Contes Français
Les Contes et Chansons Populaires Recueillis par E. Henry Carnoy
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Quatorze
(Picardie)

Une bonne femme qui vivait il y a déjà bien longtemps, à ce que m’a raconté ma grand’-mère, qui le tenait elle-même de sa grand’mère, n’y allait pas de main morte en besogne.
Elle avait eu treize enfants en moins de dix ans de mariage ; puis elle était restée dix ans sans en avoir d’autres et elle croyait que c’était fini pour tout de bon, quand un beau jour elle accoucha d’un marmot gros et fort au diable.
La bonne femme avait épuisé tous les saints du calendrier pour donner des noms à ses treize premiers enfants, et, ne sachant com-ment appeler le dernier, elle se
décida à l’appeler Quatorze, sur le conseil d’une bonne fée qu’on avait invitée au baptême.
« Ce n’est pas le tout que de lui donner le nom de Quatorze, bonne fée, avait dit la mère ; encore lui faudrait -il la force de quatorze personnes.
— C’est juste, répondit la fée; je veux qu’il ait la force de quatorze fois quatorze personnes. »
Et ce qu’avait désiré la fée était arrivé; Quatorze était devenu d’une force extraordinaire.
La bonne femme, sa mère, finit par passer de vie à trépas, et Quatorze quitta le village pour aller faire son tour de France.
Il prit le premier chemin venu et arriva devant la maison d’un meunier auquel il demanda du travail comme domestique. Le meunier accepta et chargea le nouveau venu de prendre deux mulets et d’aller au village voisin chercher plusieurs sacs de blé.
Au lieu de faire comme le lui avait dit son maître, Quatorze laissa les mulets à la maison, alla seul au village et rapporta les sacs de blé au moulin.
Le meunier n’en pouvait croire ses yeux dut pourtant se rendre à 1 évidence et il ne
ménagea pas les compliments à son robuste domestique.
Le lendemain matin, le meunier appela Quatorze et lui dit :
« Tu vas prendre une charrue et deux chevaux et tu t’en iras à mes champs.
— Vous pouvez laisser les chevaux à l’écurie, mon maître, j’irai seul labourer vos terres; envoyez seulement avec moi quelqu’un qui m’indique où elles sont situées. »
Quatorze alla aux champs, et en une heure de temps il eut fini de labourer toutes les pièces de terre du meunier son maître.
A son retour, ce furent de nouveaux éloges à recevoir.
Le jour suivant, Quatorze et les autres domestiques devaient se rendre à un bois assez éloigné et y abattre de gros arbres qu’ils avaient à ramener à la ferme en les plaçant sur un grand binard.
Les domestiques partirent de grand matin et se mirent aussitôt à l’ouvrage.
Quatorze se réveilla assez tard et s’en alla au bois sans se presser.
Arrivé là, il prit une cognée et en un tour demain il eut fini d’abattre deux des arbres les plus gros.
Les domestiques étaient émerveillés.
Saisissant les deux chênes à bras le corps, Quatorze les plaça sur son binard et revint au moulin.
Mais, sur son chemin, un gros arbre venait d’être abattu.
Sans s’en inquiéter, le robuste domestique se courba sous le binard et se soulevant lui fit traverser l’obstacle.
Déjà revenu ? lui dit le meunier.
— Oui, mon maître, et même j’ai abattu les deux arbres avant de les placer sur mon binard.
— C’est impossible.
— Oh! non; c’est tout comme je vous le dis. »
Vers midi, les domestiques revinrent demander des chevaux de renfort pour enlever un arbre qui barrait la route.
Le meunier les chassa de chez lui et ne garda que Quatorze.
Mais les domestiques, afin de se venger de Quatorze, allèrent trouver le Diable pour le charger de leur vengeance.
a Que voulez-vous? leur dit le Diable.
— Nous voulons nous venger d’un certain Quatorze, une sorte d’Hercule, le domestique du meunier de Famechon.
— Et comment ?
— En le tourmentant sans cesse et en le rossant d’importance quand la fantaisie vous en viendra.
— C’est bien; vous pouvez compter sur moi. Adieu. »
Et le Diable alla trouver Quatorze, se disputa avec lui et essaya de le battre.
Le paysan se défendit à grands coups de poing, mais le Diable allait venir à bout de son adversaire quand Quatorze saisit une bouteille pleine d’eau bénite et en jeta le contenu à la tête du pauvre démon qui s’enfuit tout épouvanté, en jurant que jamais il ne reviendrait se frotter au paysan.
Débarrassé du Diable, Quatorze resta tranquille auprès du meunier, dont il épousa la fille; il eut de nombreux enfants et vécut heureux.
Conté en février 1881, par M. Guyot, de Famée no. 1 [Somme].

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