nautilus.”—Monsieur le professeur, répondit le capitaine Nemo, mon électricité n’est pas celle de tout le monde, et c’est là tout ce que vous me permettrez de vous en dire. —Je n’insisterai pas, monsieur, et je me contenterai d’être très-étonné d’un tel résultat. Une seule question, cependant, à laquelle vous ne répondrez pas si elle est indiscrète. Les éléments que vous employez pour produire ce merveilleux agent doivent s’user vite. Le zinc, par exemple, comment le remplacez-vous, puisque vous n’avez plus aucune communication avec la terre?
—Votre question aura sa réponse, répondit le capitaine Nemo. Je vous dirai, d’abord, qu’il existe au fond des mers des mines de zinc, de fer, d’argent, d’or, dont l’exploitation serait très-certainement praticable. Mais je n’ai rien emprunté à ces métaux de la terre, et j’ai voulu ne demander qu’à la mer elle-même les moyens de produire mon électricité.
—A la mer?
—Oui, monsieur le professeur, et les moyens ne me manquaient pas. J’aurais pu, en effet, en établissant un circuit entre des fils plongés à différentes profondeurs, obtenir l’électricité par la diversité de températures qu’ils éprouvaient; mais j’ai préféré employer un système plus pratique.
—Et lequel?
—Vous connaissez la composition de l’eau de mer. Sur mille grammes on trouve quatre-vingt-seize centièmes et demi d’eau, et deux centièmes deux tiers environ de chlorure de sodium; puis, en petite quantité, des chlorures de magnésium et de potassium, du bromure de magnésium, du sulfate de magnésie, du sulfate et du carbonate de chaux. Vous voyez donc que le chlorure de sodium s’y rencontre dans une proportion notable. Or, c’est ce sodium que j’extrais de l’eau de mer et dont je compose mes éléments.
—Le sodium?
—Oui, monsieur. Mélangé avec le mercure, il forme un amalgame qui tient lieu du zinc dans les éléments Bunzen. Le mercure ne s’use jamais. Le sodium seul se consomme, et la mer me le fournit elle-même. Je vous dirai, en outre, que les piles au sodium doivent être considérées comme les plus énergiques, et que leur force électro-motrice est double de celle des piles au zinc.
—Je comprends bien, capitaine, l’excellence du sodium dans les conditions où vous vous trouvez. La mer le contient. Bien. Mais il faut encore le fabriquer, l’extraire en un mot. Et comment faites-vous? Vos piles pourraient évidemment servir à cette extraction; mais, si je ne me trompe, la dépense du sodium nécessitée par les appareils électriques dépasserait la quantité extraite. Il arriverait donc que vous en consommeriez pour le produire plus que vous n’en produiriez!
—Aussi, monsieur le professeur, je ne l’extrais pas par la pile, et j’emploie tout simplement la chaleur du charbon de terre.
—De terre? dis-je en insistant.
—Disons le charbon de mer, si vous voulez, répondit le capitaine Nemo.
—Et vous pouvez exploiter des mines sous-marines de houille?
—Monsieur Aronnax, vous me verrez à l’œuvre. Je ne vous demande qu’un peu de patience, puisque vous avez le temps d’être patient. Rappelez-vous seulement ceci: Je dois tout à l’Océan; il produit l’électricité, et l’électricité donne au Nautilus la chaleur, la lumière, le mouvement, la vie en un mot.
“But not the air you breathe?”—Mais non pas l’air que vous respirez?
“Oh! I could manufacture the air necessary for my consumption, but it is useless, because I go up to the surface of the water when I please. However, if electricity does not furnish me with air to breathe, it works at least the powerful pumps that are stored in spacious reservoirs, and which enable me to prolong at need, and as long as I will, my stay in the depths of the sea. It gives a uniform and unintermittent light, which the sun does not. Now look at this clock; it is electrical, and goes with a regularity that defies the best chronometers. I have divided it into twenty-four hours, like the Italian clocks, because for me there is neither night nor day, sun nor moon, but only that factitious light that I take with me to the bottom of the sea. Look! just now, it is ten o’clock in the morning.”—Oh! je pourrais fabriquer l’air nécessaire à ma consommation, mais c’est inutile, puisque je remonte à la surface de la mer, quand il me plaît. Cependant, si l’électricité ne me fournit pas l’air respirable, elle manœuvre, du moins, des pompes puissantes qui l’emmagasinent dans des réservoirs spéciaux, ce qui me permet de prolonger, au besoin, et aussi longtemps que je le veux, mon séjour dans les couches profondes. —Capitaine, répondis-je, je me contente d’admirer. Vous avez évidemment trouvé ce que les hommes trouveront sans doute un jour, la véritable puissance dynamique de l’électricité.
—Je ne sais s’ils la trouveront, répondit froidement le capitaine Nemo. Quoi qu’il en soit, vous connaissez déjà la première application que j’ai faite de ce précieux agent. C’est lui qui nous éclaire avec une égalité, une continuité que n’a pas la lumière du soleil. Maintenant, regardez cette horloge; elle est électrique, et marche avec une régularité qui défie celle des meilleurs chronomètres. Je l’ai divisée en vingt-quatre heures, comme les horloges italiennes, car pour moi, il n’existe ni nuit, ni jour, ni soleil, ni lune, mais seulement cette lumière factice que j’entraîne jusqu’au fond des mers! Voyez, en ce moment, il est dix heures du matin.
“Exactly.”—Parfaitement.
“Another application of electricity. This dial hanging in front of us indicates the speed of the Nautilus. An electric thread puts it in communication with the screw, and the needle indicates the real speed. Look! now we are spinning along with a uniform speed of fifteen miles an hour.”—Autre application de l’électricité. Ce cadran, suspendu devant nos yeux, sert à indiquer la vitesse du Nautilus. Un fil électrique le met en communication avec l’hélice du loch, et son aiguille m’indique la marche réelle de l’appareil. Et, tenez, en ce moment, nous filons avec une vitesse modérée de quinze milles à l’heure.
“It is marvelous! And I see, Captain, you were right to make use of this agent that takes the place of wind, water, and steam.”—C’est merveilleux, répondis-je, et je vois bien, capitaine, que vous avez eu raison d’employer cet agent, qui est destiné à remplacer le vent, l’eau et la vapeur.
“We have not finished, M. Aronnax,” said Captain Nemo, rising. “If you will allow me, we will examine the stern of the Nautilus.”—Nous n’avons pas fini, monsieur Aronnax, dit le capitaine Nemo en se levant, et si vous voulez me suivre, nous visiterons l’arrière du Nautilus.»
Really, I knew already the anterior part of this submarine boat, of which this is the exact division, starting from the ship’s head: the dining-room, five yards long, separated from the library by a water-tight partition; the library, five yards long; the large drawing-room, ten yards long, separated from the Captain’s room by a second water-tight partition; the said room, five yards in length; mine, two and a half yards; and, lastly a reservoir of air, seven and a half yards, that extended to the bows. Total length thirty five yards, or one hundred and five feet. The partitions had doors that were shut hermetically by means of india-rubber instruments, and they ensured the safety of the Nautilus in case of a leak.En effet, je connaissais déjà toute la partie antérieure de ce bateau sous-marin, dont voici la division exacte, en allant du centre à l’éperon: la salle à manger de cinq mètres, séparée de la bibliothèque par une cloison étanche, c’est-à-dire ne pouvant être pénétrée par l’eau,—la bibliothèque de cinq mètres,—le grand salon de dix mètres, séparé de la chambre du capitaine par une seconde cloison étanche,—ladite chambre du capitaine de cinq mètres,—la mienne de deux mètres cinquante,—et enfin un réservoir d’air de sept mètres cinquante, qui s’étendait jusqu’à l’étrave. Total, trente-cinq mètres de longueur. Les cloisons étanches étaient percées de portes qui se fermaient hermétiquement au moyen d’obturateurs en caoutchouc, et elle assuraient toute sécurité à bord du Nautilus, au cas où une voie d’eau se fût déclarée.
I followed Captain Nemo through the waist, and arrived at the centre of the boat. There was a sort of well that opened between two partitions. An iron ladder, fastened with an iron hook to the partition, led to the upper end. I asked the Captain what the ladder was used for.Je suivis le capitaine Nemo, à travers lese coursives situées en abord, et j’arrivai au centre du navire. Là, se trouvait une sorte de puits qui s’ouvrait entre deux cloisons étanches. Une échelle de fer, cramponnée à la paroi, conduisait à son extrémité supérieure. Je demandai au capitaine à quel usage servait cette échelle.
“It leads to the small boat,” he said.
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«Elle aboutit au canot, répondit-il.
“What! have you a boat?” I exclaimed, in surprise.—Quoi! vous avez un canot? répliquai-je, assez étonné.
“Of course; an excellent vessel, light and insubmersible, that serves either as a fishing or as a pleasure boat.”—Sans doute. Une excellente embarcation, légère et insubmersible, qui sert à la promenade et à la pêche.
“But then, when you wish to embark, you are obliged to come to the surface of the water?”—Mais alors, quand vous voulez vous embarquer, vous êtes forcé de revenir à la surface de la mer?
“Not at all. This boat is attached to the upper part of the hull of the Nautilus, and occupies a cavity made for it. It is decked, quite water-tight, and held together by solid bolts. This ladder leads to a man-hole made in the hull of the Nautilus, that corresponds with a similar hole made in the side of the boat. By this double opening I get into the small vessel. They shut the one belonging to the Nautilus; I shut the other by means of screw pressure. I undo the bolts, and the little boat goes up to the surface of the sea with prodigious rapidity. I then open the panel of the bridge, carefully shut till then; I mast it, hoist my sail, take my oars, and I’m off.”—Aucunement. Ce canot adhère à la partie supérieure de la coque du Nautilus, et occupe une cavité disposée pour le recevoir. Il est entièrement ponté, absolument étanche, et retenu par de solides boulons. Cette échelle conduit à un trou d’homme percé dans la coque du Nautilus, qui correspond à un trou pareil percé dans le flanc du canot. C’est par cette double ouverture que je m’introduis dans l’embarcation. On referme l’une, celle du Nautilus; je referme l’autre, celle du canot, au moyen de vis de pression; je largue les boulons, et l’embarcation remonte avec une prodigieuse rapidité à la surface de la mer. J’ouvre alors le panneau du pont, soigneusement clos jusque-là, je mâte, je hisse ma voile ou je prends mes avirons, et je me promène.
“But how do you get back on board?”—Mais comment revenez-vous à bord?
“I do not come back, M. Aronnax; the Nautilus comes to me.”—Je ne reviens pas, monsieur Aronnax, c’est le Nautilus qui revient.
“By your orders?”—A vos ordres!
“By my orders. An electric thread connects us. I telegraph to it, and that is enough.”—A mes ordres. Un fil électrique me rattache à lui. Je lance un télégramme, et cela suffit.
“Really,” I said, astonished at these marvels, “nothing can be more simple.”—En effet, dis-je, grisé par ces merveilles, rien n’est plus simple!»
After having passed by the cage of the staircase that led to the platform, I saw a cabin six feet long, in which Conseil and Ned Land, enchanted with their repast, were devouring it with avidity. Then a door opened into a kitchen nine feet long, situated between the large store-rooms. There electricity, better than gas itself, did all the cooking. The streams under the furnaces gave out to the sponges of platina a heat which was regularly kept up and distributed. They also heated a distilling apparatus, which, by evaporation, furnished excellent drinkable water. Near this kitchen was a bathroom comfortably furnished, with hot and cold water taps.Après avoir dépassé la cage de l’escalier qui aboutissait à la plate-forme, je vis une cabine longue de deux mètres, dans laquelle Conseil et Ned Land, enchantés de leur repas, s’occupaient à le dévorer à belles dents. Puis, une porte s’ouvrit sur la cuisine longue de trois mètres, située entre les vastes cambuses du bord. Là, l’électricité, plus énergique et plus obéissante que le gaz lui-même, faisait tous les frais de la cuisson. Les fils, arrivant sous les fourneaux, communiquaient à des éponges de platine une chaleur qui se distribuait et se maintenait régulièrement. Elle chauffait également des appareils distillatoires qui, par la vaporisation, fournissaient une excellente eau potable. Auprès de cette cuisine s’ouvrait une salle de bains, confortablement disposée, et dont les robinets fournissaient l’eau froide ou l’eau chaude, à volonté.
