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Chapitre XVIII
L’HISTOIRE DE KARL IVANOVITCH
Tard dans la soirée, la veille du jour où Karl Ivanovitch devait nous quitter pour toujours, il se tenait debout, près du lit, dans sa robe de chambre ouatée et son bonnet rouge, et, penché sur sa malle, il emballait avec soin ses hardes.
Pendant ces derniers temps, Karl Ivanovitch nous traitait sèchement; il avait l’air de vouloir nous éviter. Ce soir-là, de même, lorsque j’entrai dans la chambre, il se contenta de me regarder du coin de l’œil et continua d’empaqueter ses effets.
Je m’étendis sur mon lit; Karl Ivanovitch, qui me le défendait sévèrement autrefois, ne me dit rien. La pensée qu’il ne nous gronderait plus, qu’il ne serait plus là pour nous empêcher de faire ce que nous voulions, qu’il n’avait désormais plus rien à nous dire, me fit sentir plus vivement l’approche de la séparation. Je ne pouvais croire qu’il eût cessé de nous aimer, et j’eus envie de le lui faire entendre.
«Permettez-moi, Karl Ivanovitch, de vous aider,» dis-je en m’approchant de lui.
Notre «menin» jeta un regard sur moi et se détourna aussitôt; mais, dans ce coup d’œil furtif, je pus lire, au lieu de l’indifférence à laquelle j’attribuais sa froideur, une tristesse vraie et concentrée.
«Dieu sait tout, il voit tout, et tout se fait par sa sainte volonté! dit-il en se redressant de toute sa taille et avec un profond soupir.
«Oui, Nicolinka (cher Nicolas), reprit-il en remarquant que je le regardais les yeux pleins d’une sincère compassion, être malheureux du berceau à la tombe, tel est mon sort. On m’a toujours rendu le mal pour le bien que j’ai fait, et ma récompense me viendra de là! ajouta-t-il en indiquant le ciel.—Si vous connaissiez l’histoire de ma vie, si vous saviez tout ce que j’ai souffert…. J’ai été cordonnier, j’ai été soldat, j’ai été déserteur, fabricant, instituteur, et maintenant je suis zéro! Je n’ai pas un lieu pour abriter ma vieille tête.» Et, fermant les yeux, Karl Ivanovitch se laissa tomber dans un fauteuil.
Je remarquai que Karl Ivanovitch était dans cette humeur sentimentale, qui le rendait expansif et le portait à se raconter à lui-même ses pensées les plus intimes, sans se demander si on l’écoutait ou non. Les yeux toujours fixés sur son bon visage, je m’assis sur le lit.
«Vous n’êtes plus un enfant, vous pouvez me comprendre; je veux vous raconter mon histoire, l’histoire de tout ce que j’ai souffert…. Un jour vous vous rappellerez votre vieil ami, qui vous a beaucoup aimés, mes enfants!»
Karl Ivanovitch appuya son coude sur la petite table qui se trouvait près de lui; il aspira une prise de tabac, et, levant les yeux au ciel, il commença son récit de cette voix toute particulière et gutturale, qu’il prenait d’habitude pour nous faire la dictée:
«Cheai été malheureux tècha dans le sein de mon mère. Das Unglück verfolgte mich schon im schoosse meiner Mutter,» répéta-t-il avec encore plus d’emphase.
Karl Ivanovitch m’a tant de fois depuis raconté son histoire, dans le même ordre, en employant les mêmes expressions, avec les mêmes intonations, que j’espère pouvoir la rendre ici mot à mot; il va sans dire que j’omettrai les incorrections de langage dont j’ai donné un échantillon dans la première phrase de son récit.
Était-ce son histoire véritable ou l’œuvre de son imagination, enfantée dans la solitude de son existence, quand il vivait avec nous à la campagne, et à laquelle il avait fini par croire lui-même à force de la répéter? Ou bien, s’est-il contenté de broder les faits réels de sa vie et d’y ajouter des épisodes fantastiques? Je ne sais pas encore maintenant à quoi m’en tenir là-dessus. D’un côté, il racontait son histoire avec une émotion vraie et un ordre méthodique, deux signes qui semblent attester son authenticité et ne permettent pas de la mettre en doute; mais, d’un autre côté, il y avait beaucoup de traits poétiques dans ce récit, et ces fleurs de rhétorique éveillent en moi quelque doute.
