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Conte Oriental: “Namouna” d’Alfred de Musset

Premières Poésies

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Chant deuxième XXI – XXX > > >

Chant premier I – X , XI – XX , XXI – XXX , XXXI – XL , XLI – L , LI – LX , LXI – LXX , LXXI – LXXVIII , Chant deuxième I – X , XI – XX , XXI – XXX , XXXI – XL , XLI – L , LI – LV , Chant troisième I – XIV


Namouna

***

XI

Il ne te lisait pas, dit-on, les vers d’Alceste ;
Si je les avais faits, je te les aurais lus.
L’esprit et les bons mots auraient été perdus ;
Mais les meilleurs accords de l’instrument céleste
Seraient allés au cœur comme ils en sont venus.
J’aurais dit aux bavards du siècle : « À vous le reste. »

XII

Pourquoi donc les amants veillent-ils nuit et jour ?
Pourquoi donc le poëte aime-t-il sa souffrance ?
Que demandent-ils donc tous les deux en retour ?
Une larme, ô mon Dieu ! voilà leur récompense ;
Voilà pour eux le ciel, la gloire et l’éloquence,
Et par là le génie est semblable à l’amour.

XIII

Mon premier chant est fait. — Je viens de le relire.
J’ai bien mal expliqué ce que je voulais dire ;
Je n’ai pas dit un mot de ce que j’aurais dit,
Si j’avais fait un plan une heure avant d’écrire ;
Je crève de dégoût, de rage et de dépit.
Je crois, en vérité, que j’ai fait de l’esprit.

XIV

Deux sortes de roués existent sur la terre :
L’un beau comme Satan, froid comme la vipère,
Hautain, audacieux, plein d’imitation,
Ne laissant palpiter sur son cœur solitaire
Que l’écorce d’un homme, et de la passion
Faisant un manteau d’or à son ambition ;

XV

Corrompant sans plaisir, amoureux de lui-même,
Et, pour s’aimer toujours, voulant toujours qu’on l’aime ;
Regardant au soleil son ombre se mouvoir ;
Dès qu’une source est pure et que l’on peut s’y voir,
Venant comme Narcisse y pencher son front blême,
Et chercher la douleur pour s’en faire un miroir.

XVI

Son idéal, c’est lui. — Quoi qu’il dise ou qu’il fasse,
Il se regarde vivre, et s’écoute parler.
Car il faut que demain on dise, quand il passe :
« Cet homme que voilà, c’est Robert Lovelace. »
Autour de ce mot-là le monde peut rouler ;
Il est l’axe du monde, et lui permet d’aller.

XVII

Avec lui ni procès, ni crainte, ni scandale.
Il jette un drap mouillé sur son père qui râle ;
Il rôde, en chuchotant, sur la pointe du pied.
Un amant plus sincère, à la main plus loyale,
Peut serrer une main trop fort, et l’effrayer ;
Mais lui, n’ayez pas peur de lui, c’est son métier.

XVIII

Qui pourrait se vanter d’avoir surpris son âme ?
L’étude de sa vie est d’en cacher le fond.
On en parle, — on en pleure, — on en rit, — qu’en voit-on ?
Quelques duels oubliés, quelques soupirs de femme,
Quelque joyau de prix sur une épaule infâme,
Quelque croix de bois noir sur un tombeau sans nom.

XIX

Mais comme tout se tait dès qu’il vient à paraître !
Clarisse l’aperçoit et commence à souffrir.
Comme il est beau, brillant ! comme il s’annonce en maître !
Si Clarisse s’indigne et tarde à consentir,
Il dira qu’il se tue, — il se tuera peut-être ;
Mais Clarisse aime mieux le sauver et mourir.

XX

C’est le roué sans cœur, le spectre à double face,
À la patte de tigre, aux serres de vautour,
Le roué sérieux qui n’eut jamais d’amour ;
Méprisant la douleur comme la populace ;
Disant au genre humain de lui laisser son jour —
Et qui serait César, s’il n’était Lovelace.



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George Sand. Portrait by A. de Musset. 1833

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