Littérature Russe – Livres pour enfants – Poésie Russe – Nikolaï Vassilievitch Gogol – L’Effroyable Vengeance – Table des matièress
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IV
Il faisait grand jour, mais pas de soleil ; le ciel s’était assombri et une bruine s’égouttait sur les champs, les bois et le large Dniépr. Dame Catherine se réveilla, mais sans allégresse, ses yeux étaient rouges d’avoir pleuré, elle se sentait troublée et inquiète.
– Mon cher mari, mon mari aimé, j’ai fait un rêve étrange…
– Quel rêve, ma chère dame Catherine ?
– Un rêve extraordinaire, en vérité, et aussi net que si je n’avais pas été endormie. J’ai rêvé que mon père est ce monstre que nous avons vu chez le capitaine Gorobietz. Mais je t’en prie, ne va pas ajouter foi à ce songe. Quelles absurdités ne vous apparaissent-elles point quand on dort ! Je me figurais debout devant lui, toute tremblante et craintive, et chacune de ses paroles me perçait le cœur. Ah ! si tu avais entendu ce qu’il disait !
– Et que te disait-il donc, très précieuse Catherine ?
– Il disait : « Regarde-moi, ma fille, regarde comme je suis beau ! Les gens ont bien tort de prétendre que je suis laid. Je serais pour toi un excellent mari. Regarde quels yeux je sais faire ! » À ces mots, il dirigea vers moi des prunelles de flamme, je poussai un cri et me réveillai…
– Oui, il y a beaucoup de vrai dans les rêves… Mais, à part cela, sais-tu que l’on s’agite au delà des collines ? c’est tout juste si les Polonais ne recommencent pas à montrer le nez une fois de plus. Gorobietz m’a envoyé prévenir de ne point m’endormir sur les deux oreilles. Or, il s’inquiétait bien en vain, je me tenais déjà sur mes gardes, sans qu’il fût besoin de l’avertissement. Cette nuit même mes gens ont abattu assez de bois pour dix barricades. Nous réglerons ces messieurs de Pologne avec des prunes de plomb et leurs gentilshommes danseront aussi au branle de nos fouets.
– Et mon père est au courant ?
– Ah ! ton père est pour moi comme une taie sur l’œil. Jusqu’à présent je ne suis pas arrivé à le percer à jour. Sans doute qu’il a grandement fauté en terre étrangère. Et de fait, explique-moi ceci : voilà à peu près dix mois qu’il vit parmi nous, et pas une seule fois nous ne l’avons vu se donner du bon temps comme un vrai Cosaque. Il a même refusé de boire l’hydromel, tu entends, Catherine, refusé de cet hydromel que j’ai subtilisé chez les Juifs de Brest-Litowsk… Hé, valet ! cria le sire Danilo, fais un saut, l’ami, jusqu’à la cave, et apporte-nous de l’hydromel juif : j’ai dans l’idée, dame Catherine, qu’il ne croit pas au Seigneur Christ. Que t’en semble ?
– Dieu sait ce que tu vas t’imaginer, sire Danilo !
– Cela t’étonne, chère dame ? poursuivait Danilo en prenant des mains du Cosaque une cruche d’argile. Même ces charognes de catholiques ne crachent pas sur l’eau-de-vie. Les Turcs seuls s’en abstiennent. Dis donc, Stetzko, as-tu lampé beaucoup d’hydromel dans la cave ?
– J’y ai seulement goûté, sire Danilo !
– Tu mens, fils de chien, voyez comme les mouches s’attaquent à ses moustaches ! Ah ! ces Cosaques, quelle crâne engeance ! prêts à partager tout ce qu’ils possèdent, mais pour la boisson, ils tiennent à l’absorber tout seuls et jusqu’à la dernière goutte. Quant à moi, dame Catherine, il me semble que voilà longtemps je ne me suis pas enivré…
– Longtemps !… et la dernière fois…
– N’aie pas peur, n’aie pas peur, je ne viderai pas plus d’une coupe… Tiens, voilà le prieur des Turcs qui se glisse chez nous, grogna-t-il entre les dents, en voyant son beau-père courber la taille pour franchir le seuil.