Next to the kitchen was the berth-room of the vessel, sixteen feet long. But the door was shut, and I could not see the management of it, which might have given me an idea of the number of men employed on board the Nautilus.A la cuisine succédait le poste de l’équipage, long de cinq mètres. Mais la porte en était fermée, et je ne pus voir son aménagement, qui m’eût peut-être fixé sur le nombre d’hommes nécessité par la manœuvre du Nautilus.
At the bottom was a fourth partition that separated this office from the engine-room. A door opened, and I found myself in the compartment where Captain Nemo—certainly an engineer of a very high order—had arranged his locomotive machinery. This engine-room, clearly lighted, did not measure less than sixty-five feet in length. It was divided into two parts; the first contained the materials for producing electricity, and the second the machinery that connected it with the screw.Au fond s’élevait une quatrième cloison étanche qui séparait ce poste de la chambre des machines. Une porte s’ouvrit, et je me trouvai dans ce compartiment où le capitaine Nemo,—ingénieur de premier ordre, à coup sûr,—avait disposé ses appareils de locomotion. Cette chambre des machines, nettement éclairée, ne mesurait pas moins de vingt mètres en longueur. Elle était naturellement divisée en deux parties; la première renfermait les éléments qui produisaient l’électricité, et la seconde, le mécanisme qui transmettait le mouvement à l’hélice.
I examined it with great interest, in order to understand the machinery of the Nautilus.
Je fus surpris, tout d’abord, de l’odeur sui generis qui emplissait ce compartiment. Le capitaine Nemo s’aperçut de mon impression.
“You see,” said the Captain, “I use Bunsen’s contrivances, not Ruhmkorff’s. Those would not have been powerful enough. Bunsen’s are fewer in number, but strong and large, which experience proves to be the best. The electricity produced passes forward, where it works, by electro-magnets of great size, on a system of levers and cog-wheels that transmit the movement to the axle of the screw. This one, the diameter of which is nineteen feet, and the thread twenty-three feet, performs about 120 revolutions in a second.”«Ce sont, me dit-il, quelques dégagements de gaz, produits par l’emploi du sodium; mais ce n’est qu’un léger inconvénient. Tous les matins, d’ailleurs, nous purifions le navire en le ventilant à grand air.» Cependant, j’examinais avec un intérêt facile à concevoir la machine du Nautilus.
«Vous le voyez, me dit le capitaine Nemo, j’emploie des éléments Bunzen, et non des éléments Ruhmkorff. Ceux-ci eussent été impuissants. Les éléments Bunzen sont peu nombreux, mais forts et grands, ce qui vaut mieux, expérience faite. L’électricité produite se rend à l’arrière, où elle agit par des électro-aimants de grande dimension sur un système particulier de leviers et d’engrenages qui transmettent le mouvement à l’arbre de l’hélice. Celle-ci, dont le diamètre est de six mètres et le pas de sept mètres cinquante, peut donner jusqu’à cent vingt tours par seconde.
“And you get then?”—Et vous obtenez alors?
“A speed of fifty miles an hour.”—Une vitesse de cinquante milles à l’heure.»
“I have seen the Nautilus manoeuvre before the Abraham Lincoln, and I have my own ideas as to its speed. But this is not enough. We must see where we go. We must be able to direct it to the right, to the left, above, below. How do you get to the great depths, where you find an increasing resistance, which is rated by hundreds of atmospheres? How do you return to the surface of the ocean? And how do you maintain yourselves in the requisite medium? Am I asking too much?”Il y avait là un mystère, mais je n’insistai pas pour le connaître. Comment l’électricité pouvait-elle agir avec une telle puissance? Où cette force presque illimitée prenait-elle son origine? Était-ce dans sa tension excessive obtenue par des bobines d’une nouvelle sorte? Était-ce dans sa transmission qu’un système de leviers inconnus[6] pouvait accroître à l’infini? C’est ce que je ne pouvais comprendre.
[6] Et précisément, on parle d’une découverte de ce genre dans laquelle un nouveau jeu de leviers produit des forces considérables. L’inventeur s’est-il donc rencontré avec le capitaine Nemo?
J. V.
«Capitaine Nemo, dis-je, je constate les résultats et je ne cherche pas à les expliquer. J’ai vu le Nautilus manœuvrer devant l’Abraham-Lincoln, et je sais à quoi m’en tenir sur sa vitesse. Mais marcher ne suffit pas. Il faut voir où l’on va! Il faut pouvoir se diriger à droite, à gauche, en haut, en bas! Comment atteignez-vous les grandes profondeurs, où vous trouvez une résistance croissante qui s’évalue par des centaines d’atmosphères? Comment remontez-vous à la surface de l’Océan? Enfin, comment vous maintenez-vous dans le milieu qui vous convient? Suis-je indiscret en vous le demandant?
“Not at all, Professor,” replied the Captain, with some hesitation; “since you may never leave this submarine boat. Come into the saloon, it is our usual study, and there you will learn all you want to know about the Nautilus.”—Aucunement, monsieur le professeur, me répondit le capitaine, après une légère hésitation, puisque vous ne devez jamais quitter ce bateau sous-marin. Venez dans le salon. C’est notre véritable cabinet de travail, et là, vous apprendrez tout ce que vous devez savoir sur le Nautilus!»
CHAPTER XII
SOME FIGURES
CHAPITRE XIII
QUELQUES CHIFFRES.
A moment after we were seated on a divan in the saloon smoking. The Captain showed me a sketch that gave the plan, section, and elevation of the Nautilus. Then he began his description in these words:Un instant après, nous étions assis sur un divan du salon, le cigare aux lèvres. Le capitaine mit sous mes yeux une épure qui donnait les plan, coupe et élévation du Nautilus. Puis il commença sa description en ces termes:
“Here, M. Aronnax, are the several dimensions of the boat you are in. It is an elongated cylinder with conical ends. It is very like a cigar in shape, a shape already adopted in London in several constructions of the same sort. The length of this cylinder, from stem to stern, is exactly 232 feet, and its maximum breadth is twenty-six feet. It is not built quite like your long-voyage steamers, but its lines are sufficiently long, and its curves prolonged enough, to allow the water to slide off easily, and oppose no obstacle to its passage. These two dimensions enable you to obtain by a simple calculation the surface and cubic contents of the Nautilus. Its area measures 6,032 feet; and its contents about 1,500 cubic yards; that is to say, when completely immersed it displaces 50,000 feet of water, or weighs 1,500 tons.«Voici, monsieur Aronnax, les diverses dimensions du bateau qui vous porte. C’est un cylindre très-allongé, à bouts coniques. Il affecte sensiblement la forme d’un cigare, forme déjà adoptée à Londres dans plusieurs constructions du même genre. La longueur de ce cylindre, de tête en tête, est exactement de soixante-dix mètres, et son bau, à sa plus grande largeur, est de huit mètres. Il n’est donc pas construit tout à fait au dixième comme vos steamers de grande marche, mais ses lignes sont suffisamment longues et sa coulée assez prolongée, pour que l’eau déplacée s’échappe aisément et n’oppose aucun obstacle à sa marche. «Ces deux dimensions vous permettent d’obtenir par un simple calcul la surface et le volume du Nautilus. Sa surface comprend mille onze mètres carrés et quarante-cinq centièmes; son volume, quinze cents mètres cubes et deux dixièmes,—ce qui revient à dire qu’entièrement immergé, il déplace ou pèse quinze cents mètres cubes ou tonneaux.
“When I made the plans for this submarine vessel, I meant that nine-tenths should be submerged: consequently it ought only to displace nine-tenths of its bulk, that is to say, only to weigh that number of tons. I ought not, therefore, to have exceeded that weight, constructing it on the aforesaid dimensions.«Lorsque j’ai fait les plans de ce navire destiné à une navigation sous-marine, j’ai voulu, qu’en équilibre dans l’eau il plongeât des neuf dixièmes, et qu’il émergeât d’un dixième seulement. Par conséquent, il ne devait déplacer dans ces conditions que les neuf dixièmes de son volume, soit treize cent cinquante-six mètres cubes et quarante-huit centièmes, c’est-à-dire ne peser que ce même nombre de tonneaux. J’ai donc dû ne pas dépasser ce poids en le construisant suivant les dimensions susdites.
“The Nautilus is composed of two hulls, one inside, the other outside, joined by T-shaped irons, which render it very strong. Indeed, owing to this cellular arrangement it resists like a block, as if it were solid. Its sides cannot yield; it coheres spontaneously, and not by the closeness of its rivets; and its perfect union of the materials enables it to defy the roughest seas.«Le Nautilus se compose de deux coques, l’une intérieure, l’autre extérieure, réunies entre elles par des fers en T qui lui donnent une rigidité extrême. En effet, grâce à cette disposition cellulaire, il résiste comme un bloc, comme s’il était plein. Son bordé ne peut céder; il adhère par lui-même et non par le serrage des rivets, et l’homogénéité de sa construction, due au parfait assemblage des matériaux, lui permet de défier les mers les plus violentes.
“These two hulls are composed of steel plates, whose density is from .7 to .8 that of water. The first is not less than two inches and a half thick and weighs 394 tons. The second envelope, the keel, twenty inches high and ten thick, weighs only sixty-two tons. The engine, the ballast, the several accessories and apparatus appendages, the partitions and bulkheads, weigh 961.62 tons. Do you follow all this?”«Ces deux coques sont fabriquées en tôle d’acier dont la densité par rapport à l’eau est de sept, huit dixièmes. La première n’a pas moins de cinq centimètres d’épaisseur, et pèse trois cent quatre-vingt-quatorze tonneaux quatre-vingt-seize centièmes. La seconde enveloppe, la quille, haute de cinquante centimètres et large de vingt-cinq, pesant, à elle seule, soixante-deux tonneaux, la machine, le lest, les divers accessoires et aménagements, les cloisons et les étrésillons intérieurs, ont un poids de neuf cent soixante-et-un tonneaux soixante-deux centièmes, qui, ajoutés aux trois cent quatre-vingt-quatorze tonneaux et quatre-vingt-seize centièmes, forment le total exigé de treize cent cinquante-six tonneaux et quarante-huit centièmes. Est-ce entendu?
“I do.”—C’est entendu, répondis-je.
“Then, when the Nautilus is afloat under these circumstances, one-tenth is out of the water. Now, if I have made reservoirs of a size equal to this tenth, or capable of holding 150 tons, and if I fill them with water, the boat, weighing then 1,507 tons, will be completely immersed. That would happen, Professor. These reservoirs are in the lower part of the Nautilus. I turn on taps and they fill, and the vessel sinks that had just been level with the surface.”—Donc, reprit le capitaine, lorsque le Nautilus se trouve à flot dans ces conditions, il émerge d’un dixième. Or, si j’ai disposé des réservoirs d’une capacité égale à ce dixième, soit d’une contenance de cent cinquante tonneaux et soixante-douze centièmes, et si je les remplis d’eau, le bateau déplaçant alors quinze cent sept tonneaux, ou les pesant, sera complétement immergé. C’est ce qui arrive, monsieur le professeur. Ces réservoirs existent en abord dans les parties inférieures du Nautilus. J’ouvre des robinets, ils se remplissent, et le bateau s’enfonçant vient affleurer la surface de l’eau.
“Well, Captain, but now we come to the real difficulty. I can understand your rising to the surface; but, diving below the surface, does not your submarine contrivance encounter a pressure, and consequently undergo an upward thrust of one atmosphere for every thirty feet of water, just about fifteen pounds per square inch?”—Bien, capitaine, mais nous arrivons alors à la véritable difficulté. Que vous puissiez affleurer la surface de l’Océan, je le comprends. Mais plus bas, en plongeant au-dessous de cette surface, votre appareil sous-marin ne va-t-il pas rencontrer une pression et par conséquent subir une poussée de bas en haut qui doit être évaluée à une atmosphère par trente pieds d’eau, soit environ un kilogramme par centimètre carré?
“Just so, sir.”—Parfaitement, monsieur.
“Then, unless you quite fill the Nautilus, I do not see how you can draw it down to those depths.”—Donc, à moins que vous ne remplissiez le Nautilus en entier, je ne vois pas comment vous pouvez l’entraîner au sein des masses liquides.
