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Littérature française – Livres bilingues – Contes de fées et Livres d’enfants – Poésie Française – Alain Fournier – Poèmes d’Alain-Fournier
< < < Madeleine
Trois Proses > > >
La Partie De Plaisir
***
À Claude Debussy.
Ce sont des femmes, sur le lac, dans une barque doublée de soie. C’est la partie de plaisir. Ce chant que nous entendions, pareil à un palais d’or et de rose entre les saules du bord de l’eau, pareil à une femme qui lève sa coupe vaine avec des larmes de gloire, pareil au visage le plus passionné qui se cache, à l’avant de la barque, dans des manches de brocart, c’est le chant de Marthe et de Madeleine : je reconnais la voix des deux filles frivoles. Nous les disions frivoles ! Nous ne savions pas que ce lac, dans la vallée inculte, surplombé là-bas de collines grises et rocheuses, abritait tant de désirs insoupçonnés. Nous ne pensions pas, au déclin de ce jeudi soir, tandis que nous chassions dans la solitude, découvrir où s’évadent les âmes des enfants enfermées. Avancez-vous entre les branches des saules et regardez :
La plus studieuse, celle qui lisait sa leçon, tous les volets fermés, dans la chambre fraîche, les cheveux les plus rebelles de son front lissé touchant presque à la page : voyez maintenant toute sa chevelure relevée comme une huppe de perruche, comme un casque de dogaresse, toute sa chevelure mutinée ! Telle est la transfiguration du désir. J’en entends, sans les voir, d’autres qui babillent, qui commencent des phrases incompréhensibles, charmantes, et qui s’arrêtent, ne sachant pas les finir : ce sont celles qui n’ont rien dit, jamais. Par instants, toutes les voix se confondent et ce n’est plus qu’un bruit vague et mêlé, qui donne la fièvre et le désespoir, comme des cloches lointaines qui sonnent les vêpres d’été, dans d’autres pays. Mais il y a toujours une voix qui reprend et que j’écoute, la plus grave et pourtant la plus haute, qui dit que tout est vain, que tout va s’évanouir et que c’est une gloire, pourtant ! Celle que j’entends ainsi, parmi toutes les autres, est descendue la première, à l’heure où tout se mourait d’ennui, de ce morne château, sur la colline grise, qu’un orage semble sans cesse menacer. Regardez comme elle est blonde et pâle, sous son grand parasol noir.
Avancez-vous entre les saules, dans le sable pailleté d’argent, sans bruit, comme un pêcheur en retenant votre haleine : n’effrayez pas les âmes !
< < < Madeleine
Trois Proses > > >
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