Les Années funestes
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César > > >
Un peuple était debout
***
Un peuple était debout, et ce peuple était grand.
Il marchait lumineux dans le progrès flagrant.
Lés autres nations disaient : Voici la tête !
Il avait traversé cette énorme tempête
Quatrevirigt-treize, et mis le vieux monde au tombeau ;
Dans la lutte difforme il était resté béau ;
Ce’ fier peuple, assailli d’évènements funèbres,
Avait fait des rayons de toutes ces ténèbres ;
Il avait fait, démon, dieu, sauveur irrité,
De la combustion des siècles sa clarté.
Il avait eu Pascal, il avait eu Molière ;
Il avait vu sur lui s’épaissir comme un lierre
L’amour des nations dont il était l’appui ;
Et pendant soixante ans sur sa cime avait lui
Voltaire, cet esprit de flamme armé du rire,
Ce titan qui, proscrit, empêchait de proscrire,
Ce pasteur guidant l’âme, enseignant le devoir
Et chassant le troupeau des dogmes au lavoir.
Ce peuple avait en lui la loi qui développe ;
A force d’être France il devenait Europe ;
A force d’être Europe il était l’univers.
Il savait rester un tout en étant divers ;
Chaque race est un chiffre, il en était la somme ;
Et ce peuple était plus qu’un peuple ; il était l’Homme.
Dans la forêt sinistre il était l’éclaireur ;
Son pas superbe était le recul de l’erreur ;
Il proclamait le vrai sur la terre ; une lave
Sortait de son esprit qui délivrait l’esclave,
Et la femme, et le faible, et le pauvre inquiet,
Et l’aveugle ignorant, de sorte qu’on voyait
Devant sa flamme, hostile au mal, au crime, aux haines,
S’enfuir la vieille nuit traînant les vieilles chaînes.
Il était entouré des ruines du mal,
D’abus tombés, monceau formidable et fatal,
De droits ressuscités, de vertus retrouvées,
Et de petites mains d’enfants, vers lui levées.
Au lieu de dire : Grâce ! il disait : Il lé faut !
Il combattait la guerre, il tuait l’échafaud.
Père et frère, il donnait la vie, ôtait les maîtres.
Guetté, mais fort, trop grand, hélas ! pour croire aux traîtres,
Il marchait aussi pur que l’aube en floréal,
L’œil fixé sur ce ciel qu’on nomme l’idéal.
Subitement, il est tombé dans l’embuscade,
Et son cadavre est là sur une barricade.
Ce trépassé, sanglant, nu, mordant son baîllon,
Pâle, n’a même plus la gloire, ce haillon,
Et ses noirs assassins, de leur main lâche et fausse,
Creusent sous lui la nuit comme on creuse une fosse.
Décembre souriant, suivi de son Sénat,
A fait hommage aux rois de cet assassinat,
Les rois ont respiré cet encensoir fétide.
Et devant Fualdès mort, le juge est pour Bastide
Et le prêtre bénit Caïn tuant Abel.
Sous ta tiare d’or qui ressemble à Babel,
Et qui, de la Sixtine illuminant les voiles,
A plus de diamants que le ciel n’a d’étoiles,
Sur ta chaire, splendide et sacré tribunal,.
Pape, tu ne vaux pas, dans ton haut Quirinal,
Qui du monde romain domine les déluges,
Rois, vous ne valez pas, vous ne valez pas, juges,
Tu ne vaux pas, César dans la pourpre élevé,
Les chiens qui vont léchant le sang sur le pavé !

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César > > >
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