Quoi qu’il en soit à cet égard, voici ce qu’il m’a raconté:
«Dans mes veines coule le sang noble des Sommerblatt! J’avais un frère cadet qui s’appelait Johann; mais j’ai vécu comme un étranger dans ma famille. Quand mon frère Johann faisait des sottises, mon père disait: «Ce Karl ne laisse jamais personne en repos.» Et c’est moi qu’on grondait, et c’est moi qui recevais les coups.
«Quand mes sœurs se querellaient, papa disait: «Ce Karl ne sera jamais obéissant,» et de nouveau j’étais grondé et battu.
«Ma bonne mère était la seule personne qui m’aimât et dont je reçusse des caresses. Elle m’embrassait en cachette. Un jour elle me dit:
«Pauvre, pauvre Karl! personne ne t’aime; mais moi, je ne te changerais contre personne. Ta mère ne te demande qu’une chose: travaille bien, sois toujours un honnête homme, et Dieu ne t’abandonnera pas!»
«Et je travaillai! Quand j’eus quatorze ans révolus et que le moment fut venu de faire ma première communion, ma mère dit à mon père:
«Karl est maintenant un grand garçon; Gustave, que ferons-nous de lui?
«Et mon père répondit: «Je n’en sais rien.» Alors ma mère lui dit:
«Envoyons-le à la ville, et plaçons-le chez M. Schultz pour qu’il apprenne le métier de cordonnier!»
«Et mon père dit: «Bien,» Und mein vater sagte: «Gut,» répéta Karl Ivanovitch, dans sa langue, pour donner plus de poids à ses paroles.
«J’ai passé six ans et sept mois chez le maître cordonnier; il m’aimait beaucoup.
«Un jour il me dit: «Karl, tu es un excellent ouvrier, et un de ces jours tu deviendras contre-maître.» Mais … l’homme propose et Dieu dispose…. En 1796, on fit la conscription, et tous les jeunes gens de dix-huit à vingt ans qui n’étaient pas exemptés du service militaire devaient aller se présenter à la ville.
«Mon père et mon frère Johann arrivèrent à la ville, et nous allâmes ensemble tirer au sort pour savoir qui serait soldat et qui ne le serait pas. Johann tira un mauvais numéro, il devait être soldat; moi je tirai un bon numéro, je ne devais pas être soldat.
«Et mon père dit:
«J’avais un fils, et je dois m’en séparer.»
«Je pris mon père par la main et je lui dis:
«Pourquoi parlez-vous comme ça, mon père? Venez avec moi, j’ai quelque chose à vous dire.»
«Et mon père vint avec moi. Nous entrâmes chez un traiteur et nous nous mîmes à une petite table. Je demandai deux cruches de bière; quand on les eut apportées, nous bûmes chacun un verre; mon frère Johann prit aussi un verre.
«Cher papa, dis-je alors, ne dites plus que vous n’avez qu’un fils et que vous devez vous en séparer; il me semble que mon cœur va éclater quand vous parlez ainsi…. Mon frère Johann ne fera pas le service militaire, moi je serai soldat. Karl n’est nécessaire à personne ici, et Karl sera soldat.
«Vous êtes un honnête homme, Karl,» me dit mon père, et il m’embrassa.
«Et je suis devenu soldat.»
«Nous étions alors dans des temps terribles, cher Nicolas, continua Karl Ivanovitch dans son récit. C’était l’époque de Napoléon.
«Il voulait conquérir l’Allemagne, et nous avions à défendre notre Vaterland jusqu’à la dernière goutte de notre sang.
«J’ai été à Ulm! j’ai été à Austerlitz! j’ai été à Wagram! Ich war bei Wagram!
—Comment, vous aussi vous vous êtes battu? demandai-je avec stupéfaction, en le regardant. Est-ce que vous avez tué des hommes?»