“Professor, you must not confound statics with dynamics or you will be exposed to grave errors. There is very little labour spent in attaining the lower regions of the ocean, for all bodies have a tendency to sink. When I wanted to find out the necessary increase of weight required to sink the Nautilus, I had only to calculate the reduction of volume that sea-water acquires according to the depth.”—Monsieur le professeur, répondit le capitaine Nemo, il ne faut pas confondre la statique avec la dynamique, sans quoi l’on s’expose à de graves erreurs. Il y a très-peu de travail à dépenser pour atteindre les basses régions de l’Océan, car les corps ont une tendance à devenir «fondriers.» Suivez mon raisonnement. —Je vous écoute, capitaine.
—Lorsque j’ai voulu déterminer l’accroissement de poids qu’il faut donner au Nautilus pour l’immerger, je n’ai eu à me préoccuper que de la réduction du volume que l’eau de mer éprouve à mesure que ses couches deviennent de plus en plus profondes.
“That is evident.”—C’est évident, répondis-je.
“Now, if water is not absolutely incompressible, it is at least capable of very slight compression. Indeed, after the most recent calculations this reduction is only .000436 of an atmosphere for each thirty feet of depth. If we want to sink 3,000 feet, I should keep account of the reduction of bulk under a pressure equal to that of a column of water of a thousand feet. The calculation is easily verified. Now, I have supplementary reservoirs capable of holding a hundred tons. Therefore I can sink to a considerable depth. When I wish to rise to the level of the sea, I only let off the water, and empty all the reservoirs if I want the Nautilus to emerge from the tenth part of her total capacity.”—Or, si l’eau n’est pas absolument incompressible, elle est, du moins, très-peu compressible. En effet, d’après les calculs les plus récents, cette réduction n’est que de quatre cent trente-six dix millionnièmes par atmosphère, ou par chaque trente pieds de profondeur. S’agit-il d’aller à mille mètres, je tiens compte alors de la réduction du volume sous une pression équivalente à celle d’une colonne d’eau de mille mètres, c’est-à-dire sous une pression de cent atmosphères. Cette réduction sera alors de quatre cent trente-six cent millièmes. Je devrai donc accroître le poids de façon à peser quinze cent treize tonneaux soixante-dix-sept centièmes, au lieu de quinze cent sept tonneaux deux dixièmes. L’augmentation ne sera conséquemment que de six tonneaux cinquante-sept centièmes.
—Seulement?
—Seulement, monsieur Aronnax, et lee calcul est facile à vérifier. Or, j’ai des réservoirs supplémentaires capables d’embarquer cent tonneaux. Je puis donc descendre à des profondeurs considérables. Lorsque je veux remonter à la surface et l’affleurer, il me suffit de chasser cette eau, et de vider entièrement tous les réservoirs, si je désire que le Nautilus émerge du dixième de sa capacité totale.»
I had nothing to object to these reasonings.A ces raisonnements appuyés sur des chiffres, je n’avais rien à objecter.
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“I admit your calculations, Captain,” I replied; “I should be wrong to dispute them since daily experience confirms them; but I foresee a real difficulty in the way.”«J’admets vos calculs, capitaine, répondis-je, et j’aurais mauvaise grâce à les contester, puisque l’expérience leur donne raison chaque jour. Mais je pressens actuellement en présence une difficulté réelle.
“What, sir?”—Laquelle, monsieur?
“When you are about 1,000 feet deep, the walls of the Nautilus bear a pressure of 100 atmospheres. If, then, just now you were to empty the supplementary reservoirs, to lighten the vessel, and to go up to the surface, the pumps must overcome the pressure of 100 atmospheres, which is 1,500 lbs. per square inch. From that a power——”—Lorsque vous êtes par mille mètres de profondeur, les parois du Nautilus supportent une pression de cent atmosphères. Si donc, à ce moment, vous voulez vider les réservoirs supplémentaires pour alléger votre bateau et remonter à la surface, il faut que les pompes vainquent cette pression de cent atmosphères, qui est de cent kilogrammes par centimètre carré. De là une puissance…
“That electricity alone can give,” said the Captain, hastily. “I repeat, sir, that the dynamic power of my engines is almost infinite. The pumps of the Nautilus have an enormous power, as you must have observed when their jets of water burst like a torrent upon the Abraham Lincoln. Besides, I use subsidiary reservoirs only to attain a mean depth of 750 to 1,000 fathoms, and that with a view of managing my machines. Also, when I have a mind to visit the depths of the ocean five or six mlles below the surface, I make use of slower but not less infallible means.”—Que l’électricité seule pouvait me donner, se hâta de dire le capitaine Nemo. Je vous répète, monsieur, que le pouvoir dynamique de mes machines est à peu près infini. Les pompes du Nautilus ont une force prodigieuse, et vous avez dû le voir, quand leurs colonnes d’eau se sont précipitées comme un torrent sur l’Abraham-Lincoln. D’ailleurs, je ne me sers des réservoirs supplémentaires que pour atteindre des profondeurs moyennes de quinze cent à deux mille mètres, et cela dans le but de ménager mes appareils. Aussi, lorsque la fantaisie me prend de visiter les profondeurs de l’Océan à deux ou trois lieues au-dessous de sa surface, j’emploie des manœuvres plus longues, mais non moins infaillibles.
“What are they, Captain?”—Lesquelles, capitaine? demandai-je.
“That involves my telling you how the Nautilus is worked.”—Ceci m’amène naturellement à vous dire comment se manœuvre le Nautilus.
“I am impatient to learn.”—Je suis impatient de l’apprendre.
“To steer this boat to starboard or port, to turn, in a word, following a horizontal plan, I use an ordinary rudder fixed on the back of the stern-post, and with one wheel and some tackle to steer by. But I can also make the Nautilus rise and sink, and sink and rise, by a vertical movement by means of two inclined planes fastened to its sides, opposite the centre of flotation, planes that move in every direction, and that are worked by powerful levers from the interior. If the planes are kept parallel with the boat, it moves horizontally. If slanted, the Nautilus, according to this inclination, and under the influence of the screw, either sinks diagonally or rises diagonally as it suits me. And even if I wish to rise more quickly to the surface, I ship the screw, and the pressure of the water causes the Nautilus to rise vertically like a balloon filled with hydrogen.”—Pour gouverner ce bateau sur tribord, sur bâbord, pour évoluer, en un mot, suivant un plan horizontal, je me sers d’un gouvernail ordinaire à large safran, fixé sur l’arrière de l’étambot, et qu’une roue et des palans font agir. Mais je puis aussi mouvoir le Nautilus de bas en haut et de haut en bas, dans un plan vertical, au moyen de deux plans inclinés, attachés à ses flancs sur son centre de flottaison, plans mobiles, aptes à prendre toutes les positions, et qui se manœuvrent de l’intérieur au moyen de leviers puissants. Ces plans sont-ils maintenus parallèles au bateau, celui-ci se meut horizontalement. Sont-ils inclinés, le Nautilus, suivant la disposition de cette inclinaison et sous la poussée de son hélice, ou s’enfonce suivant une diagonale aussi allongée qu’il me convient, ou remonte suivant cette diagonale. Et même, si je veux revenir plus rapidement à la surface, j’embraye l’hélice, et la pression des eaux fait remonter verticalement le Nautilus comme un ballon qui, gonflé d’hydrogène, s’élève rapidement dans les airs.
“Bravo, Captain! But how can the steersman follow the route in the middle of the waters?”—Bravo! capitaine, m’écriai-je. Mais comment le timonier peut-il suivre la route que vous lui donnez au milieu des eaux?
“The steersman is placed in a glazed box, that is raised about the hull of the Nautilus, and furnished with lenses.”—Le timonier est placé dans une cage vitrée, qui fait saillie à la partie supérieure de la coque du Nautilus, et que garnissent des verres lenticulaires.
“Are these lenses capable of resisting such pressure?”—Des verres capables de résister à de telles pressions?
“Perfectly. Glass, which breaks at a blow, is, nevertheless, capable of offering considerable resistance. During some experiments of fishing by electric light in 1864 in the Northern Seas, we saw plates less than a third of an inch thick resist a pressure of sixteen atmospheres. Now, the glass that I use is not less than thirty times thicker.”—Parfaitement. Le cristal, fragile au choc, offre cependant une résistance considérable. Dans des expériences de pêche à la lumière électrique faites en 1864, au milieu des mers du Nord, on a vu des plaques de cette matière, sous une épaisseur de sept millimètres seulement, résister à une pression de seize atmosphères, tout en laissant passer de puissants rayons calorifiques qui lui répartissaient inégalement la chaleur. Or, les verres dont je me sers n’ont pas moins de vingt-et-un centimètres à leur centre, c’est-à-dire trente fois cette épaisseur.
“Granted. But, after all, in order to see, the light must exceed the darkness, and in the midst of the darkness in the water, how can you see?”—Admis, capitaine Nemo; mais enfin, pour voir, il faut que la lumière chasse les ténèbres, et je me demande comment au milieu de l’obscurité des eaux…
“Behind the steersman’s cage is placed a powerful electric reflector, the rays from which light up the sea for half a mile in front.”—En arrière de la cage du timonier est placé un puissant réflecteur électrique, dont les rayons illuminent la mer à un demi-mille de distance.
“Ah! bravo, bravo, Captain! Now I can account for this phosphorescence in the supposed narwhal that puzzled us so. I now ask you if the boarding of the Nautilus and of the Scotia, that has made such a noise, has been the result of a chance rencontre?”—Ah! bravo, trois fois bravo! capitaine. Je m’explique maintenant cette phosphorescence du prétendu narwal, qui a tant intrigué les savants! A ce propos, je vous demanderai si l’abordage du Nautilus et du Scotia, qui a eu un si grand retentissement, a été le résultat d’une rencontre fortuite?
“Quite accidental, sir. I was sailing only one fathom below the surface of the water when the shock came. It had no bad result.”—Purement fortuite, monsieur. Je naviguais à deux mètres au-dessous de la surface des eaux, quand le choc s’est produit. J’ai d’ailleurs vu qu’il n’avait eu aucun résultat fâcheux.
“None, sir. But now, about your rencontre with the Abraham Lincoln?”—Aucun, monsieur. Mais quant à votre rencontre avec l’Abraham-Lincoln?…
“Professor, I am sorry for one of the best vessels in the American navy; but they attacked me, and I was bound to defend myself. I contented myself, however, with putting the frigate hors de combat; she will not have any difficulty in getting repaired at the next port.”—Monsieur le professeur, j’en suis fâché pour l’un des meilleurs navires de cette brave marine américaine, mais on m’attaquait et j’ai dû me défendre! Je me suis contenté, toutefois, de mettre la frégate hors d’état de me nuire,—elle ne sera pas gênée de réparer ses avaries au port le plus prochain.
“Ah, Commander! your Nautilus is certainly a marvellous boat.”—Ah! commandant, m’écriai-je avec conviction, c’est vraiment un merveilleux bateau que votre Nautilus!
“Yes, Professor; and I love it as if it were part of myself. If danger threatens one of your vessels on the ocean, the first impression is the feeling of an abyss above and below. On the Nautilus men’s hearts never fail them. No defects to be afraid of, for the double shell is as firm as iron; no rigging to attend to; no sails for the wind to carry away; no boilers to burst; no fire to fear, for the vessel is made of iron, not of wood; no coal to run short, for electricity is the only mechanical agent; no collision to fear, for it alone swims in deep water; no tempest to brave, for when it dives below the water it reaches absolute tranquillity. There, sir! that is the perfection of vessels! And if it is true that the engineer has more confidence in the vessel than the builder, and the builder than the captain himself, you understand the trust I repose in my Nautilus; for I am at once captain, builder, and engineer.”—Oui, monsieur le professeur, répondit avec une véritable émotion le capitaine Nemo, et je l’aime comme la chair de ma chair! Si tout est danger sur un de vos navires soumis aux hasards de l’Océan, si sur cette mer, la première impression est le sentiment de l’abîme, comme l’a si bien dit le Hollandais Jansen, au-dessous et à bord du Nautilus, le cœur de l’homme n’a plus rien à redouter. Pas de déformation à craindre, car la double coque de ce bateau a la rigidité du fer; pas de gréement que le roulis ou le tangage fatiguent; pas de voiles que le vent emporte; pas de chaudières que la vapeur déchire; pas d’incendie à redouter, puisque cet appareil est fait de tôle et non de bois; pas de charbon qui s’épuise, puisque l’électricité est son agent mécanique; pas de rencontre à redouter, puisqu’il est seul à naviguer dans les eaux profondes; pas de tempête à braver, puisqu’il trouve à quelques mètres au-dessous des eaux l’absolue tranquillité! Voilà, monsieur. Voilà le navire par excellence! Et s’il est vrai que l’ingénieur ait plus de confiance dans le bâtiment que le constructeur, et le constructeur plus que le capitaine lui-même, comprenez donc avec quel abandon je me fie à mon Nautilus, puisque j’en suis tout à la fois le capitaine, le constructeur et l’ingénieur!»
