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Les Contes d’Alexandre Dumas
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Les sept péchés capitaux

Le lendemain, dès le matin, il alla chez l’archevêque, qui commençait à s’impatienter de tant de lenteur, et lui montra le plan, Monseigneur Conrad avoua qu’il n’avait rien perdu pour attendre, et, ouvrant les trésors du chapitre, il autorisa l’artiste à y fouiller à pleines mains.
Le même jour, l’architecte jeta les fondations de sa cathédrale ; et comme depuis longtemps un monde d’ouvriers creusait les flancs du Drakenfels, la matière ne lui manqua point ; aussi la vit-on bientôt sortir de terre comme une immense végétation de pierre pressée de s’épanouir au soleil.
Trois mois s’étaient déjà passés, et chaque semaine le monument montait d’une assise, lorsqu’un vendredi que l’architecte, emporté par son travail, était resté jusqu’au soir sans manger et revenait chez lui affamé, il rencontra le bourguemestre, bon vivant, connu pour les merveilleux repas qu’il donnait. Il venait justement de chez l’architecte, afin de l’inviter à souper avec le bourguemestre de Mayence et celui d’Aix-la-Chapelle, qui passaient tous deux, de leur côté, pour de joyeux convives ; et, ne l’ayant pas trouvé, il se dirigeait vers le lieu où on était sûr de le trouver toujours. L’architecte voulut refuser, disant que sa mère n’était point prévenue ; mais le bourguemestre ne voulut entendre à rien, disant que c’était chose faite, puisqu’il lui avait parlé à elle-même, si bien que, si fort qu’il s’en défendît, il fallut que l’architecte suivît le bourguemestre, qui l’introduisit dans une salle à manger au milieu de laquelle s’élevait une table splendidement chargée des mets les plus délicats, tant en volaille qu’en venaison.
L’architecte, comme nous l’avons dit, mourait de faim ; aussi commença-t-il, en voyant une si riche collation, à se féliciter d’avoir suivi le bourguemestre ; mais, en se mettant à table, il se rappela qu’on était justement au vendredi, saint jour d’abstinence, où il était moins permis que dans tout autre de se livrer au péché de la gourmandise. Aussi, lorsqu’il eut fait sa prière, ne voulut-il rien prendre autre chose qu’un morceau de pain et un verre d’eau, refusant les viandes les plus délicates et les vins les plus exquis ; car, ainsi qu’il l’avait dit, il n’était pas gourmand.
Quant aux trois bourguemestres, ils mangèrent de toutes ces viandes sans crainte de Dieu ni du diable, raillant pendant tout le repas le pauvre architecte de la maigre chère qu’il faisait.
Le lendemain, l’architecte se remit à son œuvre, et comme ni l’argent ni les hommes ne manquaient, on vit chaque jour la cathédrale s’élever davantage. De temps en temps, l’artiste pensait bien aux menaces du diable ; mais, à chaque fois qu’il y pensait, il puisait dans la crainte même une nouvelle force pour résister à la tentation, et comme la cathédrale marchait son train, il espérait que les prédictions infernales ne s’accompliraient pas.
Vers ce temps-là, le pape Innocent IV, qui était génois, voulut faire bâtir à un de ses neveux un palais à Rome, et comme la ville de Cologne était réputée pour l’habileté de ses constructeurs, il fit demander à monseigneur Conrad un architecte. Monseigneur Conrad désigna à sa sainteté un fort habile homme, qu’il avait eu un instant l’intention de charger du soin de bâtir sa cathédrale, croyant faire grand-peine à l’architecte du dôme, avec lequel il avait eu, quelques jours auparavant, une légère discussion ; mais celui-ci, tout entier à son travail, se félicita de ce que ce choix n’était pas tombé sur lui et au moment du départ il embrassa son rival et lui souhaita un bon voyage, car, ainsi qu’il l’avait dit, il n’était point envieux.