– Eh bien ! ma fille, dit le père, ôtant son bonnet et rajustant le ceinturon auquel pendait son sabre orné de pierres étranges, le soleil est déjà haut et il n’est pas encore question chez toi du déjeuner…
– Le déjeuner est prêt, seigneur père, et à l’instant il sera servi. Sors du four le pot de beignets, dit-elle à la vieille servante qui essuyait un plat de bois. Ou plutôt non, je m’en occuperai moi-même, va appeler les hommes !
Tous s’assirent en cercle par terre, le seigneur père en face de l’étagère aux saintes images, le sire Danilo à sa gauche et à sa droite dame Catherine et dix gaillards d’une fidélité à toute épreuve, en surcots bleus ou jaunes.
– Je n’aime pas ces beignets, dit le père en reposant sa cuiller après quelques bouchées, ils n’ont aucun goût.
– Je sais bien que tu préférerais des nouilles juives, se dit mentalement Danilo. Pour quelle raison, beau-père, reprit-il à voix haute, dis-tu que ces beignets n’ont aucun goût ? Serait-ce qu’ils sont mal préparés ? Ma Catherine les accommode de telle façon que l’hetman en personne a rarement la chance d’en manger de pareils et on aurait bien tort de les mépriser. C’est là une nourriture de chrétien. Tous les saints et élus de Dieu mangeaient des beignets…
Le père ne répondit rien, Danilo se tut également.
On servit alors du porc rôti aux choux et aux pruneaux.
– Je n’aime pas le porc, dit le beau-père en puisant une cuillerée de choux dans le plat.
– Et pourquoi donc ? demanda Danilo. Les Turcs et les Juifs sont les seuls à ne pas manger de porc.
Le père de Catherine se renfrogna encore davantage. Il ne prit que de la semoule au lait et au lieu d’eau-de-vie but à une gourde passée dans son ceinturon une espèce d’eau noire.
Après le repas. Danilo s’endormit du sommeil des vaillants et ne se réveilla qu’aux approches du soir. Il s’installa pour écrire certaines missives destinées aux troupes cosaques et dame Catherine, assise sur le poêle, se mit à balancer du pied le berceau. Mais de son siège, le maître de maison, qui n’accordait qu’un œil distrait à ses écritures, tournait le plus souvent ses regards du côté de la fenêtre d’où l’on voyait briller au loin les monts et le Dniépr. Au delà du fleuve, les bois se teignaient de bleu et tout en haut s’apercevait un pan du ciel nocturne, maintenant redevenu clair. Mais ce n’était ni le firmament ni les bois bleutés qu’observait le sire Danilo ; il considérait la langue de terre avancée dans l’eau où se dressait la sombre silhouette de l’antique château fort. Et il lui sembla voir s’éclairer une étroite lucarne de ce château. Cependant tout était calme, ce ne devait être qu’une illusion. L’on n’entendait autre chose que le sourd grondement du fleuve tout là-bas et de trois côtés les échos successifs des vagues momentanément réveillées. Le Dniépr ne se révolte point, il se borne à grommeler et à bougonner, comme le font les vieux bonshommes. Rien ne lui plaît, tout a changé aux alentours et toujours en guerre contre les coteaux, les forêts, les prairies qui le bordent, il court se plaindre d’eux à la mer Noire.
Mais voici que sur le large Dniépr est apparue la tache noire d’une barque, et de nouveau l’on dirait qu’une lumière s’est brusquement allumée au château. Danilo lance un coup de sifflet et à ce signal accourt son fidèle serviteur.
– Arme-toi au plus vite, Stetzko, du sabre acéré et du fusil, et suis-moi !
– Tu sors ? demande dame Catherine.
– Oui, femme. Il faut que je fasse une ronde pour voir si tout est en ordre.
– J’ai pourtant grand-peur de rester ici toute seule. Mes paupières sont lourdes de sommeil, mais que faire, s’il revient, même en rêve ? Je ne suis pas certaine d’ailleurs que ce fût un songe, tant chacun de ses épisodes prenait de vie…
– La vieille reste à tes côtés et en outre les Cosaques dorment dans l’entrée et dans la cour.
