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Conte Oriental: “Namouna” d’Alfred de Musset

Premières Poésies

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Chant premier I – X , XI – XX , XXI – XXX , XXXI – XL , XLI – L , LI – LX , LXI – LXX , LXXI – LXXVIII , Chant deuxième I – X , XI – XX , XXI – XXX , XXXI – XL , XLI – L , LI – LV , Chant troisième I – XIV


Namouna

***

XI

Il était indolent, et très-opiniâtre ;
Bien cambré, bien lavé, le visage olivâtre,
Des mains de patricien, — l’aspect fier et nerveux,
La barbe et les sourcils très-noirs, — un corps d’albâtre.
Ce qu’il avait de beau surtout, c’étaient les yeux.
Je ne vous dirai pas un mot de ses cheveux ;

XII

C’est une vanité qu’on rase en Tartarie.
Ce pays-là pourtant n’était pas sa patrie.
Il était renégat, — Français de nation ; —
Riche aujourd’hui, jadis chevalier d’industrie,
Il avait dans la mer jeté comme un haillon
Son titre, sa famille et sa religion.

XIII

Il était très-joyeux, — et pourtant très-maussade ;
Détestable voisin, — excellent camarade ;
Extrêmement futile, — et pourtant très-posé ;
Indignement naïf, — et pourtant très-blasé ;
Horriblement sincère, — et pourtant très-rusé.
Vous souvient-il, lecteur, de cette sérénade

XIV

Que don Juan déguisé chante sous un balcon ?
— Une mélancolique et piteuse chanson,
Respirant la douleur, l’amour et la tristesse.
Mais l’accompagnement parle d’un autre ton.
Comme il est vif, joyeux ! avec quelle prestesse
Il sautille ! — On dirait que la chanson caresse

XV

Et couvre de langueur le perfide instrument,
Tandis que l’air moqueur de l’accompagnement
Tourne en dérision la chanson elle-même,
Et semble la railler d’aller si tristement.
Tout cela cependant fait un plaisir extrême. —
C’est que tout en est vrai, c’est qu’on trompe, et qu’on aime ;

XVI

C’est qu’on pleure en riant ; — c’est qu’on est innocent
Et coupable à la fois ; — c’est qu’on se croit parjure
Lorsqu’on n’est qu’abusé ; c’est qu’on verse le sang
Avec des mains sans tache, et que notre nature
A de mal et de bien pétri sa créature :
Tel est le monde, hélas ! et tel était Hassan.

XVII

C’était un bon enfant dans la force du terme ;
Très-bon — et très-enfant ; mais, quand il avait dit :
« Je veux que cela soit, » il était comme un terme.
Il changeait de dessein comme on change d’habit ;
Mais il fallait toujours que le dernier se fît.
C’était un océan devenu terre ferme.

XVIII

Bizarrerie étrange ! avec ses goûts changeants,
Il ne pouvait souffrir rien d’extraordinaire.
Il n’aurait pas marché sur une mouche à terre
Mais, s’il l’avait trouvée à dîner dans son verre,
Il aurait assommé quatre ou cinq de ses gens. —
Parlez après cela des bons et des méchants !

XIX

Venez après cela crier d’un ton de maître
Que c’est le cœur humain qu’un auteur doit connaître !
Toujours le cœur humain pour modèle et pour loi !
Le cœur humain de qui ? le cœur humain de quoi ?
Celui de mon voisin a sa manière d’être.
Mais, morbleu ! comme lui j’ai mon cœur humain, moi.

XX

Cette vie est à tous, et celle que je mène,
Quand le diable y serait, est une vie humaine.
« Alors, me dira-t-on, c’est vous que vous peignez.
Vous êtes le héros, vous vous mettez en scène. »
— Pas du tout, — cher lecteur, — je prends à l’un le nez,
À l’autre le talon, — à l’autre — devinez.



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George Sand. Portrait by A. de Musset. 1833

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