Le capitaine Nemo parlait avec une éloquence entraînante. Le feu de son regard, la passion de son geste, le transfiguraient. Oui! il aimait son navire comme un père aime son enfant!
Mais une question, indiscrète peut-être, se posait naturellement, et je ne pus me retenir de la lui faire.
«Vous êtes donc ingénieur, capitaine Nemo?
—Oui, monsieur le professeur, me répondit-il, j’ai étudié à Londres, à Paris, à New-York, du temps que j’étais un habitant des continents de la terre.
“But how could you construct this wonderful Nautilus in secret?”—Mais comment avez-vous pu construire, en secret, cet admirable Nautilus?
“Each separate portion, M. Aronnax, was brought from different parts of the globe.”—Chacun de ses morceaux, monsieur Aronnax, m’est arrivé d’un point différent du globe, et sous une destination déguisée.
Sa quille a été forgée au Creusot, son arbre d’hélice chez Pen et Co, de Londres, les plaques de tôle de sa coque chez Leard, de Liverpool, son hélice chez Scott, de Glasgow. Ses réservoirs ont été fabriqués par Cail et Co, de Paris, sa machine par Krüpp, en Prusse, son éperon dans les ateliers de Motala, en Suède, ses instruments de précision chez Hart frères, de New-York, etc., et chacun de ces fournisseurs a reçu mes plans sous des noms divers.
“But these parts had to be put together and arranged?”—Mais, repris-je, ces morceaux ainsi fabriqués, il a fallu les monter, les ajuster?
“Professor, I had set up my workshops upon a desert island in the ocean. There my workmen, that is to say, the brave men that I instructed and educated, and myself have put together our Nautilus. Then, when the work was finished, fire destroyed all trace of our proceedings on this island, that I could have jumped over if I had liked.”—Monsieur le professeur, j’avais établi mes ateliers sur un îlot désert, en plein Océan. Là, mes ouvriers, c’est-à-dire mes braves compagnons que j’ai instruits et formés, et moi, nous avons achevé notre Nautilus. Puis, l’opération terminée, le feu a détruit toute trace de notre passage sur cet îlot que j’aurais fais sauter, si je l’avais pu.
“Then the cost of this vessel is great?”—Alors il m’est permis de croire que le prix de revient de ce bâtiment est excessif?
“M. Aronnax, an iron vessel costs L145 per ton. Now the Nautilus weighed 1,500. It came therefore to L67,500, and L80,000 more for fitting it up, and about L200,000, with the works of art and the collections it contains.”—Monsieur Aronnax, un navire en fer coûte onze cent vingt-cinq francs par tonneau. Or, le Nautilus en jauge quinze cents. Il revient donc à seize cent quatre-vingt-sept mille francs, soit deux millions y compris son aménagement, soit quatre ou cinq millions avec les œuvres d’art et les collections qu’il renferme.
“One last question, Captain Nemo.”—Une dernière question, capitaine Nemo.
“Ask it, Professor.”—Faites, monsieur le professeur.
“You are rich?”—Vous êtes donc riche?
“Immensely rich, sir; and I could, without missing it, pay the national debt of France.”—Riche à l’infini, monsieur, et je pourrais, sans me gêner, payer les dix milliards de dettes de la France!»
I stared at the singular person who spoke thus. Was he playing upon my credulity? The future would decide that.Je regardai fixement le bizarre personnage qui me parlait ainsi. Abusait-il de ma crédulité? L’avenir devait me l’apprendre.
CHAPTER XIII
THE BLACK RIVER
CHAPITRE XIV
LE FLEUVE NOIR.
The portion of the terrestrial globe which is covered by water is estimated at upwards of eighty millions of acres. This fluid mass comprises two billions two hundred and fifty millions of cubic miles, forming a spherical body of a diameter of sixty leagues, the weight of which would be three quintillions of tons. To comprehend the meaning of these figures, it is necessary to observe that a quintillion is to a billion as a billion is to unity; in other words, there are as many billions in a quintillion as there are units in a billion. This mass of fluid is equal to about the quantity of water which would be discharged by all the rivers of the earth in forty thousand years.La portion du globe terrestre occupée par les eaux est évaluée à trois millions huit cent trente-deux milles cinq cent cinquante-huit myriamètres carrés, soit plus de trente-huit millions d’hectares. Cette masse liquide comprend deux milliards deux cent cinquante millions de milles cubes, et formerait une sphère d’un diamètre de soixante lieues dont le poids serait de trois quintillions de tonneaux. Et, pour comprendre ce nombre, il faut se dire que le quintillion est au milliard ce que le milliard est à l’unité, c’est-à-dire qu’il y a autant de milliards dans un quintillion que d’unités dans un milliard. Or, cette masse liquide, c’est à peu près la quantité d’eau que verseraient tous les fleuves de la terre pendant quarante mille ans.
During the geological epochs the ocean originally prevailed everywhere. Then by degrees, in the silurian period, the tops of the mountains began to appear, the islands emerged, then disappeared in partial deluges, reappeared, became settled, formed continents, till at length the earth became geographically arranged, as we see in the present day. The solid had wrested from the liquid thirty-seven million six hundred and fifty-seven square miles, equal to twelve billions nine hundred and sixty millions of acres.Durant les époques géologiques, à la période du feu succéda la période de l’eau. L’Océan fut d’abord universel. Puis, peu à peu, dans les temps siluriens, des sommets de montagnes apparurent, des îles émergèrent, disparurent sous des déluges partiels, se montrèrent à nouveau, se soudèrent, formèrent des continents, et enfin les terres se fixèrent géographiquement telles que nous les voyons. Le solide avait conquis sur le liquide trente-sept millions six cent cinquante-sept milles carrés, soit douze mille neuf cent seize millions d’hectares.
The shape of continents allows us to divide the waters into five great portions: the Arctic or Frozen Ocean, the Antarctic, or Frozen Ocean, the Indian, the Atlantic, and the Pacific Oceans.La configuration des continents permet de diviser les eaux en cinq grandes parties: l’Océan glacial arctique, l’Océan glacial antarctique, l’Océan indien, l’Océan atlantique, l’Océan pacifique.
The Pacific Ocean extends from north to south between the two Polar Circles, and from east to west between Asia and America, over an extent of 145 degrees of longitude. It is the quietest of seas; its currents are broad and slow, it has medium tides, and abundant rain. Such was the ocean that my fate destined me first to travel over under these strange conditions.
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L’Océan pacifique s’étend du nord au sud entre les deux cercles polaires, et de l’ouest à l’est entre l’Asie et l’Amérique sur une étendue de cent quarante-cinq degrés en longitude. C’est la plus tranquille des mers; ses courants sont larges et lents, ses marées médiocres, ses pluies abondantes. Tel était l’Océan que ma destinée m’appelait d’abord à parcourir dans les plus étranges conditions.
“Sir,” said Captain Nemo, “we will, if you please, take our bearings and fix the starting-point of this voyage. It is a quarter to twelve; I will go up again to the surface.”«Monsieur le professeur, me dit le capitaine Nemo, nous allons, si vous le voulez bien, relever exactement notre position, et fixer le point de départ de ce voyage. Il est midi moins le quart. Je vais remonter à la surface des eaux.»
The Captain pressed an electric clock three times. The pumps began to drive the water from the tanks; the needle of the manometer marked by a different pressure the ascent of the Nautilus, then it stopped.Le capitaine pressa trois fois un timbre électrique. Les pompes commencèrent à chasser l’eau des réservoirs; l’aiguille du manomètre marqua par les différentes pressions le mouvement ascensionnel du Nautilus, puis elle s’arrêta.
“We have arrived,” said the Captain.«Nous sommes arrivés,» dit le capitaine.
I went to the central staircase which opened on to the platform, clambered up the iron steps, and found myself on the upper part of the Nautilus.Je me rendis à l’escalier central qui aboutissait à la plate-forme. Je gravis les marches de métal, et, par les panneaux ouverts, j’arrivai sur la partie supérieure du Nautilus.
The platform was only three feet out of water. The front and back of the Nautilus was of that spindle-shape which caused it justly to be compared to a cigar. I noticed that its iron plates, slightly overlaying each other, resembled the shell which clothes the bodies of our large terrestrial reptiles. It explained to me how natural it was, in spite of all glasses, that this boat should have been taken for a marine animal.La plate-forme émergeait de quatre-vingts centimètres seulement. L’avant et l’arrière du Nautilus présentaient cette disposition fusiforme qui le faisait justement comparer à un long cigare. Je remarquai que ses plaques de tôles, imbriquées légèrement, ressemblaient aux écailles qui revêtent le corps des grands reptiles terrestres. Je m’expliquai donc très-naturellement que, malgré les meilleures lunettes, ce bateau eût toujours été pris pour un animal marin.
Toward the middle of the platform the longboat, half buried in the hull of the vessel, formed a slight excrescence. Fore and aft rose two cages of medium height with inclined sides, and partly closed by thick lenticular glasses; one destined for the steersman who directed the Nautilus, the other containing a brilliant lantern to give light on the road.Vers le milieu de la plate-forme, le canot, à demi-engagé dans la coque du navire, formait une légère extumescence. En avant et en arrière s’élevaient deux cages de hauteur médiocre, à parois inclinées, et en partie fermées par d’épais verres lenticulaires: l’une destinée au timonier qui dirigeait le Nautilus, l’autre où brillait le puissant fanal électrique qui éclairait sa route.
The sea was beautiful, the sky pure. Scarcely could the long vehicle feel the broad undulations of the ocean. A light breeze from the east rippled the surface of the waters. The horizon, free from fog, made observation easy. Nothing was in sight. Not a quicksand, not an island. A vast desert.La mer était magnifique, le ciel pur. A peine si le long véhicule ressentait les larges ondulations de l’Océan. Une légère brise de l’est ridait la surface des eaux. L’horizon, dégagé de brumes, se prêtait aux meilleures observations. Nous n’avions rien en vue. Pas un écueil, pas un îlot. Plus d’Abraham-Lincoln. L’immensité déserte.
Captain Nemo, by the help of his sextant, took the altitude of the sun, which ought also to give the latitude. He waited for some moments till its disc touched the horizon. Whilst taking observations not a muscle moved, the instrument could not have been more motionless in a hand of marble.Le capitaine Nemo, muni de son sextant, prit la hauteur du soleil, qui devait lui donner sa latitude. Il attendit pendant quelques minutes que l’astre vînt affleurer le bord de l’horizon. Tandis qu’il observait, pas un de ses muscles ne tressaillait, et l’instrument n’eût pas été plus immobile dans une main de marbre.
“Twelve o’clock, sir,” said he. “When you like——”«Midi, dit-il. Monsieur le professeur, quand vous voudrez?…»
I cast a last look upon the sea, slightly yellowed by the Japanese coast, and descended to the saloon.Je jetai un dernier regard sur cette mer un peu jaunâtre des attérages japonais, et je redescendis au grand salon.
Là, le capitaine fit son point et calcula chronométriquement sa longitude, qu’il contrôla par de précédentes observations d’angles horaires. Puis il me dit:
«Monsieur Aronnax, nous sommes par cent trente-sept degrés et quinze minutes de longitude à l’ouest…
—De quel méridien? demandai-je vivement, espérant que la réponse du capitaine m’indiquerait peut-être sa nationalité.
—Monsieur, me répondit-il, j’ai divers chronomètrese réglés sur les méridiens de Paris, de Greenwich et de Washington. Mais, en votre honneur je me servirai de celui de Paris.»