La cathédrale continua de gagner à cette sérénité d’esprit. L’artiste ne vivait que pour le monument ; tout son temps se passait au milieu des pierres, sculptant lui-même les parties qui avaient besoin de délicatesse et de fini. De son côté, l’archevêque, tout froid qu’il était avec son architecte, le payait royalement, de sorte que l’artiste, tout en rêvant une grande gloire pour son nom, amassait une jolie fortune pour son existence : il en résulta qu’au bout de dix-huit mois, il avait déjà près de 6 000 florins à lui, ce qui, pour cette époque, était une fort jolie somme.
Mais un soir, en rentrant, sa mère lui remit une lettre cachetée de noir : elle était de sa sœur, et lui annonçait qu’elle venait de perdre son mari, qui, en mourant, la laissait sans fortune avec trois petits enfants. La pauvre femme terminait sa lettre en le priant de lui envoyer quelques secours pour l’aider à élever sa famille.
L’artiste lui envoya ses 6 000 florins ; car, ainsi qu’il l’avait dit, il n’était point avare.
La cathédrale marchait toujours ; l’architecte semblait en avoir fait sa demeure réelle : dès le point du jour il y était, et souvent la nuit était venue qu’il ne l’avait pas encore quittée. Cependant il avait sous ses ordres plusieurs ouvriers assez habiles pour qu’il pût se reposer sur eux de certains travaux importants ; aussi, après en avoir fait un dessin très détaillé, avait-il confié à l’un d’eux une porte latérale, pleine de merveilleuses arabesques, et où pendait, comme à une treille, une vigne toute chargée de raisins. L’ouvrier qui devait mener à bout ce travail s’était enfermé dans une espèce d’atelier de planche afin de n’être pas dérangé. L’architecte respectait sa solitude, et, confiant dans son habileté, attendait que le voile tombât. Ce grand jour vint. L’ouvrier enleva son échafaudage ; mais alors l’espoir de l’architecte fut trompé ; quelques parties de la porte étaient loin d’être dignes du reste de l’édifice ; de sorte qu’il résolut de refaire cette porte lui-même, quoiqu’il y eût au moins pour six mois de travail ; et cette résolution ne lui coûta point à prendre ; car, ainsi qu’il l’avait dit, il n’était point paresseux.
Depuis que le monument était commencé, et il y avait déjà près de quatre ans, jamais l’artiste n’avait manqué un seul jour de surveiller lui-même ses ouvriers et de juger par ses propres yeux si chaque détail de son plan était scrupuleusement suivi : de sorte qu’il lui semblait qu’il lui eût été impossible de vivre autre part qu’au milieu de ses colonnades et de ses ogives. Or, il arriva qu’une nuit, des voleurs qui ignoraient que, grâce à la paie des ouvriers qui avait eu lieu la veille, il ne restait plus un sou dans sa maison, s’étant introduits chez lui et n’ayant point trouvé l’argent qu’ils cherchaient, se dédommagèrent sur sa garde-robe de ce que son coffre était vide, et lui emportèrent jusqu’à l’habit qu’il venait de quitter et qui était sur une chaise au pied de son lit ; de sorte que le lendemain il s’aperçut qu’il ne pouvait se lever faute de vêtements. Il fit aussitôt venir son tailleur qui lui promit un habillement complet pour le soir même, et qui ne le lui apporta qu’au bout de trois jours ; de sorte que le malheureux architecte fut obligé de rester soixante-douze heures dans son lit. Aussi, lorsque après l’avoir fait attendre ainsi, le tailleur lui apporta l’habillement tant désiré, lui fit-il force reproches ; mais cependant d’un ton modéré et ainsi qu’il convient à un homme calme et modéré ; car, ainsi qu’il l’avait dit, il n’était point colère.
