La Légende des siècles
Éviradnus
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< < < Le grand Joss et le petit Zéno
Après souper > > >
Ils soupent
***
Et, riant et chantant, ils s’en vont vers la table.
« Je fais Joss chambellan et Zéno connétable. »
Dit Mahaud. Et tous trois causent, joyeux et beaux,
Elle sur le fauteuil, eux sur des escabeaux ;
Joss mange, Zéno boit, Mahaud rêve. La feuille
N’a pas de bruit distinct qu’on note et qu’on recueille,
Ainsi va le babil sans forme et sans lien ;
Joss par moment fredonne un chant tyrolien,
Et fait rire ou pleurer la guitare ; les contes
Se mêlent aux gaîtés fraîches, vives et promptes.
Mahaud dit : « Savez-vous que vous êtes heureux ?
— Nous sommes bien portants, jeunes, fous, amoureux ;
C’est vrai. — De plus, tu sais le latin comme un prêtre,
Et Joss chante fort bien. — Oui, nous avons un maître
Qui nous donne cela par-dessus le marché.
— Quel est son nom ? — Pour nous Satan, pour vous Péché ;
Dit Zéno, caressant jusqu’en sa raillerie.
— Ne riez pas ainsi, je ne veux pas qu’on rie.
Paix, Zéno ! Parle-moi, toi, Joss, mon chambellan.
— Madame, Viridis, comtesse de Milan,
Fut superbe ; Diane éblouissait le pâtre ;
Aspasie, Isabeau de Saxe, Cléopâtre,
Sont des noms devant qui la louange se tait ;
Rhodope fut divine ; Érylésis était
Si belle, que Vénus, jalouse de sa gorge,
La traîna toute nue en la céleste forge
Et la fit sur l’enclume écraser par Vulcain ;
Eh bien, autant l’étoile éclipse le sequin,
Autant le temple éclipse un monceau de décombres,
Autant vous effacez toutes ces belles ombres !
Ces coquettes qui font des mines dans l’azur.
Les elfes, les péris, ont le front jeune et pur
Moins que vous, et pourtant le vent et ses bouffées
Les ont galamment d’ombre et de rayons coiffées.
— Flatteur, tu chantes bien, » dit Mahaud. Joss reprend :
« Si j’étais, sous le ciel splendide et transparent,
Ange, fille ou démon, s’il fallait que j’apprisse
La grâce, la gaîté, le rire et le caprice,
Altesse, je viendrais à l’école chez vous.
Vous êtes une fée aux yeux divins et doux,
Ayant pour un vil sceptre échangé sa baguette. »
Mahaud songe : « On dirait que ton regard me guette,
Tais-toi. Voyons, de vous tout ce que je connais,
C’est que Joss est Bohême et Zéno Polonais,
Mais vous êtes charmants ; et pauvres ; oui, vous l’êtes ;
Moi, je suis riche ; eh bien, demandez-moi, poëtes,
Tout ce que vous voudrez. — Tout ? Je vous prends au mot,
Répond Joss. Un baiser. — Un baiser ! dit Mahaud
Surprise en ce chanteur d’une telle pensée ;
Savez-vous qui je suis ? » Et fière et courroucée,
Elle rougit. Mais Joss n’est pas intimidé :
« Si je ne le savais, aurais-je demandé
Une faveur qu’il faut qu’on obtienne, ou qu’on prenne ?
Il n’est don que de roi ni baiser que de reine.
— Reine ! » Et Mahaud sourit.

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