Cette réponse ne m’apprenait rien. Je m’inclinai, et le commandant reprit:
«Trente-sept degrés et quinze minutes de longitude à l’ouest du méridien de Paris, et par trente degrés et sept minutes de latitude nord, c’est-à-dire à trois cents milles environ des côtes du Japon. C’est aujourd’hui 8 novembre, à midi, que commence notre voyage d’exploration sous les eaux.
—Dieu nous garde! répondis-je.
“And now, sir, I leave you to your studies,” added the Captain; “our course is E.N.E., our depth is twenty-six fathoms. Here are maps on a large scale by which you may follow it. The saloon is at your disposal, and, with your permission, I will retire.” Captain Nemo bowed, and I remained alone, lost in thoughts all bearing on the commander of the Nautilus.—Et maintenant, monsieur le professeur, ajouta le capitaine, je vous laisse à vos études. J’ai donné la route à l’est-nord-est par cinquante mètres de profondeur. Voici des cartes à grands points, où vous pourrez la suivre. Le salon est à votre disposition, et je vous demande la permission de me retirer.» Le capitaine Nemo me salua. Je restai seul, absorbé dans mes pensées.
Toutes se portaient sur ce commandant du Nautilus. Saurais-je jamais à quelle nation appartenait cet homme étrange qui se vantait de n’appartenir à aucune? Cette haine qu’il avait vouée à l’humanité, cette haine qui cherchait peut-être des vengeances terribles, qui l’avait provoquée? Était-il un de ces savants méconnus, un de ces génies «auxquels on a fait du chagrin,» suivant l’expression de Conseil, un Galilée moderne, ou bien un de ces hommes de science comme l’américain Maury, dont la carrière a été brisée par des révolutions politiques? Je ne pouvais encore le dire. Moi que le hasard venait de jeter à son bord, moi dont il tenait la vie entre les mains, il m’accueillait froidement, mais hospitalièrement. Seulement, il n’avait jamais pris la main que je lui tendais. Il ne m’avait jamais tendu la sienne.
For a whole hour was I deep in these reflections, seeking to pierce this mystery so interesting to me. Then my eyes fell upon the vast planisphere spread upon the table, and I placed my finger on the very spot where the given latitude and longitude crossed.Une heure entière, je demeurai plongé dans ces réflexions, cherchant à percer ce mystère si intéressant pour moi. Puis mes regards se fixèrent sur le vaste planisphère étalé sur la table, et je plaçai le doigt sur le point même où se croisaient la longitude et la latitude observées.
The sea has its large rivers like the continents. They are special currents known by their temperature and their colour. The most remarkable of these is known by the name of the Gulf Stream. Science has decided on the globe the direction of five principal currents: one in the North Atlantic, a second in the South, a third in the North Pacific, a fourth in the South, and a fifth in the Southern Indian Ocean. It is even probable that a sixth current existed at one time or another in the Northern Indian Ocean, when the Caspian and Aral Seas formed but one vast sheet of water.La mer a ses fleuves comme les continents. Ce sont des courants spéciaux, reconnaissables à leur température, à leur couleur, et dont le plus remarquable est connu sous le nom de courant du Gulf-Stream. La science a déterminé, sur le globe, la direction de cinq courants principaux: un dans l’Atlantique nord, un second dans l’Atlantique sud, un troisième dans le Pacifique nord, un quatrième dans le Pacifique sud, et un cinquième dans l’Océan indien sud. Il est même probable qu’un sixième courant existait autrefois dans l’Océan indien nord, lorsque les mers Caspienne et d’Aral, réunies aux grands lacs de l’Asie, ne formaient qu’une seule et même étendue d’eau.
At this point indicated on the planisphere one of these currents was rolling, the Kuro-Scivo of the Japanese, the Black River, which, leaving the Gulf of Bengal, where it is warmed by the perpendicular rays of a tropical sun, crosses the Straits of Malacca along the coast of Asia, turns into the North Pacific to the Aleutian Islands, carrying with it trunks of camphor-trees and other indigenous productions, and edging the waves of the ocean with the pure indigo of its warm water. It was this current that the Nautilus was to follow. I followed it with my eye; saw it lose itself in the vastness of the Pacific, and felt myself drawn with it, when Ned Land and Conseil appeared at the door of the saloon.Or, au point indiqué sur le planisphère, se déroulait l’un de ces courants, le Kuro-Scivo des Japonais, le Fleuve-Noir, qui, sorti du golfe du Bengale où le chauffent les rayons perpendiculaires du soleil des Tropiques, traverse le détroit de Malacca, prolonge la côte d’Asie, s’arrondit dans le Pacifique nord jusqu’aux îles Aléoutiennes, charriant des troncs de camphriers et autres produits indigènes, et tranchant par le pur indigo de ses eaux chaudes avec les flots de l’Océan. C’est ce courant que le Nautilus allait parcourir. Je le suivais du regard, je le voyais se perdre dans l’immensité du Pacifique, et je me sentais entraîner avec lui, quand Ned Land et Conseil apparurent à la porte du salon.
My two brave companions remained petrified at the sight of the wonders spread before them.Mes deux braves compagnons restèrent pétrifiés à la vue des merveilles entassées devant leurs yeux.
“Where are we, where are we?” exclaimed the Canadian. “In the museum at Quebec?”«Où sommes-nous? où sommes-nous? s’écria le Canadien. Au muséum de Québec?
—S’il plaît à monsieur, répliqua Conseil, ce serait plutôt à l’hôtel du Sommerard!
“My friends,” I answered, making a sign for them to enter, “you are not in Canada, but on board the Nautilus, fifty yards below the level of the sea.”—Mes amis, répondis-je en leur faisant signe d’entrer, vous n’êtes ni au Canada ni en France, mais bien à bord du Nautilus, et à cinquante mètres au-dessous du niveau de la mer.
—Il faut croire monsieur, puisque monsieur l’affirme, répliqua Conseil; mais franchement, ce salon est fait pour étonner même un Flamand comme moi.
—Étonne-toi, mon ami, et regarde, car, pour un classificateur de ta force, il y a de quoi travailler ici.»
Je n’avais pas besoin d’encourager Conseil. Le brave garçon, penché sur les vitrines, murmurait déjà des mots de la langue des naturalistes: classe des Gastéropodes, famille des Buccinoïdes, genre des Porcelaines, espèces des Cypræa Madagascariensis, etc.
Pendant ce temps, Ned Land, assez peu conchyliologue, m’interrogeait sur mon entrevue avec le capitaine Nemo. Avais-je découvert qui il était, d’où il venait, où il allait, vers quelles profondeurs il nous entraînait? enfin mille questions auxquelles je n’avais pas le temps de répondre.
Je lui appris tout ce que je savais, ou plutôt, tout ce que je ne savais pas, et je lui demandai ce qu’il avait entendu ou vu de son côté.
«Rien vu, rien entendu, répondit le Canadien! Je n’ai pas même aperçu l’équipage de ce bateau. Est-ce que, par hasard, il serait électrique aussi, lui?
—Électrique!
“But, M. Aronnax,” said Ned Land, “can you tell me how many men there are on board? Ten, twenty, fifty, a hundred?”—Par ma foi! on serait tenté de le croire. Mais vous, monsieur Aronnax, demanda Ned Land, qui avait toujours son idée, vous ne pouvez me dire combien d’hommes il y a à bord? Dix, vingt, cinquante, cent?
“I cannot answer you, Mr. Land; it is better to abandon for a time all idea of seizing the Nautilus or escaping from it. This ship is a masterpiece of modern industry, and I should be sorry not to have seen it. Many people would accept the situation forced upon us, if only to move amongst such wonders. So be quiet and let us try and see what passes around us.”—Je ne saurais vous répondre, maître Land. D’ailleurs, croyez-moi, abandonnez, pour le moment, cette idée de vous emparer du Nautilus ou de le fuir. Ce bateau est un des chefs-d’œuvre de l’industrie moderne, et je regretterais de ne pas l’avoir vu! Bien des gens accepteraient la situation qui nous est faite, ne fût-ce que pour se promener à travers ces merveilles. Ainsi, tenez-vous tranquille, et tâchons de voir ce qui se passe autour de nous.
“See!” exclaimed the harpooner, “but we can see nothing in this iron prison! We are walking—we are sailing—blindly.”—Voir! s’écria le harponneur! mais on ne voit rien, on ne verra rien de cette prison de tôle! Nous marchons, nous naviguons en aveugles…»
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Ned Land had scarcely pronounced these words when all was suddenly darkness. The luminous ceiling was gone, and so rapidly that my eyes received a painful impression.Ned Land prononçait ces derniers mots, quand l’obscurité se fit subitement, mais une obscurité absolue. Le plafond lumineux s’éteignit, et si rapidement, que mes yeux en éprouvèrent une impression douloureuse, analogue à celle que produit le passage contraire des profondes ténèbres à la plus éclatante lumière.
We remained mute, not stirring, and not knowing what surprise awaited us, whether agreeable or disagreeable. A sliding noise was heard: one would have said that panels were working at the sides of the Nautilus.Nous étions restés muets, ne remuant pas, ne sachant quelle surprise, agréable ou désagréable, nous attendait. Mais un glissement se fit entendre. On eût dit que des panneaux se manœuvraient sur les flancs du Nautilus.
“It is the end of the end!” said Ned Land.«C’est la fin de la fin! dit Ned Land.
—Ordre des Hydroméduses!» murmura Conseil.
Suddenly light broke at each side of the saloon, through two oblong openings. The liquid mass appeared vividly lit up by the electric gleam. Two crystal plates separated us from the sea. At first I trembled at the thought that this frail partition might break, but strong bands of copper bound them, giving an almost infinite power of resistance.Soudain, le jour se fit de chaque côté du salon, à travers deux ouvertures oblongues. Les masses liquides apparurent vivement éclairées par les effluences électriques. Deux plaques de cristal nous séparaient de la mer. Je frémis, d’abord, à la pensée que cette fragile paroi pouvait se briser; mais de fortes armatures de cuivre la maintenaient et lui donnaient une résistance presque infinie.
The sea was distinctly visible for a mile all round the Nautilus. What a spectacle! What pen can describe it? Who could paint the effects of the light through those transparent sheets of water, and the softness of the successive gradations from the lower to the superior strata of the ocean?La mer était distinctement visible dans un rayon d’un mille autour du Nautilus. Quel spectacle! Quelle plume le pourrait décrire! Qui saurait peindre les effets de la lumière à travers ces nappes transparentes, et la douceur de ses dégradations successives jusqu’aux couches inférieures et supérieures de l’Océan!
We know the transparency of the sea and that its clearness is far beyond that of rock-water. The mineral and organic substances which it holds in suspension heightens its transparency. In certain parts of the ocean at the Antilles, under seventy-five fathoms of water, can be seen with surprising clearness a bed of sand. The penetrating power of the solar rays does not seem to cease for a depth of one hundred and fifty fathoms. But in this middle fluid travelled over by the Nautilus, the electric brightness was produced even in the bosom of the waves. It was no longer luminous water, but liquid light.On connaît la diaphanéité de la mer. On sait que sa limpidité l’emporte sur celle de l’eau de roche. Les substances minérales et organiques, qu’elle tient en suspension, accroissent même sa transparence. Dans certaines parties de l’Océan, aux Antilles, cent quarante-cinq mètres d’eau laissent apercevoir le lit de sable avec une surprenante netteté, et la force de pénétration des rayons solaires ne paraît s’arrêter qu’à une profondeur de trois cents mètres. Mais, dans ce milieu fluide que parcourait le Nautilus, l’éclat électrique se produisait au sein même des ondes. Ce n’était plus de l’eau lumineuse, mais de la lumière liquide.
Si l’on admet l’hypothèse d’Erhemberg, qui croit à une illumination phosphorescente des fonds sous-marins, la nature a certainement réservé pour les habitants de la mer l’un de ses plus prodigieux spectacles, et j’en pouvais juger ici par les mille jeux de cette lumière.
On each side a window opened into this unexplored abyss. The obscurity of the saloon showed to advantage the brightness outside, and we looked out as if this pure crystal had been the glass of an immense aquarium.De chaque côté, j’avais une fenêtre ouverte sur ces abîmes inexplorés. L’obscurité du salon faisait valoir la clarté extérieure, et nous regardions comme si ce pur cristal eût été la vitre d’un immense aquarium.