Cependant le bruit qu’une nouvelle merveille allait enrichir le monde commençait à se répandre ; car il était déjà facile de voir, d’après ce qui existait, ce que serait l’édifice une fois achevé ; de sorte que l’on venait déjà comme en pèlerinage, de France, d’Allemagne et de Flandre. Souvent, tous ces pèlerins, après avoir visité l’édifice, étaient curieux de voir l’architecte ; de sorte que, lorsqu’il revenait de la cathédrale chez lui, il n’était pas rare qu’il rencontrât des groupes d’étrangers qui l’attendaient, afin de voir quel homme était celui-là qui avait eu assez de hardiesse et de génie pour espérer mener à bonne fin une pareille entreprise. Or, parmi ces pèlerins, il y avait bien aussi quelques pèlerines ; et il arriva que l’une d’entre elles se prit d’une si grande passion pour notre architecte, qu’elle loua une maison dans la rue qui conduisait de chez lui à la cathédrale, si bien que, lorsqu’il passait, soit qu’il allât, soit qu’il revînt, il la voyait toujours à sa fenêtre, le sourire à la bouche et le suivant des yeux tant qu’elle le pouvait voir. Cela durait depuis trois semaines, lorsqu’un soir qu’il revenait elle laissa tomber, de sa fenêtre à ses pieds, le bouquet qu’elle tenait à la main. L’artiste le ramassa, et, sans penser à mal, entra dans la maison pour le remettre à quelque serviteur ; mais, par hasard, tous les valets étaient sortis, de sorte qu’il fut obligé de monter lui-même à l’appartement de la belle inconnue, qui le reçut dans une chambre tout embaumée des plus doux parfums et éclairée de ce demi-jour si dangereux pour un cœur qui n’est pas sûr de lui. Une fois arrivé là, il était impossible à l’architecte de se retirer aussitôt. Il accepta donc l’invitation que lui fit la belle pèlerine de s’asseoir un instant auprès d’elle. Mais à peine y était-il qu’elle lui avoua que c’était la cathédrale qu’elle était venue voir, mais que c’était l’architecte qui la retenait ainsi depuis un mois à Cologne ; et, tout en lui disant de douces choses pareilles à celles-ci, elle lui jeta un de ses beaux bras autour du cou et, appuyant sa bouche sur la sienne, elle lui donna un de ces longs et brûlants baisers qui se glissent des lèvres au cœur. Mais l’architecte se leva aussitôt, modeste et rougissant, et lui fit un long et éloquent sermon sur la nécessité de contenir les tentations de la chair, et, ce sermon achevé, il se retira, malgré ses instances et ses larmes ; car, ainsi qu’il l’avait dit, il n’était point luxurieux.
Six mois à peu près s’étaient passés depuis cet événement : l’affluence des curieux augmentait tous les jours, car le portail était entièrement achevé ainsi que l’abside ; et quoique l’une des tours n’eût encore atteint que la hauteur de vingt et un pieds, l’autre en avait déjà plus de cent quarante, et faisait bien voir ce qu’elle serait lorsqu’elle aurait atteint sa dimension entière qui devait être de cinq cents pieds ; mais, plus sa cathédrale s’avançait, plus l’idée qu’elle ne serait jamais terminée et que son nom demeurerait oublié et inconnu tourmentait l’artiste ; aussi résolut-il d’aller au-devant de cette dernière crainte, en faisant des lettres mêmes de son nom la balustrade qui devait entourer la plate-forme de la tour : de cette façon, ce nom frapperait tous les yeux tant que durerait le monument ; ce nom vivrait avec lui. Cette résolution prise, l’artiste fut plus tranquille et résolut de la mettre à exécution dès le lendemain.
Au moment où il venait de s’arrêter à ce projet, l’archevêque l’envoya chercher pour lui montrer, disait-il, différentes reliques qu’il venait de recevoir ; l’architecte descendit de sa tour, et se rendit à l’archevêché, où il trouva monseigneur Conrad tout joyeux, car il venait de recevoir de Milan les têtes des trois mages, Gaspard, Melchior et Balthazar, avec des couronnes précieuses d’or, ornées de diamants et de perles. L’architecte s’agenouilla dévotement devant ces saintes reliques, fit sa prière, et, s’étant relevé, félicita fort l’évêque d’avoir reçu un si riche et si miraculeux présent.
– Eh bien ! dit l’évêque, je viens de recevoir quelque chose de plus précieux encore que tout cela, de l’empereur de Constantinople.