– La vieille ronfle déjà et les Cosaques ne me rassurent guère. Écoute, sire Danilo, enferme-moi plutôt à double tour dans la chambre et emporte la clef avec toi. Dans ces conditions, je n’aurai pas peur, et tes gens s’étendront en travers de ma porte.
– Qu’il en soit ainsi, dit le sire Danilo, tout en époussetant son fusil et en versant de la poudre sur une planchette.
Le fidèle Stetzko attendait déjà, revêtu de pied en cap du harnois complet des Cosaques. Danilo se coiffa du bonnet d’astrakan, ferma la fenêtre, tira les verrous de la porte, donna un tour de clef, et enjambant les Cosaques endormis par terre, il franchit sans bruit le seuil et marcha vers les coteaux.
Presque toute l’étendue de la voûte céleste était redevenue limpide. Une molle brise montait du Dniépr, en haleine presque imperceptible. Si du lointain n’étaient venus les cris plaintifs de la mouette, on aurait pu croire que la nature entière gisait sans voix. Mais soudain l’on entendit un bruissement… Bouroulbache et son serviteur fidèle se blottirent en silence derrière des épines masquant un abatis. Quelqu’un en justaucorps rouge, avec deux pistolets et un sabre au côté, descendait la colline.
– C’est le beau-père, dit à mi-voix Danilo, aux aguets derrière un buisson. Qu’a-t-il à errer dehors à pareille heure, et où va-t-il ? Attention, Stetzko, ouvre un œil vigilant et vois quel chemin prendra le seigneur père…
L’homme au justaucorps rouge descendit jusqu’à la grève et tourna du côté de la langue de terre.
– Ah ! c’est donc là ? dit le sire Danilo, car il s’est bien dirigé, n’est-ce pas, Stetzko, tout droit vers l’antre du sorcier ?
– Certainement, et pas ailleurs, sire Danilo, sinon nous l’aurions revu de l’autre côté, or, il a disparu dans les parages du château.
– Attends ! nous allons d’abord nous dégager d’ici, puis nous le suivrons à la piste. Quelque chose se cache là-dessous. Non, non, dame Catherine, j’avais bien dit que ton père était un méchant homme ; en aucune occasion il ne se comporte comme un orthodoxe.
Voici déjà le sire Danilo et son fidèle valet qui surgissent en silhouettes furtives sur la pointe de terre ; ils ont tout de suite disparu, l’impénétrable forêt qui cerne le château les a engloutis. Tout en haut, une lucarne vient de s’éclairer d’une faible lueur. Les Cosaques se tiennent au pied des murs, se demandant par quel moyen les escalader ; on n’aperçoit ni porche, ni poterne. Il y aurait bien un accès par la cour, mais comment y pénétrer ? De loin, on entend là-bas des chaînes grincer et des molosses qui courent.
« Qu’ai-je à m’interroger si longtemps ? se dit le sire Danilo, à la vue d’un chêne altier poussé droit devant la fenêtre. Reste ici, mon gars, je vais grimper sur cet arbre, de là on peut voir en plein à travers la lucarne… »
Il se défait de son ceinturon, abandonne son sabre sur le sol, de peur qu’il ne tinte pendant l’escalade, puis s’agrippant aux rameaux, il monte jusqu’au faîte du chêne. Assis sur une grosse branche, juste au niveau de l’étroite ouverture, et s’accrochant d’une main au tronc, il regarde de tous ses yeux.
Il n’y a pas un flambeau dans la chambre, mais il y fait pourtant clair. Aux murs, sont dessinés des signes bizarres, des armes y pendent aussi, mais toutes paraissent étranges ; ni les Turcs, ni les gens de Crimée, ni les Polonais, ni les orthodoxes, ni même le glorieux peuple suédois n’en portent de pareilles. Au ras du plafond, passe le vol en zigzag des chauves-souris dont les ombres intermittentes frôlent tantôt les parois, tantôt les portes, ou le plancher. Voici que la porte vient de tourner sans rumeur sur ses gonds ; un personnage en pourpoint rouge entre et marche droit à la table recouverte d’une nappe blanche.
– C’est lui, c’est le beau-père !
Le sire Danilo descend un peu plus bas et se presse plus fortement contre le chêne.