Le Nautilus ne semblait pas bouger. C’est que les points de repère manquaient. Parfois, cependant, les lignes d’eau, divisées par son éperon, filaient devant nos regards avec une vitesse excessive.
Émerveillés, nous étions accoudés devant ces vitrines, et nul de nous n’avait encore rompu ce silence de stupéfaction, quand Conseil dit:
“You wished to see, friend Ned; well, youe see now.”«Vous vouliez voir, ami Ned, eh bien, vous voyez!
“Curious! curious!” muttered the Canadian, who, forgetting his ill-temper, seemed to submit to some irresistible attraction; “and one would come further than this to admire such a sight!”—Curieux! curieux! faisait le Canadien,—qui, oubliant ses colères et ses projets d’évasion, subissait une attraction irrésistible,—et l’on viendrait de plus loin pour admirer ce spectacle!
“Ah!” thought I to myself, “I understand the life of this man; he has made a world apart for himself, in which he treasures all his greatest wonders.”—Ah! m’écriai-je, je comprends la vie de cet homme! Il s’est fait un monde à part qui lui réserve ses plus étonnantes merveilles!
—Mais les poissons? fit observer le Canadien. Je ne vois pas de poissons!
—Que vous importe, ami Ned, répondit Conseil, puisque vous ne les connaissez pas.
—Moi! un pêcheur!» s’écria Ned Land.
Et sur ce sujet, une discussion s’éleva entre les deux amis, car ils connaissaient les poissons, mais chacun d’une façon très-différente.
Tout le monde sait que les poissons forment la quatrième et dernière classe de l’embranchement des vertébrés. On les a très-justement définis: «des vertébrés à circulation double et à sang froid, respirant par des branchies et destinés à vivre dans l’eau.» Ils composent deux séries distinctes: la série des poissons osseux, c’est-à-dire ceux dont l’épine dorsale est faite de vertèbres osseuses, et les poissons cartilagineux, c’est-à-dire ceux dont l’épine dorsale est faite de vertèbres cartilagineuses.
Le Canadien connaissait peut-être cette distinction, mais Conseil en savait bien davantage, et, maintenant, lié d’amitié avec Ned, il ne pouvait admettre qu’il fût moins instruit que lui. Aussi lui dit-il:
«Ami Ned, vous êtes un tueur de poissons, un très-habile pêcheur. Vous avez pris un grand nombre de ces intéressants animaux. Mais je gagerais que vous ne savez pas comment on les classe.
—Si, répondit sérieusement le harponneur. On les classe en poissons qui se mangent et en poissons qui ne se mangent pas!
—Voilà une distinction de gourmand, répondit Conseil. Mais dites-moi si vous connaissez la différence qui existe entre les poissons osseux et les poissons cartilagineux?
—Peut-être bien, Conseil.
—Et la subdivision de ces deux grandes classes?
—Je ne m’en doute pas, répondit le Canadien.
—Eh bien, ami Ned, écoutez et retenez! Les poissons osseux se subdivisent en six ordres: Primo, les acanthoptérygiens, dont la mâchoire supérieure est complète, mobile, et dont les branchies affectent la forme d’un peigne. Cet ordre comprend quinze familles, c’est-à-dire les trois quarts des poissons connus. Type: la perche commune.
—Assez bonne à manger, répondit Ned Land.
—Secundo, reprit Conseil, les abdominaux, qui ont les nageoires ventrales suspendues sous l’abdomen et en arrière des pectorales, sans être attachées aux os de l’épaule,—ordre qui se divise en cinq familles, et qui comprend la plus grande partie des poissons d’eau douce. Type: la carpe, le brochet.
—Peuh! fit le Canadien avec un certain mépris, des poissons d’eau douce!
—Tertio, dit Conseil, les subrachiens, dont les ventrales sont attachées sous les pectorales et immédiatement suspendues aux os de l’épaule. Cet ordre contient quatre familles. Type: plies, limandes, turbots, barbues, soles, etc.
—Excellent! excellent! s’écriait le harponneur, qui ne voulait considérer les poissons qu’au point de vue comestible.
—Quarto, reprit Conseil, sans se démonter, les apodes, au corps allongé, dépourvus de nageoires ventrales, et revêtus d’une peau épaisse et souvent gluante,—ordre qui ne comprend qu’une famille. Type: l’anguille, le gymnote.
—Médiocre! médiocre! répondit Ned Land.
—Quinto, dit Conseil, les lophobranches, qui ont les mâchoires complètes et libres, mais dont les branchies sont formées de petites houppes, disposées par paires le long des arcs branchiaux. Cet ordre ne compte qu’une famille. Type: les hippocampes, les pégases dragons.
—Mauvais! mauvais! répliqua le harponneur.
—Sexto, enfin, dit Conseil, les plectognathes, dont l’os maxillaire est attaché fixement sur le côté de l’intermaxillaire qui forme la mâchoire, et dont l’arcade palatine s’engrène par suture avec le crâne, ce qui la rend immobile,—ordre qui manque de vraies ventrales, et qui se compose de deux familles. Types: les tétrodons, les poissons-lune.
—Bons à déshonorer une chaudière! s’écria le Canadien.
—Avez-vous compris, ami Ned? demanda le savant Conseil.
—Pas le moins du monde, ami Conseil, répondit le harponneur. Mais allez toujours, car vous êtes très-intéressant.
—Quant aux poissons cartilagineux, reprit imperturbablement Conseil, ils ne comprennent que trois ordres.
—Tant mieux, fit Ned.
—Primo, les cyclostomes, dont les mâchoires sont soudées en un anneau mobile, et dont les branchies s’ouvrent par des trous nombreux, ordre ne comprenant qu’une seule famille. Type: la lamproie.
—Faut l’aimer, répondit Ned Land.
—Secundo, les sélaciens, avec branchies semblables à celles des cyclostomes, mais dont la mâchoire inférieure est mobile. Cet ordre, qui est le plus important de la classe, comprend deux familles. Types: la raie et les squales.
—Quoi! s’écria Ned, des raies et des requins dans le même ordre! Eh bien, ami Conseil, dans l’intérêt des raies, je ne vous conseille pas de les mettre ensemble dans le même bocal!
—Tertio, répondit Conseil, les sturioniens, dont les branchies sont ouvertes, comme à l’ordinaire, par une seule fente garnie d’un opercule,—ordre qui comprend quatre genres. Type: l’esturgeon.
—Ah! ami Conseil, vous avez gardé le meilleur pour la fin,—à mon avis, du moins. Et c’est tout?
—Oui, mon brave Ned, répondit Conseil, et remarquez que quand on sait cela, on ne sait rien encore, car les familles se subdivisent en genres, en sous-genres, en espèces, en variétés…
—Eh bien, ami Conseil, dit le harponneur, se penchant sur la vitre du panneau, voici des variétés qui passent!
—Oui! des poissons, s’écria Conseil. On se croirait devant un aquarium!
—Non, répondis-je, car l’aquarium n’est qu’une cage, et ces poissons-là sont libres comme l’oiseau dans l’air.
—Eh bien, ami Conseil, nommez-les donc, nommez-les donc! disait Ned Land.
—Moi, répondit Conseil, je n’en suis pas capable! Cela regarde mon maître!»
Et en effet, le digne garçon, classificateur enragé, n’était point un naturaliste, et je ne sais pas s’il aurait distingué un thon d’une bonite. En un mot, le contraire du Canadien, qui nommait tous ces poissons sans hésiter.
«Un baliste, avais-je dit.
—Et un baliste chinois! répondait Ned Land.
—Genre des balistes, famille des sclérodermes, ordre des plectognathes,» murmurait Conseil.
Décidément, à eux deux, Ned et Conseil auraient fait un naturaliste distingué.
Le Canadien ne s’était pas trompé. Une troupe de balistes, à corps comprimé, à peau grenue, armés d’un aiguillon sur leur dorsale, se jouaient autour du Nautilus, et agitaient les quatre rangées de piquants qui hérissent chaque côté de leur queue. Rien de plus admirable que leur enveloppe, grise par dessus, blanche par dessous, dont les taches d’or scintillaient dans le sombre remous des lames. Entre eux ondulaient des raies, comme une nappe abandonnée aux vents, et parmi elles, j’aperçus, à ma grande joie, cette raie chinoise, jaunâtre à sa partie supérieure, rose tendre sous le ventre, et munie de trois aiguillons en arrière de son œil; espèce rare, et même douteuse au temps de Lacépède, qui ne l’avait jamais vue que dans un recueil de dessins japonais.
For two whole hours an aquatic army escorted the Nautilus. During their games, their bounds, while rivalling each other in beauty, brightness, and velocity, I distinguished the green labre; the banded mullet, marked by a double line of black; the round-tailed goby, of a white colour, with violet spots on the back; the Japanese scombrus, a beautiful mackerel of these seas, with a blue body and silvery head; the brilliant azurors, whose name alone defies description; some banded spares, with variegated fins of blue and yellow; the woodcocks of the seas, some specimens of which attain a yard in length; Japanese salamanders, spider lampreys, serpents six feet long, with eyes small and lively, and a huge mouth bristling with teeth; with many other species.Pendant deux heures, toute une armée aquatique fit escorte au Nautilus. Au milieu de leurs jeux, de leurs bonds, tandis qu’ils rivalisaient de beauté, d’éclat et de vitesse, je distinguai le labre vert, le mulle barberin, marqué d’une double raie noire, le gobie éléotre, à caudale arrondie, blanc de couleur et tacheté de violet sur le dos, le scombre japonais, admirable maquereau de ces mers, au corps bleu et à la tête argentée, de brillants azurors dont le nom seul emporte toute description, des spares rayés, aux nageoires variées de bleu et de jaune, des spares fascés, relevés d’une bande noire sur leur caudale, des spares zonéphores élégamment corsetés dans leurs six ceintures, des aulostones, véritables bouches en flûte ou bécasses de mer, dont quelques échantillons atteignaient une longueur d’un mètre, des salamandres du Japon, des murènes échidnées, longs serpents de six pieds, aux yeux vifs et petits, et à la vaste bouche hérissée de dents, etc.
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Our imagination was kept at its height, interjections followed quickly on each other. Ned named the fish, and Conseil classed them. I was in ecstasies with the vivacity of their movements and the beauty of their forms. Never had it been given to me to surprise these animals, alive and at liberty, in their natural element. I will not mention all the varieties which passed before my dazzled eyes, all the collection of the seas of China and Japan. These fish, more numerous than the birds of the air, came, attracted, no doubt, by the brilliant focus of the electric light.Notre admiration se maintenait toujours au plus haut point. Nos interjections ne tarissaient pas. Ned nommait les poissons, Conseil les classait, moi, je m’extasiais devant la vivacité de leurs allures et la beauté de leurs formes. Jamais il ne m’avait été donné de surprendre ces animaux vivants, et libres dans leur élément naturel. Je ne citerai pas toutes les variétés qui passèrent ainsi devant nos yeux éblouis, toute cette collection des mers du Japon et de la Chine. Ces poissons accouraient, plus nombreux que les oiseaux dans l’air, attirés sans doute par l’éclatant foyer de lumière électrique.
Suddenly there was daylight in the saloon, the iron panels closed again, and the enchanting vision disappeared. But for a long time I dreamt on, till my eyes fell on the instruments hanging on the partition. The compass still showed the course to be E.N.E., the manometer indicated a pressure of five atmospheres, equivalent to a depth of twenty five fathoms, and the electric log gave a speed of fifteen miles an hour. I expected Captain Nemo, but he did not appear. The clock marked the hour of five.Subitement, le jour se fit dans le salon. Les panneaux de tôle se refermèrent. L’enchanteresse vision disparut. Mais longtemps, je rêvai encore, Jusqu’au moment où mes regards se fixèrent sur les instruments suspendus aux parois. La boussole montrait toujours la direction au nord-nord-est, le manomètre indiquait une pression de cinq atmosphères correspondant à une profondeur de cinquante mètres, et le loch électrique donnait une marche de quinze milles à l’heure. J’attendais le capitaine Nemo. Mais il ne parute pas. L’horloge marquait cinq heures.