Karl Ivanovitch me rassura immédiatement à ce sujet.
«Un jour un grenadir français était resté en arrière, et il tomba au bord de la route. Je courus sur lui avec mon fusil et je voulus le percer de ma baïonnette; mais le Français rejeta son fusil en arrière et me demanda grâce, et je lui ai laissé la vie.
«A Wagram, Napoléon nous chassa sur une île et nous cerna de telle manière qu’il n’y avait moyen de s’échapper d’aucun côté. Pendant trois jours, nous sommes restés sans vivres et dans l’eau jusqu’aux genoux. Ce scélérat de Napoléon ne se décidait pas à nous faire captifs, et pourtant il nous retenait de force.
«Le quatrième jour, grâce à Dieu, il nous fit prisonniers, et l’on nous mena dans une forteresse. J’étais vêtu d’un pantalon bleu, d’un uniforme de bon drap, et je possédais quinze thalers et une montre en argent, cadeau de mon père. Un soldat français me dépouilla de tout cela. Heureusement pour moi, j’avais conservé sous mon gilet trois ducats que ma mère m’avait donnés. Personne ne m’a ravi cet argent.
«Je ne me souciais pas de rester longtemps dans cette forteresse, et je pris la résolution de m’enfuir. Un jour de grande fête, je dis au sergent qui nous gardait:
«Monsieur le sergent, c’est grande fête aujourd’hui … je veux la célébrer…. Apportez, je vous prie, deux bouteilles de madère et nous les viderons ensemble.
«Le sergent répondit: «Bien!»
«Quand il eut apporté le madère, après avoir vidé chacun notre verre, je lui pris la main et je lui dis:
«Monsieur le sergent, avez-vous un père et une mère?
«Il me répondit: «Oui, monsieur Mauer, j’ai un père et une mère.»
«Mon père et ma mère,—dis-je alors,—ne m’ont pas vu depuis huit ans, et ils ne savent pas si je vis encore ou si mes os ne reposent pas depuis longtemps dans la froide terre. Oh! monsieur le sergent! j’ai deux ducats que j’ai cachés dans mon gilet, prenez-les et rendez-moi la liberté. Soyez mon bienfaiteur, et ma mère priera tous les jours Dieu pour vous.
«Le sergent prit un second petit verre de madère, et me dit:
«Monsieur Mauer, je vous aime beaucoup et je vous plains; mais vous êtes prisonnier, et moi je suis soldat.
«Je lui serrai la main et je lui dis: «Monsieur le sergent!»
«Et le sergent me dit: «Vous n’êtes pas riche, et je ne prendrai pas votre argent, mais je viendrai à votre aide. Lorsque j’irai me coucher, achetez un barillet d’eau-de-vie, donnez-le aux soldats, et ils s’endormiront. Moi, je fermerai les yeux.»
«Le sergent était un brave homme. J’achetai un barillet d’eau-de-vie, et, quand les soldats furent ivres, je mis mes bottes, un vieux manteau, et je sortis tranquillement dans la cour. Je me dirigeai vers le rempart, et je me disposais à le franchir, lorsque je m’aperçus qu’il était tout entouré d’eau; je ne voulais pas salir les seuls habits qui me restaient. Je me décidai à sortir par la porte.
«La sentinelle avec son fusil montait la garde en se promenant. Elle me regarda et me cria tout à coup: «Qui vive?»
«Je me tus.
«Qui vive?» dit encore une fois la sentinelle.
«Je gardai toujours le silence.
«Qui vive?» répéta la sentinelle pour la troisième fois.
«Alors je courus, je sautai dans l’eau, et je sortis de l’autre côté, puis je repris ma course.
«Je ne m’arrêtai pas de toute la nuit, et, quand il fit jour, dans la crainte d’être reconnu, je me cachai dans les seigles hauts. Alors je me mis à genoux, je rendis grâce à Dieu qui m’avait sauvé, et je m’endormis paisiblement.