Mais le beau-père a autre chose en tête que de regarder si on l’épie par la fenêtre. Il est arrivé la mine sombre, l’air de méchante humeur ; le voilà maintenant qui arrache la nappe, et tout à coup, sans le moindre bruit, la pièce entière s’inonde d’une clarté bleue et transparente. Sans se confondre avec elle, les ondes d’or pâle de la lumière précédente s’y sont diluées, y ont plongé comme dans un océan d’azur, et s’étirent désormais en longues traînées rappelant les jaspures du marbre. Il pose alors sur la table un vase où il jette on ne sait quelles herbes.
Le sire Danilo le considère plus attentivement, car jusqu’à présent il n’avait pas remarqué que le vieillard n’était plus revêtu de son pourpoint rouge. Il a maintenant des culottes bouffantes comme celles que portent les Turcs et un ceinturon avec des pistolets ; sur la tête, une coiffure extraordinaire, de haut en bas couverte de caractères qui ne sont ni russes ni polonais. Les yeux du guetteur s’attachent à ce visage qui change par degrés ; le nez s’allonge jusqu’à pendre au-dessus des lèvres ; en l’espace d’une minute, la bouche s’est fendue jusqu’aux oreilles, un croc sort de cette bouche et devant Danilo se dresse à présent ce même sorcier, apparu pendant la noce chez le capitaine.
– Ton rêve ne mentait pas, Catherine, songe Bouroulbache.
Maintenant le nécromant fait les cents pas à travers la chambre ; depuis quelque temps, les signes aux murailles changent en une succession plus rapide ; de haut en bas, et d’avant en arrière, s’accélère le vol des chauves-souris. La lumière bleue baisse, diminue progressivement et l’on dirait qu’elle va s’éteindre. Puis, le réduit s’éclaire d’une subtile lueur rose. Il semble alors que cette étrange aura s’est répandue avec un faible son jusqu’aux angles mêmes de la pièce, et puis qu’elle a été soufflée tout à coup cédant la place aux ténèbres. L’on ne perçoit plus qu’un bruissement, à croire qu’une brise, à l’heure douce du soir, folâtre en tournoyant sur un miroir d’eau, en ployant de plus en plus vers les ondes les saules argentés. Et le sire Danilo a l’impression que la lune brille dans cette chambre, que les étoiles y circulent, qu’un ciel bleu foncé s’y laisse entrevoir ; déjà même l’haleine du vent nocturne lui souffle de cette fenêtre en plein visage. Puis, il s’imagine (mais alors il tire sur ses moustaches, pour se rendre compte qu’il est bien réveillé) qu’il n’y a plus de lune dans cette chambre, sa propre chambre à coucher ; aux parois pendent ses armes à lui, sabres turcs et tartares ; le long des murs, voici les étagères et sur leurs rayons la vaisselle et les ustensiles de cuisine ; sur la table, on découvre le pain et le sel ; le berceau pend du plafond, mais à la place des saintes images se montrent d’affreuses trognes ; sur le poêle… Mais alors, un brouillard opaque a recouvert toutes choses et il fait noir comme dans un four. Puis la chambrette s’est de nouveau éclairée de cette même lueur rose, accompagnée du son étrange d’auparavant et l’on réaperçoit le sorcier immobile, coiffé de son bizarre turban. Les sons augmentent d’intensité, et leur timbre se fait plus grave, la subtile lueur rose devient plus vive, et quelque chose de blanc, on dirait un nuage, s’agite doucement au milieu de la pièce. Et le sire Danilo croit distinguer que ce n’est point là un nuage, mais bien une femme ; seulement, de quoi peut-elle bien être faite ? ne serait-elle pas pétrie d’air ? Et d’où vient donc qu’elle se dresse là, debout de toute sa taille, sans que ses pieds effleurent le sol, sans le moindre appui, et que la lueur la pénètre de part en part, si bien qu’on discerne au travers les signes écrits sur la muraille ? Mais voici qu’elle a remué sa tête transparente, ses yeux d’un bleu pâle se sont doucement illuminés, ses cheveux se bouclent et viennent se dérouler sur ses épaules, comme un brouillard d’un gris léger ; un peu de rouge avive ses lèvres, de même qu’au travers de la transparence blafarde du ciel matinal s’étale, presque invisible, l’incarnat de l’aube ; ses sourcils ont pris une nuance plus foncée.