Ned Land and Conseil returned to their cabin, and I retired to my chamber. My dinner was ready. It was composed of turtle soup made of the most delicate hawks bills, of a surmullet served with puff paste (the liver of which, prepared by itself, was most delicious), and fillets of the emperor-holocanthus, the savour of which seemed to me superior even to salmon.Ned Land et Conseil retournèrent à leur cabine. Moi, je regagnai ma chambre. Mon dîner s’y trouvait préparé. Il se composait d’une soupe à la tortue faite des carets les plus délicats, d’un surmulet à chair blanche, un peu feuilletée, dont le foie préparé à part fit un manger délicieux, et de filets de cette viande de l’holocante-empereur, dont la saveur me parut supérieure à celle du saumon.
I passed the evening reading, writing, and thinking. Then sleep overpowered me, and I stretched myself on my couch of zostera, and slept profoundly, whilst the Nautilus was gliding rapidly through the current of the Black River.Je passai la soirée à lire, à écrire, à penser. Puis, le sommeil me gagnant, je m’étendis sur ma couche de zostère, et je m’endormis profondément, pendant que le Nautilus se glissait à travers le rapide courant du Fleuve-Noir.
CHAPTER XIV
A NOTE OF INVITATION
CHAPITRE XV
UNE INVITATION PAR LETTRE.
The next day was the 9th of November. I awoke after a long sleep of twelve hours. Conseil came, according to custom, to know “how I passed the night,” and to offer his services. He had left his friend the Canadian sleeping like a man who had never done anything else all his life. I let the worthy fellow chatter as he pleased, without caring to answer him. I was preoccupied by the absence of the Captain during our sitting of the day before, and hoping to see him to-day.Le lendemain, 9 novembre, je ne me réveillai qu’après un long sommeil de douze heures. Conseil vint, suivant son habitude, savoir «comment monsieur avait passé la nuit,» et lui offrir ses services. Il avait laissé son ami le Canadien dormant comme un homme qui n’aurait fait que cela toute sa vie. Je laissai le brave garçon babiller à sa fantaisie, sans trop lui répondre. J’étais préoccupé de l’absence du capitaine Nemo pendant notre séance de la veille, et j’espérais le revoir aujourd’hui.
Bientôt j’eus revêtu mes vêtements de byssus. Leur nature provoqua plus d’une fois les réflexions de Conseil. Je lui appris qu’ils étaient fabriqués avec les filaments lustrés et soyeux qui rattachent aux rochers les «jambonneaux,» sortes de coquilles très-abondantes sur les rivages de la Méditerranée. Autrefois, on en faisait de belles étoffes, des bas, des gants, car ils étaient à la fois très-moelleux et très-chauds. L’équipage du Nautilus pouvait donc se vêtir à bon compte, sans rien demander ni aux cotonniers, ni aux moutons, ni aux vers à soie de la terre.
As soon as I was dressed I went into the saloon. It was deserted. I plunged into the study of the shell treasures hidden behind the glasses.Lorsque je fus habillé, je me rendis au grand salon. Il était désert.
Je me plongeai dans l’étude de ces trésors de conchyliologie, entassés sous les vitrines.
Je fouillai aussi de vastes herbiers, emplis des plantes marines les plus rares, et qui, quoique desséchées, conservaient leurs admirables couleurs. Parmi ces précieuses hydrophytes, je remarquai des cladostèphes verticillées, des padines-paon, des caulerpes à feuilles de vigne, des callithamnes granifères, de délicates céramies à teintes écarlates, des agares disposées en éventails, des acétabules, semblables à des chapeaux de champignons très-déprimés, et qui furent longtemps classées parmi les zoophytes, enfin toute une série de varechs.
The whole day passed without my being honoured by a visit from Captain Nemo. The panels of the saloon did not open. Perhaps they did not wish us to tire of these beautiful things.La journée entière se passa, sans que je fusse honoré de la visite du capitaine Nemo. Les panneaux du salon ne s’ouvrirent pas. Peut-être ne voulait-on pas nous blaser sur ces belles choses.
The course of the Nautilus was E.N.E., her speed twelve knots, the depth below the surface between twenty-five and thirty fathoms.La direction du Nautilus se maintint à l’est-nord-est, sa vitesse à douze milles, sa profondeur entre cinquante et soixante mètres.
The next day, 10th of November, the same desertion, the same solitude. I did not see one of the ship’s crew: Ned and Conseil spent the greater part of the day with me. They were astonished at the puzzling absence of the Captain. Was this singular man ill?—had he altered his intentions with regard to us?Le lendemain, 10 novembre, même abandon, même solitude. Je ne vis personne de l’équipage. Ned et Conseil passèrent la plus grande partie de la journée avec moi. Ils s’étonnèrent de l’inexplicable absence du capitaine. Cet homme singulier était-il malade? Voulait-il modifier ses projets à notre égard?
After all, as Conseil said, we enjoyed perfect liberty, we were delicately and abundantly fed. Our host kept to his terms of the treaty. We could not complain, and, indeed, the singularity of our fate reserved such wonderful compensation for us that we had no right to accuse it as yet.Après tout, suivant la remarque de Conseil, nous jouissions d’une entière liberté, nous étions délicatement et abondamment nourris. Notre hôte se tenait dans les termes de son traité. Nous ne pouvions nous plaindre, et d’ailleurs, la singularité même de notre destinée nous réservait de si belles compensations, que nous n’avions pas encore le droit de l’accuser.
That day I commenced the journal of these adventures which has enabled me to relate them with more scrupulous exactitude and minute detail.Ce jour-là, je commençai le journal de ces aventures, ce qui m’a permis de les raconter avec la plus scrupuleuse exactitude, et, détail curieux, je l’écrivis sur un papier fabriqué avec la zostère marine.
11th November, early in the morning. The fresh air spreading over the interior of the Nautilus told me that we had come to the surface of the ocean to renew our supply of oxygen. I directed my steps to the central staircase, and mounted the platform.Le 11 novembre, de grand matin, l’air frais répandu à l’intérieur du Nautilus m’apprit que nous étions revenus à la surface de l’Océan, afin de renouveler les provisions d’oxygène. Je me dirigeai vers l’escalier central, et je montai sur la plate-forme.
It was six o’clock, the weather was cloudy, the sea grey, but calm. Scarcely a billow. Captain Nemo, whom I hoped to meet, would he be there? I saw no one but the steersman imprisoned in his glass cage. Seated upon the projection formed by the hull of the pinnace, I inhaled the salt breeze with delight.Il était six heures. Je trouvai le temps couvert, la mer grise, mais calme. A peine de houle. Le capitaine Nemo, que j’espérais rencontrer là, viendrait-il? Je n’aperçus que le timonier, emprisonné dans sa cage de verre. Assis sur la saillie produite par la coque du canot, j’aspirai avec délices les émanations salines.
By degrees the fog disappeared under the action of the sun’s rays, the radiant orb rose from behind the eastern horizon. The sea flamed under its glance like a train of gunpowder. The clouds scattered in the heights were coloured with lively tints of beautiful shades, and numerous “mare’s tails,” which betokened wind for that day. But what was wind to this Nautilus, which tempests could not frighten!Peu à peu, la brume se dissipa sous l’action des rayons solaires. L’astre radieux débordait de l’horizon oriental. La mer s’enflamma sous son regard comme une traînée de poudre. Les nuages, éparpillés dans les hauteurs, se colorèrent de tons vifs admirablement nuancés, et de nombreuses «langues de chat»[7] annoncèrent du vent pour toute la journée.
Mais que faisait le vent à ce Nautilus que les tempêtes ne pouvaient effrayer!

[7] Petits nuages blancs légers, dentelés sur leurs bords.
I was admiring this joyous rising of the sun, so gay, and so life-giving, when I heard steps approaching the platform. I was prepared to salute Captain Nemo, but it was his second (whom I had already seen on the Captain’s first visit) who appeared. He advanced on the platform, not seeming to see me. With his powerful glass to his eye, he scanned every point of the horizon with great attention. This examination over, he approached the panel and pronounced a sentence in exactly these terms. I have remembered it, for every morning it was repeated under exactly the same conditions. It was thus worded:J’admirais donc ce joyeux lever de soleil, si gai, si vivifiant, lorsque j’entendis quelqu’un monter vers la plate-forme.
Je me préparais à saluer le capitaine Nemo, mais ce fut son second,—que j’avais déjà vu pendant la première visite du capitaine,—qui apparut. Il s’avança sur la plate-forme, et ne sembla pas s’apercevoir de ma présence. Sa puissante lunette aux yeux, il scruta tous les points de l’horizon avec une attention extrême. Puis, cet examen fait, il s’approcha du panneau, et prononça une phrase dont voici exactement les termes. Je l’ai retenue, car, chaque matin, elle se reproduisit dans des conditions identiques. Elle était ainsi conçue:
“Nautron respoc lorni virch.”«Nautron respoc lorni virch.»
What it meant I could not say.Ce qu’elle signifiait, je ne saurais le dire.
These words pronounced, the second descended. I thought that the Nautilus was about to return to its submarine navigation. I regained the panel and returned to my chamber.Ces mots prononcés, le second redescendit. Je pensai que le Nautilus allait reprendre sa navigation sous-marine. Je regagnai donc le panneau, et par les coursives je revins à ma chambre.
Five days sped thus, without any change in our situation. Every morning I mounted the platform. The same phrase was pronounced by the same individual. But Captain Nemo did not appear.Cinq jours s’écoulèrent ainsi, sans que la situation se modifiât. Chaque matin, je montais sur la plate-forme. La même phrase était prononcée par le même individu. Le capitaine Nemo ne paraissait pas.
I had made up my mind that I should never see him again, when, on the 16th November, on returning to my room with Ned and Conseil, I found upon my table a note addressed to me. I opened it impatiently. It was written in a bold, clear hand, the characters rather pointed, recalling the German type. The note was worded as follows:J’avais pris mon parti de ne plus le voir, quand, le 16 novembre, rentré dans ma chambre avec Ned et Conseil, je trouvai sur la table un billet à mon adresse.
Je l’ouvris d’une main impatiente. Il était écrit d’une écriture franche et nette, mais un peu gothique et qui rappelait les types allemands.
Ce billet était libellé en ces termes:
TO PROFESSOR ARONNAX, On board the Nautilus. 16th of November, 1867.«Monsieur le professeur Aronnax, à bord du Nautilus.
«16 novembre 1867.
Captain Nemo invites Professor Aronnax to a hunting-party, which will take place to-morrow morning in the forests of the Island of Crespo. He hopes that nothing will prevent the Professor from being present, and he will with pleasure see him joined by his companions.Le capitaine Nemo invite monsieur le professeur Aronnax à une partie de chasse qui aura lieu demain matin dans ses forêts de l’île Crespo. Il espère que rien n’empêchera monsieur le professeur d’y assister, et il verra avec plaisir que ses compagnons se joignent à lui.
CAPTAIN NEMO, Commander of the Nautilus.Le commandant du Nautilus,
«Capitaine Nemo.»
“A hunt!” exclaimed Ned.«Une chasse! s’écria Ned.
“And in the forests of the Island of Crespo!” added Conseil.—Et dans ses forêts de l’île Crespo! ajouta Conseil.
“Oh! then the gentleman is going on terra firma?” replied Ned Land.—Mais il va donc à terre, ce particulier-là? reprit Ned Land.
“That seems to me to be clearly indicated,” said I, reading the letter once more.—Cela me paraît clairement indiqué, dis-je en relisant la lettre.
“Well, we must accept,” said the Canadian. “But once more on dry ground, we shall know what to do. Indeed, I shall not be sorry to eat a piece of fresh venison.”—Eh bien! il faut accepter, répliqua le Canadien. Une fois sur la terre ferme, nous aviserons à prendre un parti. D’ailleurs, je ne serai pas fâché de manger quelques morceaux de venaison fraîche.»
Without seeking to reconcile what was contradictory between Captain Nemo’s manifest aversion to islands and continents, and his invitation to hunt in a forest, I contented myself with replying:Sans chercher à concilier ce qu’il y avait de contradictoire entre l’horreur manifeste du capitaine Nemo pour les continents et les îles, et son invitation de chasser en forêt, je me contentai de répondre:
“Let us first see where the Island of Crespo is.”«Voyons d’abord ce que c’est que l’île Crespo.»