«Je me réveillai le soir, et je continuai ma route. Tout à coup un grand fourgon allemand, attelé de deux chevaux noirs, me rejoignit. Dans le fourgon était assis un homme bien mis; il fumait une pipe et me regardait. Je me mis à marcher très lentement pour laisser la voiture prendre les devants; mais plus je marchais lentement, plus la voiture ralentissait sa marche, et l’homme me regardait toujours. Je m’assis sur le bord de la route, l’homme fit arrêter ses chevaux sans cesser de me regarder.
«Jeune homme, me dit-il, où allez-vous si tard?
«J’ai répondu que j’allais à Francfort.
«—Venez dans mon fourgon, il y a de la place, je vous y conduirai. Mais pourquoi n’avez-vous pas d’effets avec vous, et votre barbe n’est-elle point rasée, et vos vêtements sont-ils couverts de boue? ajouta-t-il quand je pris place à ses côtés.
«—Je suis un pauvre ouvrier, répondis-je, je voudrais trouver du travail dans une usine: mes habits sont crottés parce que je suis tombé sur la route.
«—Vous ne dites pas la vérité, jeune homme, dit l’inconnu: il n’y a pas de boue sur la route.
«Je ne répondis pas.
«—Avouez-moi toute la vérité, me dit ce brave homme. Qui êtes-vous? d’où venez-vous? Votre figure me plaît, et, si vous êtes un honnête garçon, je vous viendrai en aide.
«Je lui avouai tout.
«Il dit: «C’est bien, jeune homme, venez à ma fabrique de cordes: je vous donnerai du travail, des vêtements, de l’argent, et vous vivrez chez moi.»
«Et je dis: «Bien!»
«Arrivés à la fabrique de cordes, ce brave homme dit à son épouse: «Voici un jeune homme qui s’est battu pour sa patrie et qui s’est sauvé de prison; il n’a ni abri, ni vêtements, ni pain. Il vivra chez moi. Donne-lui du linge propre et sers-lui à manger.»

«Je suis resté un an et demi dans cette fabrique, et mon maître avait tant d’affection pour moi, qu’il ne voulait plus que nous nous séparions. Mais ce n’était pas pour finir mes jours chez des étrangers, loin de mon pays, que je m’étais évadé des mains des Français. Je m’arrachai à ce bien-être, et, un soir, quand tout le monde fut couché, j’écrivis une lettre à mon patron, où je lui avouais les angoisses de mon esprit et le remerciais de ses bontés. Je posai cette lettre sur la table de ma chambre; je rassemblai mes vêtements, je pris trois thalers en argent, et je sortis sans bruit dans la rue.
«Personne ne me vit, et je pus suivre tranquillement la grande route.»
«Je n’avais pas vu ma mère depuis neuf ans, et je ne savais pas si elle était encore vivante. Je retournai dans mon pays. Quand je me trouvai de nouveau dans ma terre natale, je demandai où demeurait Gustave Mauer, fermier chez le comte de Sommerblatt.
«Et l’on me répondit: «Le comte de Sommerblatt est mort, et Gustave Mauer habite la grand’rue, où il tient une échoppe de liqueurs.»
«Je revêtis mon gilet neuf, ma belle redingote,—un cadeau du fabricant de cordes,—je lissai soigneusement mes cheveux et je me rendis à l’échoppe de mon père. Ma sœur Mariechen était dans la boutique et me demanda ce que je désirais.
«Puis-je boire un petit verre de liqueur? répondis-je.
«—Père! cria-t-elle, voici un jeune homme qui demande un petit verre de liqueur.
«Mon père dit alors:
«Donne au jeune homme un petit verre de liqueur.
«Je m’assis à une table, je bus mon petit verre, je fumai ma pipe et j’observai mon père, Mariechen et mon frère Johann, qui entra aussi dans la boutique.
«Dans le cours de la conversation, mon père me dit:
«—Jeune homme, ne savez-vous pas où se trouve actuellement notre armée?
«—Je reviens moi-même de l’armée, répondis-je; dans ce moment elle est près de Vienne.
«—Notre fils, dit alors mon père, était soldat, et voici déjà neuf ans qu’il ne nous a écrit, et nous ne savons pas s’il est mort ou s’il vit encore. Ma femme ne cesse de le pleurer.