– Vraiment ! demanda l’architecte ; serait-ce un morceau de la vraie croix retrouvé par l’impératrice Hélène ?
– Mieux que cela.
– Serait-ce la couronne d’épines mise en gage par l’empereur Baudoin ?
– Au-dessus encore.
– Qu’est-ce donc ?
– Le plan du plus bel édifice qui ait jamais été construit.
– Ah ! ah ! fit l’architecte en souriant avec dédain.
– Un plan qui laisse aussi loin derrière lui les autres plans, que le soleil laisse derrière lui les étoiles, puisque tous les autres plans sont l’ouvrage des hommes, et que celui-là est l’ouvrage de Dieu lui-même qui l’a envoyé par un de ses anges au roi Salomon.
– Vous avez le plan du temple de Jérusalem ? s’écria l’architecte.
– Oui.
– Je serais curieux de le voir.
– Levez ce rideau, dit l’évêque en indiquant du doigt une tapisserie qui recouvrait un cadre.
L’architecte obéit avec empressement, et se trouva en face du plan céleste que d’un seul regard il embrassa dans tous ses détails.
– Eh bien ! dit l’évêque, que dites-vous de ce plan ?
– Peuh ! fit l’architecte en allongeant les lèvres ; j’aime mieux le mien.
En ce moment un éclat de rire infernal retentit aux oreilles de l’architecte : il reconnut le rire de Satan ; après avoir échappé aux six autres péchés, il venait de tomber dans le péché d’orgueil.
L’architecte ne fit qu’un bond de l’archevêché à l’église de Saint-Géréon, où il espérait trouver le père Clément ; mais le père Clément était mort pendant la nuit d’une apoplexie foudroyante. Au moment où on lui annonça cette nouvelle, il entendit une seconde fois bruire à ses oreilles l’éclat de rire satanique qui l’avait déjà épouvanté, et un frisson qui lui courut par tous les membres pénétra jusqu’à son cœur et le glaça.
Cependant il rappela toute sa résolution, et, comme il n’éprouvait aucune douleur physique, il reprit peu à peu courage et résolut de retourner à sa cathédrale, espérant que cet enthousiasme qu’il retrouvait toutes les fois qu’il se revoyait en face de son œuvre, chasserait le reste de crainte qui frissonnait au fond de son cœur.
L’artiste essaya de se perdre dans les profondeurs de sa cathédrale ; mais il sentit bientôt que l’air commençait à y manquer et qu’il y étouffait comme dans un tombeau ; en conséquence, il prit l’escalier qui conduisait à la plate-forme. Arrivé là, il continua de monter par les échafaudages ; au haut des échafaudages était une échelle qui conduisait au sommet de la tour. Ce sommet de la tour était le point le plus avancé de l’ouvrage, et c’était de là que l’architecte dominait ordinairement tout l’ensemble de ses travaux.
Rien ne paraissait changé, chacun était à sa besogne et y resta assidûment jusqu’à l’heure de la retraite ; enfin cette heure sonna comme le jour commençait à tomber. L’architecte entendit les ouvriers se retirer en chantant, contents qu’ils étaient de leur journée. Alors il resta seul comme il en avait l’habitude, car jamais, ainsi que nous l’avons dit, il ne revenait que le dernier.
Le soleil se couchait majestueux comme un roi, n’éclairant déjà plus que les toits les plus élevés. Bientôt le fleuve et la ville furent entièrement plongés dans l’ombre ; mais quelque temps encore le sommet de la tour, qui n’avait cependant encore atteint que le tiers de sa hauteur, demeura éclairé, et l’artiste, noyé dans la lumière, songea orgueilleusement que, lorsque la tour aurait atteint toute sa hauteur, elle semblerait un phare allumé dans la nuit. Enfin le soleil abandonna lentement la montagne de pierre, et l’architecte songea qu’il était temps de descendre.
Mais lorsqu’il chercha l’échelle, ce fut vainement, l’échelle n’y était plus.
