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Le Diable sans Cornes

Contes Français

Les Contes et Chansons Populaires Recueillis par E. Henry Carnoy

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Le Diable sans Cornes

(Normandie)

Un paysan cassa un jour sa fourche en faisant une meule de foin. Il alla chez tous les
forgerons des environs, mais aucun d’eux n’avait le temps de lui faire une nouvelle fourche.

Notre homme ne savait que faire, car c’était l’époque de la moisson.

Enfin il se résolut à aller voir le Diable, qui, à cette époque, demeurait dans un
grand château au bord de la mer.


« Qui est là? dit le Diable, en entendant frapper à sa porte.


— Moi, le fermier de Neuville. »


Et quand le Diable eut fait entrer le paysan:


Que veux-tu de moi ?

— J’ai cassé ma fourche, et je n’en puis trouver une autre.


— Alors tu voudrais que je t’en donne une ?


— Justement. Je vous la payerai ce que vous demanderez.


— C’est bon ; j’en ai ici une toute neuve qui jamais ne pourra se briser. Je te la céderai volontiers.


— A quelles conditions?


— Nous verrons tout à l’heure. Dînons toujours en attendant. »


Et le Diable et le paysan se mirent à table.


Quand on fut à la fin du repas, le Diable dit à son compagnon ;


« Je n’ai besoin ni d’or ni d’argent. Tu me donneras ton âme en échange de la fourche.

Voici un parchemin que tu vas signer et tout sera dit.


— Mon âme, vous n’y pensez pas, maître Satan! Jamais je ne signerai un pareil écrit.


— Tu oublies donc que tu es dans le château du Diable, et que je puis te jeter en Enfer?


— Je vous répète que je ne signerai rien. Conservez votre fourche et laissez-moi aller.


— Buvons toujours un coup en attendant, » dit le Diable.


Et, croyant n’être pas vu de l’homme, il jeta dans le verre de son compagnon une certaine poudre pour l’endormir.

Le paysan s’en aperçut, et profitant d’un instant où le Diable se baissait pour ramasser son chapeau à plumes, il changea les verres.


« A votre santé !

— A la tienne! »


Et tous deux burent, et le Diable s’endormit aussitôt.

Le paysan changea prestement ses habits contre ceux du démon, prit le chapeau et la fourche, et s’enfuit du château après en avoir fermé les portes solidement.


Le Diable fut bien étonné, à son réveil; il voulut sortir, et se vit enfermé; ne pouvant ouvrir la porte, il se brisa les cornes en essayant de l’enfoncer.

Enfin, ayant réussi à s’ouvrir un passage, il se mit à la recherche du paysan, oubliant
sans doute que, sans ses cornes, il ne pouvait rien contre les hommes.


Quant au paysan, il était arrivé à la nuit close dans un grand bois où les voleurs avaient l’habitude de se réunir.

Il se cacha dans un buisson pour y passer la nuit.

Il allait s’endormir quand il entendit du bruit dans le taillis : c’étaient les brigands qui revenaient d’une expédition et qui rapportaient de grands sacs d’or et d’argent.


« Asseyons-nous ici, dit le chef.

On ne viendra jamais nous poursuivre en cet endroit. »


Les brigands s’assirent en cercle près du buisson, ouvrirent les sacs et comptèrent leurs richesses.

II y a juste un million, dit le capitaine.


— Il doit y avoir davantage, crièrent les autres.


Tu veux nous voler à ton habitude.

— Je vous dis qu’il n’y a qu’un million.


— Il y a plus ! Il y a davantage ! » hurlèrent les bandits.


Le paysan avait bien peur d’abord, mais tout à coup, songeant à son déguisement, il se rassura, et, saisissant le moment où les bandits s’étaient levés pour se battre, il sortit du buisson en poussant un grand cri, et d’un seul bond fut au milieu de
la bande.


« Le Diable! le Diable! » crièrent les bandits, qui aussitôt s’enfuirent dans toutes les directions, abandonnant leur butin. Le paysan ne perdit pas de temps; il prit les sacs d’or et d’argent et les transporta assez loin de là, dans un buisson auprès d’un grand chêne, à la lisière du bois; puis, son trésor en sûreté, il sortit du bois et se mit à
la recherche de son village.

Il y arriva au petit jour et raconta son aventure à sa femme.

Puis la nuit suivante, il prit sa voiture et se rendit à l’endroit où l’or des voleurs était caché.

Sa voiture se trouva presque pleine, et il rapporta le tout à sa maison.


Le Diable ayant fini par retrouver le paysan, voulut lui faire un mauvais parti, mais l’homme saisit sa fourche et en frappa le Diable qui s’enfuit droit en Enfer pour se faire panser par ses diablotins.

Ses cornes n’avaient pas encore repoussé, et il était sans pouvoir.

Il tomba au beau milieu de l’Enfer et fut grillé comme un simple mortel.

Quant à notre homme, il quitta bientôt le village, et s’en alla riche et heureux vivre à la ville avec sa femme et ses enfants.


(Conté en 1883, par M. Georges Mareux, des environs de Rouen. )

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