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Littérature française – Livres bilingues – Contes de fées et Livres d’enfants – Poésie Française – Pierre Corneille – Poèmes de Pierre Corneille
< < < Les Triomphes de Louis le Juste
À saint Bernard, sur la traduction de ses Épîtres, par le R. P. dom Gabriel de Sainte-Geme (Sonnet) > > >
La Poésie à la Peinture, en faveur de l’Académie des peintres illustres.
***
Enfin tu m’as suivie, et ces vastes montagnes
Qui du Rhône et du Pô séparent les campagnes
N’ont eu remparts si forts ni si haut élevés
Que ton vol, chère sœur, après moi n’ait bravés ;
Enfin ce vieux témoin de toutes nos merveilles,
Toujours pour toi tout d’yeux, et pour moi tout d’oreilles,
Le Tibre voit la Seine, autrefois son appui,
Partager tes trésors et les miens avec lui :
Tu me rejoins enfin, et courant sur mes traces,
En cet heureux séjour du mérite et des grâces,
Tu viens, à mon exemple, enrichir ces beaux lieux
De tout ce que ton art a de plus précieux.
Oh ! qu’ils te fourniront de brillantes matières !
Que d’illustres objets à toutes tes lumières !
Prépare des pinceaux, prépare des efforts
Pour toutes les beautés de l’esprit et du corps,
Pour tous les dons du ciel, pour tous les avantages
Que la nature et lui sèment sur les visages ;
Prépares-en enfin pour toutes les vertus,
Sous qui nous puissions voir les vices abattus.
Sans te gêner l’idée après leur caractère,
Pour les bien exprimer tu n’auras qu’à portraire :
La France en est féconde, et tes nobles travaux
En trouveront chez elle assez d’originaux ;
Mais n’en prépare point pour la plus signalée,
Qu’on a depuis longtemps de la cour exilée,
Pour celle qui départ le solide renom :
Hélas ! j’en ai moi-même oublié jusqu’au nom,
Tant je vois rarement mes plus fameux ouvrages
Pouvoir s’enorgueillir de ses moindres suffrages.
Ronsard, qu’elle flattoit à son commencement,
La crut avec son roi couchée au monument ;
Il en perdit l’haleine, et sa muse malade
En laissa de ses mains tomber la Franciade.
Maynard l’a chaque jour criée à haute voix :
Il n’est porte où pour elle il n’ait frappé cent fois ;
Mais sans en voir l’image en aucun lieu gravée,
Il est mort la cherchant, et ne l’a point trouvée.
J’en fais souvent reproche à ce climat heureux ;
Je m’en plains aux plus grands comme aux plus généreux ;
Pour trop m’en plaindre en vain je deviens ridicule,
Et l’on ne m’entend pas, ou l’on le dissimule.
Qu’aujourd’hui la valeur sait mal se secourir !
Que je vois de grands noms en danger de mourir !
Que de gloire à l’oubli malgré le ciel se livre,
Quand il m’a tant donné de quoi la faire vivre !
Le siècle a des héros, il en a même assez
Pour en faire rougir tous les siècles passés ;
Il a plus d’un César, il a plus d’un Achille ;
Mais il n’a qu’un Mécène, et n’aura qu’un Virgile :
Rare exemple, et trop grand pour ne pas éclater,
Rare exemple, et si grand qu’on n’ose l’imiter.
Cette haute vertu va toutefois renaître :
À quelques traits déjà je crois la reconnaître.
Chère et divine sœur, prépare tes crayons :
J’en vois de temps en temps briller quelques rayons ;
Les Sophocles nouveaux dont j’honore la France
En ont déjà senti quelque douce influence ;
Mais ce ne sont enfin que rayons inconstants,
Qui vont de l’un à l’autre, et qui n’ont que leur temps ;
Et ces heureux hasards des fruits de mon étude
Laissent tout l’avenir dedans l’incertitude.
Tire avec ton pouvoir leur éclat vagabond ;
Fais-les servir d’ébauche à ton savoir profond ;
Et mêlant à ces traits l’effort de ton génie,
Fais revoir en portrait cette illustre bannie.
Peins bien toute sa pompe et toutes ses beautés,
Son empire absolu dessus les volontés ;
Fais-lui donner du lustre aux plus brillantes marques
Dont se pare le chef des plus dignes monarques ;
Fais partir de nos mains à ses commandements
Tout ce que nous avons d’éternels monuments ;
Fais-lui distribuer la plus durable gloire ;
Mets l’histoire à ses pieds, et toute la mémoire ;
Mets en ses yeux l’éclat d’une divinité ;
Mets en ses mains le sceau de l’immortalité,
Et rappelle si bien un juste amour pour elle,
Qu’à son tour en ces lieux cet amour la rappelle,
Et que les cœurs, plongés dans le ravissement,
N’en puissent plus souffrir ce long bannissement.
Mais que dis-je ? tu vas rappeler cette reine
Avec bien plus de gloire, et beaucoup moins de peine.
Ce que je n’ai pu faire avec toutes mes voix,
Quoique j’aye eu pour moi jusqu’à celle des rois,
Quoique toute leur cour, de mes douceurs charmée,
Ait par delà mes vœux enflé ma renommée,
Un coup d’œil le va faire, et ton art plus charmant
Pour un si grand effet ne veut qu’un seul moment.
Je vois, je vois déjà dans ton académie,
Par de royales mains en ces lieux affermie,
Tes Zeuxis renaissants, tes Apelles nouveaux,
Étaler à l’envi des chefs-d’œuvres si beaux,
Qu’un violent amour pour des choses si rares
Transforme en généreux les cœurs les plus avares,
Et les précipitant à d’inouïs efforts,
Fait dérouiller les clefs des plus secrets trésors.
Je les vois effacer ces chefs-d’œuvres antiques,
Dont jadis les seuls rois, les seules républiques,
Les seuls peuples entiers pouvoient faire le prix,
Et pour qui l’on traitoit les talents de mépris ;
Je vois le Potosi te venir rendre hommage,
Je vois se déborder le Pactole et le Tage,
Je les vois à grands flots se répandre sur toi.
N’accusons plus le siècle : enfin je la revoi,
Je la revois enfin cette belle inconnue,
Et par toi rappelée, et pour toi revenue.
Oui, désormais le siècle a tout son ornement,
Puisqu’enfin tu lui rends en cet heureux moment
Cette haute vertu, cette illustre bannie,
Cette source de gloire en torrents infinie,
Cette reine des cœurs, cette divinité :
J’ai retrouvé son nom, la Libéralité.
< < < Les Triomphes de Louis le Juste
À saint Bernard, sur la traduction de ses Épîtres, par le R. P. dom Gabriel de Sainte-Geme (Sonnet) > > >
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