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Poème: “Leurs Altesses” de Victor Hugo

La Légende des siècles
Les Chevaliers ErrantsLe petit roi de Galice

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Leurs Altesses

***

L’endroit est désolé, les gens sont triomphants.

C’est un groupe tragique et fier que ces infants,
Précédés d’un clairon qu’à distance accompagne
Une bande des gueux les plus noirs de l’Espagne ;
Sur le front des soldats, férocement vêtus,
La montera de fer courbe ses crocs pointus,
Et Mauregat n’a point d’estafiers plus sauvages,
Et le forban Dragut n’a pas sur les rivages
Écumé de forçats pires, et Gaïffer
N’a pas, dans le troupeau qui le suit, plus d’enfer ;
Les casques sont d’acier et les cœurs sont de bronze ;
Quant aux infants, ce sont dix noms sanglants : Alonze,
Don Santos Pacheco le Hardi, Froïla,
Qui, si l’on veut Satan, peut dire : Me voilà !
Ponce, qui tient la mer d’Irun à Biscarosse,
Rostabat le Géant, Materne le Féroce,
Blas, Ramon, Jorge et Ruy le Subtil, leur aîné,
Blond, le moins violent et le plus acharné.

Le mont, complice et noir, s’ouvre en gorges désertes.

Ils sont frères ; c’est bien ; sont-ils amis ? Non, certes.
Ces Caïns pour lien ont la perte d’autrui.
Blas, du reste, est l’ami de Materne, et don Ruy
De Ramon, comme Atrée est l’ami de Thyeste.


La tour des rats de Victor Hugo - 1847
La tour des rats de Victor Hugo – 1847


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