– Ah ! c’est Catherine !
Dès lors, Danilo se sent les membres comme chargés de fers, il fait effort pour parler, mais ses lèvres remuent sans émettre aucun son.
Le sorcier se tient immobile à la même place.
– Où étais-tu ? demande-t-il et la forme debout devant lui se met à frissonner.
– Oh ! pourquoi m’avoir évoquée ? gémit-elle d’une voix douce. Je me trouvais si bien. J’étais en ce lieu où je naquis, et où j’ai vécu quinze ans. Ah ! comme je m’y plaisais ! Comme il est vert et comme il sent bon ce pré où je jouais dans mon enfance ; il y pousse les mêmes fleurs des champs et rien n’a changé à notre maison, pas plus qu’à notre verger. Oh ! ces baisers dont me comblait ma bonne mère ! quel amour ne lisait-on pas dans ses yeux ! Elle me dorlotait, me baisait les lèvres et les joues, peignait au peigne fin ma chevelure blonde. Père ! dit-elle en dardant ses prunelles pâles sur le nécromant, pour quelle raison as-tu égorgé ma mère ?
Le sorcier la menace du doigt.
– T’ai-je priée de parler de cela ?
À cette question, la belle fille éthérée est saisie d’un tremblement.
– Où se trouve en ce moment ta maîtresse Catherine ?
– Ma maîtresse Catherine s’est endormie, et ravie de cette occasion, j’en ai profité pour prendre l’essor et m’envoler à tire-d’aile. Il y avait longtemps que je désirais voir ma mère, et brusquement il m’a semblé que je n’avais que quinze ans et je suis devenue légère comme un oiseau. Pourquoi m’as-tu évoquée ?
– Te rappelles-tu tout ce que je t’ai dit hier soir ? demanda le sorcier d’une voix si sourde qu’on a peine à l’entendre.
– Je me le rappelle, oui, et combien ne donnerais-je point pour l’oublier ! Pauvre Catherine, elle ignore bien des choses que connaît son âme.
« C’est, l’âme de Catherine, se dit Danilo qui n’ose encore faire un mouvement. »
– Repens-toi, père ! N’est-il pas épouvantable qu’à la suite de chacun des crimes commis de ta main, les morts surgissent de leur tombe ?
– Tu rabâches encore ces vieilles histoires ? interrompt le sorcier d’un ton saccadé. Je maintiens mes exigences, je te forcerai à agir selon ma volonté. Catherine m’aimera !
– Oh ! tu es un monstre, et non pas mon père, gémit l’ombre. Non, il n’en sera pas selon tes désirs. Il est vrai que grâce à tes enchantements diaboliques tu as usurpé le pouvoir d’évoquer une âme et de la torturer. Mais Dieu seul est capable de l’amener à faire ce qu’il lui plaît. Non, jamais, tant que j’habiterai son corps, Catherine ne se résoudra à commettre une action contraire à la loi divine. Père, le jour du Jugement dernier est proche. Ne serais-tu pas mon père, tu ne m’amènerais pas pour autant à tromper l’époux que je chéris et qui m’est fidèle ; ne me garderait-il pas sa foi, je ne le trahirais point malgré tout, parce que Dieu n’aime pas les âmes parjures et déloyales…
À ce moment, ses yeux pâles fixent la lucarne sous laquelle le sire Danilo se trouve perché, et immobile, elle cesse de parler.
– Où regardes-tu ? que vois-tu là-bas ? s’écrie le sorcier.
La Catherine aérienne se met à trembler. Mais déjà le sire Danilo s’est laissé glisser à terre et, suivi du fidèle Stetzko, il se fraie un chemin vers les collines où il habite.
« C’est affreux ! affreux ! » se dit-il à part soi, cependant que son cœur de Cosaque est envahi d’une vague crainte.
Bientôt, il traverse sa propre cour où les Cosaques continuent à dormir aussi profondément que lors de son départ, à l’exception d’un seul, assis à l’écart et qui fume la pipe.
Toute la nue est parsemée d’étoiles.
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