I consulted the planisphere, and in 32° 40′ N. lat. and 157° 50′ W. long., I found a small island, recognised in 1801 by Captain Crespo, and marked in the ancient Spanish maps as Rocca de la Plata, the meaning of which is The Silver Rock. We were then about eighteen hundred miles from our starting-point, and the course of the Nautilus, a little changed, was bringing it back towards the southeast.Je consultai le planisphère, et, par 32° 40′ de latitude nord et 167° 50′ de longitude ouest, je trouvai un îlot qui fut reconnu en 1801 par le capitaine Crespo, et que les anciennes cartes espagnoles nommaient Rocca de la Plata, c’est-à-dire «Roche d’Argent.» Nous étions donc à dix-huit cents milles environ de notre point de départ, et la direction un peu modifiée du Nautilus le ramenait vers le sud-est.
I showed this little rock, lost in the midst of the North Pacific, to my companions.Je montrai à mes compagnons ce petit roc perdu au milieu du Pacifique nord.
“If Captain Nemo does sometimes go on dry ground,” said I, “he at least chooses desert islands.”«Si le capitaine Nemo va quelquefois à terre, leur dis-je, il choisit du moins des îles absolument désertes!»
Ned Land shrugged his shoulders without speaking, and Conseil and he left me.Ned Land hocha la tête sans répondre, puis Conseil et lui me quittèrent.
After supper, which was served by the steward, mute and impassive, I went to bed, not without some anxiety.Après un souper qui me fut servi par le stewart muet et impassible, je m’endormis, non sans quelque préoccupation.
The next morning, the 17th of November, on awakening, I felt that the Nautilus was perfectly still. I dressed quickly and entered the saloon.Le lendemain, 17 novembre, à mon réveil, je sentis que le Nautilus était absolument immobile. Je m’habillai lestement, et j’entrai dans le grand salon.
Captain Nemo was there, waiting for me. He rose, bowed, and asked me if it was convenient for me to accompany him. As he made no allusion to his absence during the last eight days, I did not mention it, and simply answered that my companions and myself were ready to follow him.Le capitaine Nemo était là. Il m’attendait, se leva, salua, et me demanda s’il me convenait de l’accompagner. Comme il ne fit aucune allusion à son absence pendant ces huit jours, je m’abstins de lui en parler, et je répondis simplement que mes compagnons et moi nous étions prêts à le suivre.
«Seulement, monsieur, ajoutai-je, je me permettrai de vous adresser une question.
—Adressez, monsieur Aronnax, et, si je puis y répondre, j’y répondrai.
—Eh bien, capitaine, comment se fait-il que vous, qui avez rompu toute relation avec la terre, vous possédiez des forêts dans l’île Crespo?
—Monsieur le professeur, me répondit le capitaine, les forêts que je possède ne demandent au soleil ni sa lumière ni sa chaleur. Ni les lions, ni les tigres, ni les panthères, ni aucun quadrupède ne les fréquentent. Elles ne sont connues que de moi seul. Elles ne poussent que pour moi seul. Ce ne sont point des forêts terrestres, mais bien des forêts sous-marines.
—Des forêts sous-marines! m’écriai-je.
—Oui, monsieur le professeur.
—Et vous m’offrez de m’y conduire?
—Précisément.
—A pied?
—Et même à pied sec.
—En chassant?
—En chassant.
—Le fusil à la main?
—Le fusil à la main.»
Je regardai le commandant du Nautilus d’un air qui n’avait rien de flatteur pour sa personne.
«Décidément, il a le cerveau malade, pensai-je. Il a eu un accès qui a duré huit jours, et même qui dure encore. C’est dommage! Je l’aimais mieux étrange que fou!»
Cette pensée se lisait clairement sur mon visage, mais le capitaine Nemo se contenta de m’inviter à le suivre, et je le suivis en homme résigné à tout.
We entered the dining-room, where breakfast was served.Nous arrivâmes dans la salle à manger, où le déjeuner se trouvait servi.
“M. Aronnax,” said the Captain, “pray, share my breakfast without ceremony; we will chat as we eat. For, though I promised you a walk in the forest, I did not undertake to find hotels there. So breakfast as a man who will most likely not have his dinner till very late.”«Monsieur Aronnax, me dit le capitaine, je vous prierai de partager mon déjeuner sans façon. Nous causerons en mangeant. Mais, si je vous ai promis une promenade en forêt, je ne me suis point engagé à vous y faire rencontrer un restaurant. Déjeunez donc en homme qui ne dînera probablement que fort tard.»
I did honour to the repast. It was composed of several kinds of fish, and slices of sea-cucumber, and different sorts of seaweed. Our drink consisted of pure water, to which the Captain added some drops of a fermented liquor, extracted by the Kamschatcha method from a seaweed known under the name of Rhodomenia palmata. Captain Nemo ate at first without saying a word. Then he began:Je fis honneur au repas. Il se composait de divers poissons et de tranches d’holoturies, excellents zoophytes, relevé d’algues très-apéritives, telles que la Porphyria laciniata et la Laurentia primafetida. La boisson se composait d’eau limpide à laquelle, à l’exemple du capitaine, j’ajoutai quelques gouttes d’une liqueur fermentée, extraite, suivant la mode kamchatkienne, de l’algue connue sous le nom de «Rhodoménie palmée.» Le capitaine Nemo mangea, d’abord, sans prononcer une seule parole. Puis, il me dit:
“Sir, when I proposed to you to hunt in my submarine forest of Crespo, you evidently thought me mad. Sir, you should never judge lightly of any man.”«Monsieur le professeur, quand je vous ai proposé de venir chasser dans mes forêts de Crespo, vous m’avez cru en contradiction avec moi-même. Quand je vous ai appris qu’il s’agissait de forêts sous-marines, vous m’avez cru fou. Monsieur le professeur, il ne faut jamais juger les hommes à la légère.
“But Captain, believe me——”—Mais, capitaine, croyez que…
“Be kind enough to listen, and you will then see whether you have any cause to accuse me of folly and contradiction.”—Veuillez m’écouter, et vous verrez si vous devez m’accuser de folie ou de contradiction.
“I listen.”—Je vous écoute.
“You know as well as I do, Professor, that man can live under water, providing he carries with him a sufficient supply of breathable air. In submarine works, the workman, clad in an impervious dress, with his head in a metal helmet, receives air from above by means of forcing pumps and regulators.”—Monsieur le professeur, vous le savez aussi bien que moi, l’homme peut vivre sous l’eau à la condition d’emporter avec lui sa provision d’air respirable. Dans les travaux sous-marins, l’ouvrier, revêtu d’un vêtement imperméable et la tête emprisonnée dans une capsule de métal, reçoit l’air de l’extérieur au moyen de pompes foulantes et de régulateurs d’écoulement.
“That is a diving apparatus,” said I.—C’est l’appareil des scaphandres, dis-je.
“Just so, but under these conditions the man is not at liberty; he is attached to the pump which sends him air through an india-rubber tube, and if we were obliged to be thus held to the Nautilus, we could not go far.”—En effet, mais dans ces conditions, l’homme n’est pas libre. Il est rattaché à la pompe qui lui envoie l’air par un tuyau de caoutchouc, véritable chaîne qui le rive à la terre, et si nous devions être ainsi retenus au Nautilus, nous ne pourrions aller loin.
“And the means of getting free?” I asked.—Et le moyen d’être libre? demandai-je.
“It is to use the Rouquayrol apparatus, invented by two of your own countrymen, which I have brought to perfection for my own use, and which will allow you to risk yourself under these new physiological conditions without any organ whatever suffering. It consists of a reservoir of thick iron plates, in which I store the air under a pressure of fifty atmospheres. This reservoir is fixed on the back by means of braces, like a soldier’s knapsack. Its upper part forms a box in which the air is kept by means of a bellows, and therefore cannot escape unless at its normal tension. In the Rouquayrol apparatus such as we use, two india rubber pipes leave this box and join a sort of tent which holds the nose and mouth; one is to introduce fresh air, the other to let out the foul, and the tongue closes one or the other according to the wants of the respirator. But I, in encountering great pressures at the bottom of the sea, was obliged to shut my head, like that of a diver in a ball of copper; and it is to this ball of copper that the two pipes, the inspirator and the expirator, open.”—C’est d’employer l’appareil Rouquayrol-Denayrouze, imaginé par deux de vos compatriotes, mais que j’ai perfectionné pour mon usage, et qui vous permettra de vous risquer dans ces nouvelles conditions physiologiques, sans que vos organes en souffrent aucunement. Il se compose d’un réservoir en tôle épaisse, dans lequel j’emmagasine l’air sous une pression de cinquante atmosphères. Ce réservoir se fixe sur le dos au moyen de bretelles, comme un sac de soldat. Sa partie supérieure forme une boîte d’où l’air, maintenu par un mécanisme à soufflet, ne peut s’échapper qu’à sa tension normale. Dans l’appareil Rouquayrol, tel qu’il est employé, deux tuyaux en caoutchouc, partant de cette boîte, viennent aboutir à une sorte de pavillon qui emprisonne le nez et la bouche de l’opérateur; l’un sert à l’introduction de l’air inspiré, l’autre à l’issue de l’air expiré, et la langue ferme celui-ci ou celui-là, suivant les besoins de la respiration. Mais, moi qui affronte des pressions considérables au fond des mers, j’ai dû enfermer ma tête, comme celle des scaphandres, dans une sphère de cuivre, et c’est à cette sphère qu’aboutissent les deux tuyaux inspirateurs et expirateurs.
“Perfectly, Captain Nemo; but the air that you carry with you must soon be used; when it only contains fifteen per cent. of oxygen it is no longer fit to breathe.”—Parfaitement, capitaine Nemo, mais l’air que vous emportez doit s’user vite, et dès qu’il ne contient plus que quinze pour cent d’oxygène, il devient irrespirable.
“Right! But I told you, M. Aronnax, that the pumps of the Nautilus allow me to store the air under considerable pressure, and on those conditions the reservoir of the apparatus can furnish breathable air for nine or ten hours.”—Sans doute, mais je vous l’ai dit, monsieur Aronnax, les pompes du Nautilus me permettent de l’emmagasiner sous une pression considérable, et, dans ces conditions, le réservoir de l’appareil peut fournir de l’air respirable pendant neuf ou dix heures.
“I have no further objections to make,” I answered. “I will only ask you one thing, Captain—how can you light your road at the bottom of the sea?”—Je n’ai plus d’objection à faire, répondis-je. Je vous demanderai seulement, capitaine, comment vous pouvez éclairer votre route au fond de l’Océan?
“With the Ruhmkorff apparatus, M. Aronnax; one is carried on the back, the other is fastened to the waist. It is composed of a Bunsen pile, which I do not work with bichromate of potash, but with sodium. A wire is introduced which collects the electricity produced, and directs it towards a particularly made lantern. In this lantern is a spiral glass which contains a small quantity of carbonic gas. When the apparatus is at work this gas becomes luminous, giving out a white and continuous light. Thus provided, I can breathe and I can see.”—Avec l’appareil Ruhmkorff, monsieur Aronnax. Si le premier se porte sur le dos, le second s’attache à la ceinture. Il se compose d’une pile de Bunzen que je mets en activité, non avec du bichromate de potasse, mais avec du sodium. Une bobine d’induction recueille l’électricité produite, et la dirige vers une lanterne d’une disposition particulière. Dans cette lanterne se trouve un serpentin de verre qui contient seulement un résidu de gaz carbonique. Quand l’appareil fonctionne, ce gaz devient lumineux, en donnant une lumière blanchâtre et continue. Ainsi pourvu, je respire et je vois.
“Captain Nemo, to all my objections you make such crushing answers that I dare no longer doubt. But, if I am forced to admit the Rouquayrol and Ruhmkorff apparatus, I must be allowed some reservations with regard to the gun I am to carry.”—Capitaine Nemo, à toutes mes objections vous faites de si écrasantes réponses que je n’ose plus douter. Cependant, si je suis bien forcé d’admettre les appareils Rouquayrol et Ruhmkorff, je demande à faire des réserves pour le fusil dont vous voulez m’armer.
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Vingt Mille Lieues
Sous Les Mers de Jules Vernes

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