«Je continuai de fumer ma pipe et je dis:
«—Comment s’appelait votre fils et dans quel régiment a-t-il servi? je le connais peut-être.
«—On l’appelait Karl Mauer et il servait dans les chasseurs autrichiens, répondit mon père.
«—Il est de grande taille, un bel homme comme vous! ajouta ma petite Mariechen.
«—Je connais votre Karl, leur dis-je alors.
«—Amalia! s’écria soudain mon père, venez, il y a ici un jeune homme qui connaît notre Karl.
«Et ma mère accourut de l’autre chambre. Je la reconnus au premier coup d’œil.
«—Vous connaissez notre Karl? demanda-t-elle en me regardant toute pâle et tremblante….
«—Oui, je l’ai vu, répondis-je, sans oser lever les yeux sur elle. Mon cœur semblait vouloir bondir hors de ma poitrine.
«—Mon Karl vit? Où est-il, mon cher Karl? répétait-elle. Je mourrais tranquille si je pouvais voir encore une fois mon fils chéri». Et ma mère se mit à pleurer.
«Je n’y pouvais plus tenir:
«Ma mère, m’écriai-je, je suis votre Karl!»
«Et ma mère tomba dans mes bras.»
Karl Ivanovitch ferma les yeux, et ses lèvres tremblèrent.
Revenu à lui, il répéta encore une fois sa dernière phrase et essuya de grosses larmes qui roulaient sur ses joues.
Puis il termina son récit dans ces termes:
«Mais Dieu n’a pas permis que je finisse mes jours dans ma patrie. Je suis né pour être malheureux. Je n’ai passé que trois mois avec mes parents.
«Un dimanche, je me trouvais dans un café, devant une cruche de bière et je fumais tranquillement ma pipe en causant politique avec des amis; nous parlions de l’empereur Frantz, de Napoléon, de la guerre, et chacun disait son opinion.
«Près de nous se trouvait un inconnu en paletot gris; il prenait une tasse de café, fumait une pipe et ne disait mot.
«Lorsque le veilleur cria: «Dix heures!» je pris mon chapeau, je payai ma consommation et je rentrai à la maison. A minuit on frappa à notre porte. Je me réveillai et je demandai: «Qui est là?»
«—Ouvrez!
«-Je répétai: «Dites qui vous êtes, j’ouvrirai ensuite.»
«—Ouvrez au nom de la loi!»
«J’ouvris. Deux soldats armés de fusils restèrent à ma porte, et dans ma chambre entra l’inconnu au paletot gris, qui se trouvait près de moi au café.
«C’était un espion! Es war ein Spion!
«Suivez-moi, dit l’espion.
«—Bon,» répondis-je.
«Je passai mes bottes, und pantalon, je mis mes bretelles. J’arpentai là chambre, mon cœur bouillonnait; je me disais: «C’est un lâche!» Quand je me trouvai devant le mur où mon épée était suspendue, je la saisis tout à coup et je criai:
«Tu es un espion, défends-toi.»
«Je lui donnai un coup à droite, un coup à gauche et un sur la tête. Der Spion tomba!
«Je saisis ma malle et mon argent, et je sautai par la fenêtre.
«J’arrivai à Ems, où je fis la connaissance d’un général russe, M. Sasine. Il me prit en affection, me fit donner un passe-port et m’emmena en Russie comme précepteur de ses enfants.
«Quand le général Sasine fut mort, votre mère me fit venir et me dit:
«Karl Ivanovitch! Je vous confie mes enfants, aimez-les, et je ne vous abandonnerai jamais. J’assurerai votre vieillesse.»
«Elle n’est plus, et tout est oublié. Pour reconnaître mes vingt années de service, on me chasse aujourd’hui, un vieillard, dans la rue, m’envoyant chercher un morceau de pain sec….
«Dieu voit tout et sait tout, et telle est sa volonté; seulement je vous regretterai beaucoup, vous, mes enfants!» dit Karl Ivanovitch en terminant son récit. Il me prit par la main, m’attira vers lui et me baisa la tête.
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