Cet événement n’avait rien d’extraordinaire, car un des ouvriers, croyant que l’architecte était parti, pouvait avoir enlevé l’échelle ; cependant, dans les circonstances où l’architecte se trouvait, il en conçut quelque inquiétude ; d’abord, selon sa coutume, il avait déjeuné fort légèrement, et ayant été rappelé chez l’archevêque, vers les deux heures, il avait complètement oublié de dîner. Il en résultait que la faim commençait à le gagner ; d’ailleurs on était au mois d’octobre et les nuits devenaient froides : il tenta donc tous les moyens de descendre ; mais si adroit qu’il fût, il y avait impossibilité complète. Alors il essaya d’appeler ; mais comme, avant de recourir à ce moyen, il avait usé plus d’une heure en tentatives inutiles, les rues étaient déjà désertes, et sa voix, sans qu’il s’en rendît compte lui-même, avait pris un tel caractère d’angoisse, que le peu de passants attardés qui l’entendirent, au lieu de s’arrêter pour lui répondre, pressèrent leur marche, épouvantés qu’ils étaient de ces cris nocturnes et inconnus.
Force fut à l’architecte de se résigner ; mais il fallait pour cela une certaine résolution. Le sommet de la tour présentait une surface nue et n’offrait aucun abri. Pour comble de malheur, vers les onze heures, un orage terrible s’amassa au ciel. Il n’y avait pas moyen de dormir, aussi l’artiste se tenait-il assis, car il passait de temps en temps de telles rafales de vent que s’il eût été debout, comme il n’y avait point de parapet, il eût sans doute été emporté ; cependant l’orage croissait toujours.
À onze heures et demie, il s’arrêta sur Cologne, et l’on entendit gronder les premiers coups de tonnerre. De temps en temps un éclair, qui semblait ouvrir jusqu’aux dernières profondeurs du ciel, entrouvrait cette mer de nuages, et éclairait pour un instant la ville et le fleuve d’une lueur fantastique. Il semblait alors à l’architecte que la ville avait la forme d’un lion, le nuage celle d’un aigle, et le fleuve celle d’un serpent.
À minuit moins un quart, tout cet océan de vapeur poussé par le vent contre la cathédrale, s’arrêta à son sommet, comme font parfois les nuages à la cime des montagnes. Alors l’architecte se trouva être au centre de la tempête. Le tonnerre grondait à son oreille, l’éclair serpentait autour de lui.
À minuit sonnant, il se fit un bruit étrange et inconnu ; une insupportable odeur de soufre se répandit ; et, comme le battant de l’horloge des saints apôtres frappait le dernier coup, cet éclat de rire, qui lui était si bien connu, retentit derrière l’architecte. Il se retourna et se trouva en face de Satan.
Cette fois, c’était lui qui, à son tour, était en puissance de son ennemi.
L’architecte comprit qu’il était perdu : car il n’y avait pas à fuir. Cependant, comme Satan étendait la main vers lui, il fit un pas en arrière, ce qui lui donna le temps de prononcer un acte de contrition. Alors Satan vit que son âme allait lui échapper pour la seconde fois, il fit un bond vers lui et, le touchant du doigt, le précipita du sommet de la tour.
Mais, si rapide qu’eût été ce mouvement, la prière avait eu le temps de monter jusqu’au trône de Dieu, et lorsque Satan s’élança après sa victime pour l’entraîner avec lui en enfer, il la trouva entre les bras de deux anges qui l’emportaient au ciel.
Satan demeura un instant stupéfait ; puis, s’élançant après les messagers célestes, il passa près d’eux, rapide comme un tourbillon, en jetant encore une fois à la pauvre âme ce mot qui avait tant tourmenté son corps : Inconnu ! inconnu !
En effet, la prédiction de Satan s’est accomplie ; la cathédrale interrompue resta dans l’état où elle était lorsqu’arriva cette nuit fatale, car, lorsqu’on voulut la continuer, on ne put retrouver le plan sur lequel elle avait été commencée, et, quelques recherches que depuis cette époque aient faites les savants, on n’a jamais découvert le nom de l’architecte.
La pauvre âme sait au ciel qu’elle est oubliée sur la terre ; et c’est la punition de son orgueil.

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